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26/01/2018

Data economy, extension de la privatisation des profits et collectivisation des pertes

En 2008, le plus gros hold up de l'histoire a eu lieu et personne n'est allé en prison. Pourtant les coupables sont connus, les caméras ont tout filmé, et les complices sont connus. On a trouvé quelques lampistes, des individus a qui on a fait porter un chapeau mille fois trop grand pour eux. Jérôme Kerviel chez nous, Bernard Madoff aux US. Voilà. Des années de spéculation dégueulasse, des pyramides de crédits pourris accordés par des banques qui cherchaient à dépouiller les plus pauvres de ce qu'ils n'avaient pas encore et quand ils ne pouvaient plus rembourser leurs prêts à "taux variables" comme le veut l'euphémisme, des millions d'expulsions... Goldman Sachs, Bank Of America, AIG, Lehman Brothers, les dirigeants de ces boîtes devraient avoir leur Guantanamo à eux. Leur responsabilité est avérée, ils ne l'ont d'ailleurs pas vraiment caché lorsqu'ils ont été auditionné par des commissions politiques. Mais selon la célèbre formule de Georgina Dufoix suite au scandale du sang contaminé, ils ont tous été reconnus responsables mais pas coupables. Les Etats ont payé pour renflouer les banques à hauteur de milliers de milliards de $, avant de décréter qu'il fallait faire des coupes dans les services publics. 

Cette crise, plus que financière, est une crise sans précédent de la responsabilité. En ne sanctionnant aucun banquier, on leur donne un blanc seing pour continuer leurs bulles et aujourd'hui, la seule inconnue est la date d'explosion de la prochaine. De nombreuses raisons expliquent sans doute l'impunité des banksters. L'endogamie dégueulasse avec le politique, en premier lieu. Goldman Sachs a fourni des dirigeants à l'Italie (Draghi) la Grèce (Papademos) et surtout l'Union Européenne avec José Manuel Barroso qui est parti de l'UE en allant directement chez Goldman sans passer par la case prison et en empochant beaucoup plus que 20 000 euros... Blair, Schröder et moults autres ex dirigeants vont chercher leurs émoluments là bas. Au final, cette alliance mortifère entres irresponsables publics et privés débouche sur un scandaleux hold up légal où l'on permet à une poignée de ploutocrates de privatiser tous les profits acquis avec une éthique douteuse et de collectiviser toutes les pertes liées à leurs conneries...

Cette économie de l'irresponsabilité trouve de nouveaux débouchés avec les géants de la data economy. Lesquels se comportent en vampires, aspirant toute information sur vous et les revendant allègrement avec ce merveilleux nouveau métier de "data broker" qui jouit d'une certaine aura et d'appointements annuels à 6 ou 7 chiffres (plutôt 7...) alors qu'il a une utilité sociale inférieure à celle d'un cafard. Les géants du web n'ont qu'un mot d'ordre auprès des pouvoirs publics : ouverture et liberté. Laissez nous pomper avec plus d'ardeur que les Shadocks l'ensemble des données qui circulent sur les réseaux et laissez nous surtout empocher l'ensemble des profits liés au trafic. Cette circulation, fatalement, ne va pas sans quelques ratés et là, soudain, quand on exige réparation, il n'y a plus personne à l'adresse que vous avez demandé.

Prolifération de fausses nouvelles, de propos haineux, de contenus dégueulasses poussés et sponsorisés sur leurs réseaux, toute cette nouvelle cyber insécurité, cyber délinquance et autres est évidemment du domaine de leur responsabilité. Celle de Facebook (sur laquelle je publie ça, donc coucou aux équipes de Zucky) dans la prolifération des attaques contre Clinton est évidente. Responsabilité financière, morale, éthique. Et pourtant, la firme est ressorti de ce scandale blanche comme neige. En début d'année Zuckerberg a d'ailleurs fait un mea culpa, mais un mea culpa morale sans obligation de changements de pratiques. Un peu comme un curé récitant un Pater Noster après avoir violé un scout et se jurant de ne pas recommencer... Hier soir lors de la Nuit des Idées, j'ai discuté avec des directeurs de journaux, papier comme internet, des observateurs de médias, des ONG liés aux médias. Tous, sans exception, disaient que sur cette histoire de fake news, l'attitude des plate formes était en tous points conformes à celle des banques spéculatives : donnez nous tous les profits et s'il y a le moindre problème à cause de notre attitude... demandez aux responsables publics. C'est si navrant qu'il vaut mieux en rire et se souvenir de cette fulgurance de Coluche à propos de l'irresponsabilité en chaîne : "les enfoirés se rejetant la faute les uns sur les autres, finalement qui c'est qui l'a dans le cul ? C'est nous. C'est ceux qui ont un cul"...