25/01/2015
L'hystérie politique des entrepreneurs...
Dans un pays où le sport national reste de fracasser l'Etat, les français ont surtout confiance pour s'en sortir dans les représentants de l'Etat. Je me fous bien de ce que peuvent les dire les baromètres sur les institutions favorites des citoyens au sein desquels les politiques arrivent loin derrière les associations, les patrons de PME, ou les citoyens eux mêmes. Les seuls à s'en sortir à peu près sont les élus de proximité, les maires et autres conseillers généraux. Les responsables nationaux sont tout en bas de la liste, honnis de toutes parts.
Et si l'on pouvait affiner ce baromètre, il ressortirait que les entrepreneurs et autres figures économiques sont ceux qui fracassent le plus l'élite politique. Ils les haïssent, les conchient, les tiennent pour incompétents, éloignés de la réalité opérationnelle, déconnectés de la complexité administrative et ainsi de suite. Une analyse lexicographique ferait ressortir une haine quasi pathologique de la figure du politique. Au-delà du french, c'est à un véritable politique bashing auquel on assiste avec une force sans précédent depuis une dizaine d'années. Dont acte. Pour autant, je reviens à cette phrase de début de note que j'ai entendu récemment lors d'un séminaire de travail sur l'énergie. Tellement vrai. Et là, ma réflexion s'est déportée ainsi : qui, aujourd'hui, est cohérent avec sa haine du politique ? Le statut ultime de la colère étant l'indifférence, ils pourraient au moins avoir l'élégance de s'éloigner, de ne pas prendre parti, d'adopter la posture de Bartelby "I would rather not to", comment, judge... Et là, je n'en trouve pas des masses.
J'en trouve certains, comme Olivier Sadran, PDG fondateur de Newrest, 12 000 salariés, qui s'avoue plutôt social-démocrate mais estime qu'il n'a pas à communiquer son opinion dans la mesure où il ne voudrait pas que les politiques commentent sa stratégie. J'en vois d'autres, comme Virginie Calmels qui critiquaient une façon de faire de la politique, mais pas la politique en soi, ce qui n'a pas de sens. Elle a rallié Alain Juppé à la main de Bordeaux et essaye de changer les choses, à son échelle et avec son idéal. Tout cela est louable. Mais penser à tous les banquiers, tous les petits starts-uppers, nouveau yuppies et autres barbons industriels qui vomissent le politique tout juste en sortant de leur table, qui hurlent sur les décisions de ceux-là même pour qui ils font des pieds et des mains pour s'inviter à leur table ; penser à eux me fait mal. L'incarnation la plus absolue serait sans doute Jacques Attali qui appelle à ne plus écouter les politiques et à les fuir comme la peste, mais qui les invite à ces forums et se met en position d'obtenir rapports et prébendes (c'est un client, ça n'empêche pas de rester lucide...) Aussi, ces nouveaux nihilistes chics et moi on ne se comprend pas. Au début, ils me croient complice parce que le PS est également un objet de colère. Mais chez eux, c'est un punching ball mondain, au fond PS ou UMP, il faut bien critiquer en attendant des avantages corporatistes. Pour moi, c'est la haine de ceux qui déçoivent et trahissent la gauche (l'UMP déçoit la gauche aussi mais elle ne trahit pas grand chose, dans la mesure où elle a rarement promis de réenchanter la sociale...) en laissant pour l'heure en lambeaux la vraie gauche française en attendant qu'un Podemos ou Syriza n'émerge. Nous ne pouvons nous entendre : acquis sans le savoir aux thèses de Zygman sur la modernité liquide, ils évoluent au-delà du politique dans la mesure où ils en contournent les obligations, mais veulent en plus les rogatons monarchistes avec faste et apparat. Personnellement, je garde cette croyance sans doute naïve mais je ne changerai pas à mon âge, que la politique peut changer le monde. Et s'ils ne sont pas d'accord avec ça, alors qu'ils quittent la conversation politique et continue à faire leurs affaires par ailleurs...
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