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10/08/2020

Besoin de vacance

Jamais autant que cette année je n’ai goûté les vacances, au sens étymologique du terme. D’ordinaire, mes congés d’été arrivent après avoir trop travaillé, trop accepté de contraintes, ne pas avoir osé dire non, précisément à cause de la perspective de vacances futures. Pas cette année. Depuis le 15 mars, soit 5 mois maintenant, je n’ai pas bossé la moitié de ce que je bosse habituellement. D’où le fait qu’au bout de huit jours à peine, je ne parvenais déjà plus à siester, mes batteries étant trop pleines pour cela. Le physique n’avait pas besoin de sa révision annuelle. Le mental, en revanche, autre histoire…

 

Aussi loin qu’il m’en souvienne, je ne suis jamais resté si longtemps sans écouter la radio, sans acheter la presse, sans même lire sur mon téléphone et même sans emporter mon téléphone en promenade. Tel un âne qui n’a pas soif, je refuse de tendre l’oreille au murmure du monde. Je vois passer les nouvelles, j’ai vu que le Liban était passé du stade de pays meurtri par une crise sociale gigantesque à encore pire suite à un drame qui agrège tous les problèmes de corruption endémique, de laisser-aller, de déconnexion et d’impéritie des pouvoirs en place. J’ai vu que nous avions perdu Gisèle Halimi et Bernard Stiegler, que Darmanin était toujours au gouvernement et que Trump n’avait pas encore perdu la bataille de novembre. Je lis, aussi que les fragilités physiques de MBappé et Verrati inquiètent lourdement le PSG, qui pourrait voir s’envoler l’occasion rêvée d’être champion d’Europe. Mais dans aucun des cas, je n’ai poussé plus loin. Je n’ai pas réécouté les interventions de Stiegler ou les plaidoiries d’Halimi, délaissé les longues analyses sur les racines de la Crise au Liban, pas plongé dans les oscillations du vote yankee et pas acheté l’Équipe…

 

En ce qui concerne la Covid, c’est bien plus abrupt : je fais le vide. Pas l’autruche, le vide. Je vois passer les alertes et mettrait un masque là où il faut à Paris, mais je ne lis plus les chiffes, les analyses, les mises en garde, les remontrances. Je n’en peux plus. En regardant dans le rétroviseur, j’ai l’impression d’avoir passé des semaines à regarder des courbes et des pics, par régions, par pays. Corrélé avec le genre, l’âge ou le parti des dirigeants pour observer des recoupements et des discordances. Écouté des virologues, des épidémiologistes, des spécialistes de maladies infectieuses, de guerre, d’approvisionnement stratégique, des prospectivistes, des psys de crise et toutes et tous arrivaient à peu près au même résultat de connaissance de ce virus que Platon et son « je ne sais qu’une chose, c’est que je ne sais rien ». Malgré l’évidence depuis des mois que cette saloperie a mille mystères, nous nous esbignons à tout vouloir percer, rappelant ici Cocteau (marre des citations ? Envoi STOP cuistre au 3226) et son « puisque ces mystères nous dépassent, feignons d’en être les organisateurs ». Peut être qu’en septembre, je retomberai dans mes travers de Team Cocteau, mais pour l’heure je fais le vide avec Platon et ça me va très bien. Tout me va chez ce brave homme jusqu’à sa mort tardive au cours d’un repas de noce…