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09/02/2022

Pourquoi faire campagne ?

J'écoute, amusé, les commentaires des autres candidat.es énervé.es que Macron ne soit toujours pas candidat et je me dis que leur impatience trahit le fait qu'ilelles sentent bien que Macron est en train de gagner en ne faisant pas campagne. Tant qu'il n'était pas candidat, Zemmour montait à chaque sondage jusqu'à atteindre un stratosphérique 19%. Ce, parce que toutes ses prises de parole étaient autour de ses thèmes de prédilection. Celles et ceux qui se précipitaient pour l'inviter ne lui parlaient que d'immigration, d'islam, d'insécurité, ses 3 I fétiches. La minute où il a été candidat, il fallait répondre à des questions sur le financement, les salaires, le dérèglement climatique, l'égalité entre femmes et hommes. Il a chuté progressivement et ne remonte pas, depuis.

Macron n'est pas Zemmour, mais la minute où il entrera en campagne, il devra justifier son bilan, son passif dirait Mitterrand. Il a beau répéter qu'il ne fut pas le président des riches, les chiffres sont têtus. Il a beau avoir organisé des kermesses pour rendre la planète et les océans great again, il fut le président de l'inaction climatique et du soutien aux énergies fossiles, aux chasseurs, au glyphosate... Il ne passera pas un bon moment en campagne, il ne veut d'ailleurs pas débattre avec Poutou pour se prendre un équivalent de "l'immunité ouvrière n'existe pas" que le candidat du NPA avait sorti à Fillon. Il n'y a que des coups à prendre sur le fond, et en plus le récit humain sera laid. En 2017, il engrangeait des soutiens chaque semaine. On en pense ce qu'on veut, mais Bayrou, Collomb et tant d'autres, ça racontait la campagne d'une dynamique forte au centre. Mais là ? Toute la société civile, marque de fabrique de la macronie 2017, s'est barrée ou fut virée (Nyssen, Hulot, et d'autres) plus aucune prise de poids, de choix. Il reste le quarterons de fidèles et, soyons honnête, la lie du mouvement. Il ne vendra du rêve à personne en disant qu'il va faire un Rubiks Cube avec Le Maire, Darmanin, Lecornu, Pannier Runacher qui vont s'échanger leurs portefeuilles... Rentrer en campagne, c'est déjà reculer et devoir justifier un lourd passif.

Mais, en attendant ? En attendant, il dit sans le dire "je sais que vous ne m'aimez pas, que vous me trouvez condescendant et autoritaire, mais qui imaginez vous face à Poutine ? C'est ça, président". Et même encravaté, Jadot n'a pas ce genre d'image... En attendant, face aux "convois de la liberté", Macron a beau jeu de rappeler qu'il n'a rien fermé (fors les discothèques...) de tout l'hiver, que les hostos ne furent pas débordés et que peu ou prou, ça a tenu. Bref, tant qu'on ne fait pas campagne, on se dit qu'il n'est pas aussi catastrophique que pourraient l'être les autres et dans une offre disséminée, c'est un atout. Les États-Unis sont tout sauf un modèle de démocratie, mais au moins le président sortant doit faire plusieurs débats en amont et défendre son bilan, les entrevues avec Poutine ou la crise Covid ne leur serve pas de mot d'excuse.... Le premier tour a lieu dans deux mois et Macron en ne faisant pas campagne a pris tellement de champ qu'il est à 99% au second tour. Je ne suis vraiment pas certain qu'il en serait allé ainsi s'il avait dû ferrailler depuis un mois. Après avoir gagné en 2017 précisément en allant parler à tout le monde y compris là où, pensait-on il avait des coups à prendre (les 3h de débat face à Médiapart à 48h du premier tour...), Macron risque bien de sceller sa victoire de l'année sur son mutisme. On ne peut pas dire que ça soit emballant...