Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

14/05/2022

Haine de soi fiscale

France Inter, service public, financée à la marge par la pub et quelques événements internes et pour une écrasante majorité, par une contribution publique. Sujet de la chronique "les pubs promettant de payer moins d'impôts". Je me réjouissais. Enfin, on allait dénoncer l'insanité de ces pubs ciblées de partout parlant d'investissements indécents dans des passoires thermiques dans des quartiers inconnus de ceux qui achètent, où ils n'iront jamais, n'auront aucune idée de ce qu'ils font, mais retireront un bonus fiscal et revendront sans y avoir jamais les pieds. Et non, le journaliste du Parisien qui faisait la chronique de séparer les annonces sérieuses proposant du Pinel, de celles de margoulins. Mais pas un mot sur l'idéologie derrière ces baisses d'impôts.

Toutes les niches fiscales ne se valent pas. Les dons aux associations, les crédits pour la garde d'enfants ou de personnes âgées ou les réductions pour des investissements écologiques construisent un projet commun. On peut comprendre et encourager ces réductions, reste à se mettre d'accord sur le barème. Mais les dispositifs immobiliers achetés systématiquement par celles et ceux qui gagnent déjà très bien leur vie et veulent baisser leurs impôts sur le revenu, à quoi servent-ils ? On ne manque pas de logements, en France. Au contraire. On n'a jamais eu autant de logements vides. On manque de courage contre la spéculation et la vacance et seule une fiscalité lourde pourrait le changer. Les dispositifs types Sellier, c'est un dispositif d'Ancien Régime, c'est encourager ceux qui gagnent bien leur vie à ne pas redistribuer à la collectivité, mais à se confectionner un pécule.

L'impôt sur le revenu n'est vraiment pas la première ressource de l'état, mais c'est l'impôt le plus juste (sauf pour les hyper riches). Bernard Arnault comme moi ou un allocataire du RSA payons la même TVA sur un achat de supermarché, mais pas les mêmes impôts. Celui au RSA n'en paye pas et c'est heureux, j'ai la chance d'en payer beaucoup et je sais pourquoi et Arnault en paye moins que moins, proportionnellement, et c'est ça notre problème commun. Le fait que les ultra riches fraudent plusieurs dizaines de milliards par an. Plutôt que de se concentrer sur eux, on a dit à ceux qui gagnent entre 3 000 et 6 000 euros par mois, ceux qui devraient participer le plus à l'enrichissement des communs : "soyez malins, faites comme Bernard, ne payez pas d'impôt !".

Cette haine de soi fiscale découle d'un manque de pédagogie. Plutôt que de vanter des baisses, on devrait rappeler à quoi cela sert, la redistribution, en commençant par la gratuité de l'hôpital. Les jeunes parents voient bien qu'ils passent 4 jours avec un grand nombre d'actes, de soins, de personnels à leur service pour une dépense de zéro euro. Ils ne sont pas là par miracle. Les baisses d'impôts, c'est moins de lit, moins de personnel. Et ainsi de suite jusqu'à l'autre bout du spectre de la vie avec de l'aide pour le maintien à domicile avec des soignant.es où en EHPAD (public, pas ORPEA, hein) en passant par l'école, l'université et tant de services publics jadis puissants en France, le patrimoine de ceux qui n'ont pas de patrimoine. C'est plus qu'évident pour qui y réfléchit deux secondes, mais quand on fait face à une propagande de haine fiscale allant des grands médias jusqu'aux pubs ciblées arrivant sur votre smartphone, ça devient David contre Goliath, ce combat... Espérons qu'on retrouvera la fronde (et pas la fraude) pour les 12 et 19 juin.