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21/09/2020

L'insoutenable culpabilité de l'être

Une fois n'est pas coutume, ce week-end, j'ai éprouvé une profonde empathie pour Bruno Le Maire. Alors que le locataire de Bercy venait d'être testé positif Covid, il expliquait à Linkedin qu'il se plaçait à l'isolement pour 8 jours. Jusque là rien que de très logique et de normal. Mais en faisant défiler les commentaires, je lisais nombre de trolls attaquer Le Maire sur le thème "bah voilà, vous ne respectez pas les gestes barrières !".

J'ai trouvé cette attaque ciblée symbolique de l'état d'esprit du pays. Nous sommes rongés par une psychose ambiante face à une maladie invisible et nous en venons à culpabiliser sans cesse à l'idée de l'attraper et encore plus grande à le transmettre... C'est là qui nous épuise, qui fait que "nous en sommes las" pour reprendre l'excellent calembour de Libé. 

Il y a une réponse confortable, très cour de récré, qui est de décréter que "c'est celui qui dit qui y est". Après tout, depuis six mois, la macronie a usé et abusé ad nauseam de la rhétorique paternaliste, condescendante, culpabilisante du "ho, attention le relâchement !". Donc, après avoir culpabilisé tous ceux qui se déplaçaient, risquant de propager le virus, ceux qui disaient bonjour, ceux qui prenaient un verre, dansaient, instillant chaque fois l'idée folle, pleine d'hubris, que le risque zéro existait, retour de bâton. Alors paf, tombons lui dessus. Au contraire, il faut résister à cette tentation primaire, car elle nous enferme dans la spirale où nous nous épions toutes et tous et voyons des coupables partout...

Ce d'autant que ça patine, que les contaminations repartent à la hausse, donc la traque des coupables se fait plus intense. On a trouvé une nouvelle piste pour expliquer les ratés : la thèse du "dépistage de confort" à savoir que si aujourd'hui, la glorieuse stratégie française ne fonctionne pas, c'est à cause de toutes celles et tous ceux qui se font dépister à tort et qui engorgent les malheureux labos... Vous aurez noté, dans la sémantique, un alignement sur les thèses immondes de "l'avortement de confort". Je ne nie pas qu'il puisse y avoir des hypocondriaques exacerbé.es désireux.ses de se faire tester tous les jours et engorgeant les files d'attente. Mais à 5h d'attente en moyenne ajouté au désagrément de se faire gratter le nez, je ne sache pas que la France compte des millions de glandus masochistes... Ca n'est pas sérieux. Là encore il faut résister.

Résister c'est mettre en avant la l'éthique de responsabilité au dessus de celle du soupçon qui domine actuellement. Que chacune et chacun, en conscience, vive. Fasse ses choix. Boive ou mange seul.e ou accompagné.e, sorte ou se claquemure. Mais nous devons cesser d'être les juges des uns et des autres. Comme ces concerts de fusil dans les rues, entonnés contre celles et ceux qui ne portent pas le masque, ne le porte pas bien, ne se lave pas assez les mains, ramasse quelque chose par coeur....

Une deuxième fois n'est pas coutume, j'étais d'accord avec les propos de Macron quand il dit "nous allons devoir vivre avec le virus pendant des mois". Plutôt que d'être dans une course en avant à la déresponsabilisation en cherchant sans cesse des coupables, tâchons de veiller sur nous, sur nos proches sur celles et ceux que nous aimons et souhaitons épargner, par contagion, tout le monde sera préservé.