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20/04/2020

Réapprendre à aimer le doute

Depuis quelques semaines, de plus en plus, nombre de questions posées par des journalistes obtiennent comme réponse : "je ne sais pas". Je trouve ça assez merveilleux et rassurant. Sincèrement. 

Ceux qui savent, avancent, pérorent, ne sont pas en proie au doute face à l'inédit ? Trump, Bolsonaro, Geoffroy Roux de Bézieux. Eux ils savent et chargent avec le courage des généraux envoyant les fantassins en première ligne vers une mort certaine. Ceux qui doutent ? D'abord, la très grande majorité des scientifiques. Il y a sans doute quelques exceptions, mais globalement, la prudence est de mise pour un nombre considérable de paramètres. On en sait beaucoup plus sur les voies de transmissions du virus, les facteurs aggravants, mais pourquoi les hommes meurent-ils plus que les femmes, les enfants sont-ils porteurs sains ? Mystère. Et leur but, humblement, c'est d'essayer de le percer sans assurance d'y arriver et sans aucun calendrier. Quand aura t'on un vaccin ? On ne sait pas. Moi, ça me rassure. Voilà que plus personne ne supporte le doute, tristesse.  

Avant le mythe de l'indépassable supériorité du progrès, on le vivait plutôt bien, "je ne sais qu'une seule chose, c'est que je ne sais rien" disait Socrate ou Michel Onfray (je les confonds mais mon moyen mémotechnique c'est de me dire que l'un des deux a bu la cigüe et l'autre ferait bien de l'imiter) et puis parce que deux trois lascars comme Pasteur avaient fait un beau taff, nous nous mîmes à croire qu'on pouvait maîtriser le vivant. Repousser les épidémies, éradiquer la mort et accessoirement maîtriser la nature, stopper l'eau ou faire pousser des tomates dans le désert. Force est de reconnaître que le genre humain peut être ingénieux, nombre de tour de force ont été réalisé, mais de là à croire qu'on sait tout...  

On s'est beaucoup trop habitués aux fausses vérités définitives, alimentées par tous les moyens de communication et livres jurant de vous aider à trouver la voie de la réussite, le meilleur chemin, la recette magique. Une bouillasse inepte droit sortie de notre amour absolu pour la pensée machine. Demandez n'importe quoi à Google ou Siri et ils vous répondent dans la seconde, même le sens de la vie ils savent. Voilà à quoi on voudrait ressembler ? A des assistants vocaux ? Quel manque d'ambition... 

Le philosophe Georges Canguilhem avait eu cette réflexion prophétique pour nous appeler à envisager les choses sous un jour nouveau: «La raison est régulière comme un comptable ; la vie, anarchique comme un artiste. » Il nous faut suivre cette voie, délaisser l’apparence de la raison et réapprendre à vivre pleinement, avec les risques et les incertitudes inhérentes à l'existence.

 

Commentaires

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"je ne sais qu'une seule chose, c'est que je ne sais rien" disait Socrate ou Michel Onfray (je les confonds mais mon moyen mémotechnique c'est de me dire que l'un des deux a bu la cigüe et l'autre ferait bien de l'imiter)

Je vous trouve bien sévère pour Michel Onfray , le moins mauvais des mauvais philosophes du moment (Luc Ferry battant tous les records ) ; authentique fils du peuple et ardent militant de l'éducation populaire (son cours du soir de Caen )

Quant à Socrate , s'il but la potions mortifère alors qu'il pouvait s'évader , c'est parce qu'il en avait assez de son épouse acariâtre ...

Écrit par : Léo | 21/04/2020

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Il y a doute et doute : celui qu'avouent , rougissant et battant leur coulpe , les experts qui font de la présence à la télé , n'est souvent qu'une façon de se couvrir , d'ouvrir le parapluie ...

Rien à voir avec celui, " méthodique" ( provisoire ) , de Descartes (dans les premières pages du Discours) ni avec le scepticisme positif de Montaigne

Écrit par : Anna Lisa | 21/04/2020

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Jean Rostand et la vérité :

“ La vérité que je révère, c'est la modeste vérité de la science, , la vérité relative, fragmentaire, provisoire, toujours sujette à correction , à repentir, la vérité à notre échelle ; car tout au contraire , je redoute la vérité totale et définitive , la vérité avec un grand V , qui est à la base de tous les sectarismes , de tous les fanatismes et de tous les grands crimes .

Oui, mon grand ennemi , et je dirais même volontiers mon seul ennemi , c'est bien le sectaire et le fanatique" “

Écrit par : Cluny | 21/04/2020

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-"La pire tyrannie, c'est celle des compétents" ( Alain )
Certes , mais celle des incompétents est aussi nocive , parfois plus ....

La plus dangereuse , celle des compétents patentés qui sont en fait incompétents ...

Écrit par : Lesbie | 21/04/2020

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