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11/11/2014

Uber, ou le chant du cygne capitaliste

37yd80sv.jpgHier, pour des raisons diverses (heure tardive, éloignement de l'un lieu où je pourrais facilement trouver un taxi) j'ai finalement recouru aux services d'Uber. Mes copains sur place avaient déjà leur abonnement. J'aurais pu commander un taxi, mais non, j'ai cédé. Rien à redire, la voiture est arrivée en 6 minutes. Le type conduisait plus attentivement qu'un taxi, ne nous infligeait ni sa radio à fond ni ses commentaires vibrants d'ignorance sur l'état politique du pays, et nous a même proposé de l'eau ou des bonbons.

Le tout pour une course qui nous est revenu à 5 à 10 euros de moins que si nous avions commandé un taxi. Que demande le peuple ? N'est-ce pas beau, le progrès, le service individualisé et sur mesure ? Sans doute est-ce pour cette optimum qualité de service que le fondateur de Uber est devenu en quelques années seulement, milliardaire. Amen. 

C'est pas sérieux... Quand je pense que certaines voix de gauche, les modernistes évidemment, se sont réjouis ! Evidement. Ils ont été bien coachés les petits, ils ont bien manigancé leur arrivée en France, les coquins. Très belle campagne, un peu facile tant elle joue sur du velours en France, eu égard à la détestation des taxis tricolores. Geignards, en retard, trop chers et introuvables. Qui voudrait défendre cette corporation ? La bataille était gagnée avant que d'être jouée.

Rappelons tout de même qu'Uber figure dans la liste des entreprises qui font du Double Pump, à savoir qu'il emmagasine des pertes dans tous les pays et centralise ses profits en Irlande histoire de bien dégraisser les impôts. Et pour les conducteurs, quid de la protection sociale, des arrêts maladies, des assurances diverses et autres droits fondamentaux auxquels ont droit n'importe quel travailleur ? Oubliettes. Uber comme tant d'autres capitalise sur l'armée de réserve des chômeurs pour décréter "take it or die waiting". Et ironie de l'histoire, tant de jeunes cools applaudissent. Les jeunes, surtout, plébiscitent ce nouveau service, preuve supplémentaire de l'absence de mémoire et des contradictions de l'époque : nous continuons à descendre dans la rue pour empêcher de repousser la retraite à 60 ans, nous arrimons pour maintenir une santé gratuite, les 35h, payer les heures supplémentaires le dimanche... En clair, fort heureusement, un modèle social protecteur et de plus en plus protecteur pour tout ceux qui sont déjà dedans. Ceux qui sont en dehors ? Qu'ils crèvent... Uber l'a bien compris qui embauche de nombreuses personnes qui sont déjà des salariés précaires, mais avec un système de protection sociale, et qui arrondissent leurs fins de mois en faisant la nique aux taxis. Quand je vois des intermittents du spectacle encenser Uber, je m'interroge longuement...

Bien sûr que les taxis sont une corporation contestable en bien des points, mais comment avons nous pu collectivement inverser la charge de culpabilité à ce point ? Tristesse. Il faut arrêter de se coucher devant ces créations de fausses valeurs. Monétaires, certes, mais après ? A part gonfler le PIB et maximiser les profits de quelques uns, quelle est la valeur et l'utilité sociales créés par Facebook, Uber ou Airbnb, autant de nouvelles sociétés qui s'engouffrent dans les failles du capitalisme. 

Uber, ce n'est pas la maladie infantile du capitalisme, mais plutôt son chant du cygne. Comme le prophétise Rifkin, "nous sommes entrés dans une ère de décomposition du capitalisme, ou quelques malins exploiteront le besoin d'ultra court termisme sur des niches". Pour l'heure, il faut que le politique reprenne la main et se disent que si Uber consacre une part démesuré de son chiffre d'affaires à embaucher des bataillons d'avocats, c'est peut être plus par connaissance d'un système frauduleux généralisé que par amour du droit... Cette bataille vaut la peine d'être livrée et la victoire est plus qu'envisageable.