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07/03/2012

Rétrécissement du domaine de la lutte

droopy.gifIls ne se rendent pas compte. Si les audiences pour les programmes politiques sont en berne et qu'une grosse majorité de français s'estiment lassés par la campagne, c'est que jamais la politique n'y a pris aussi peu de place. En cela, on voit les limites de ce qu'on qualifie souvent sans jamais trop la définir de "pensée unique". Cette pensée magique, mainstream, cette impasse libérale très bien démontée d'Orwell à Michéa ou Lasch, qui rend compatible des progressistes et des libéraux, socialistes et droite plus ou moins classique.

Sauf que. Oui, sauf qu'à ne plus parler que des micros-points hors de ce carré magique, on ne fait plus de politique. De quoi a t'on parlé depuis ce début de campagne : de viande hallal... Non, mais comment peut-on songer que l'on parle sérieusement en une d'un sujet aussi dérisoire ? Ajoutez à cela le "je l'emmerde" d'Eva Joly, les piques et banderilles que le PS et l'UMP s'échangent joyeusement sur les réactions à l'enfarinage de l'un et l'embayonnage de l'autre. Nappez la tarte indigeste de questions à Bayrou sur "avec qui gouvernerez vous si vous êtes élu ?" (je ne suis pas MODEM mais il y a des limites à l'indécence journalistique) et vous voyez bien que les "commentateurs" politiques méritent bien leur nom. Ils commentent un match, au lieu de parler du jeu, on va interroger les pronostics, savoir si un tel à bien dormi ou s'est fait massé... Pathétique.

Donc, cette campagne lasse et la résignation progresse comme rarement. Enquête après étude, les français restent les champions de la déprime. Hollande va très vraisemblablement gagner et tant mieux pour lui. Cela dit, ça ne changera rien au fond, il ne propose aucun réenchantement. Gare à lui s'il le tentait, les foudres lui tomberaient dessus "pas possible", "on ne peut pas", "pas réaliste". Regardez le commentaire, il se focalise sur le "réalisme" et "la vérité" des propositions mais dans un cadre si petit, si étriqué, si désespérant que tout le monde s'en fout.

Hollande, tout socialiste qu'il soit, croît à la trinité AAA, CAC 40, PIB. Il croit qu'il faut maîtriser les flux migratoires, surveiller les dépenses de santé, indexer le taux de l'assurance vie sur les montants compensatoires de la stagnation et de la déflation de l'évolution de l'indexation de la dette... Elle est ou la politique ? La vision de société ? Ou, dans son projet, parle t'il de santé, d'éducation ? D'emploi digne pour tous ? Non, il parle de rationalisation de pôle de santé, d'adapter les ZEP à une régulation de flux et de donner quelques emplois d'avenir, triste oxymore pour des CDD... Nos camarades devraient prendre garde car il n'y a guère que dans leurs côteries, leurs salons et leurs rédactions que l'on est convaincu de ce TINA (there is no alternative). En vérité, à part son gadget de 75% (qui ne touche pas la rente, vraie problème) Hollande reste marqué comme les autres par l'idée prononcée par son mentor Jospin, "le politique ne peut pas tout", euphémisme pour dire qu'il fait de moins en moins. En réalité, bien évidemment que le politique peut tout sans limite autre qu'humaine. En 1789 la situation était plus complexe qu'aujourd'hui à renverser, ils le firent, en 1917 aussi, Chavez ne s'est pas gêné... Est-ce souhaitable dans la France d'aujourd'hui ? Probablement pas. 

Mais il faut bien voir qu'à laisser faire ce rétrécissement du domaine de la lutte mentale, à réduire autant l'univers des possibles, on voit par réaction monter une extension du domaine de la révolte. Une envie de foutre tout cela à plat. N'importe qui ayant un peu potassé deux bouquins d'histoire (pas Furet ou Rémond, des bouquins d'histoire) sait que cela finit rarement dans une convivialité riante. Redonner de l'air, élargir à nouveau le champ des possibles doit passer par les urnes. C'est bien pour ça que 141 ans jour pour jour après la Commune de Paris (quand je pense que Delanöé a été élu le 18 mars 2011 et qu'il n'a pas dit un mot de la Commune, social-trâitre versaillais...) j'irais à la Bastille voir Jean-Luc Mélenchon redonner ses lettres de noblesse à la politique. Merci camarade pour ce que tu fais dans cette campagne. Outre que tu as démoli le FN quand tous ses sont cachés derrière des invectives de cour d'école en allant la chercher sur son projet, tu as ravivé l'intérêt pour le projet, ce fameux "fond" souillé comme rarement ces derniers temps. On en recausera le 22 avril, mais c'est déjà inestimable.

Commentaires

Le politique ne peut pas tout. Peut-être, peut-être pas. Je reste convaincue qu'il peut beaucoup s'il est «poussé aux fesses» par un mouvement collectif. Il faudrait ne pas le laisser aux mains des seuls politiques…

Écrit par : Yola | 11/03/2012

Disons qu'il faut un vaste collectif englobant le politique et une masse suffisante pour orienter tous les politiques dans le bon sens...

Écrit par : Castor | 11/03/2012

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