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27/09/2012

Le complexe de Copé

oedipe-se-creuvant-les-yeux.jpgLe mano a mano qui va donc opposer Copé et Fillon à droite s'annonce effrayant. De l'avis de tous les commentateurs, nous assisterons à un "duel de personnalités", mais les différences sur le fond seraient ténues. A ce rythme, la messe est dit : Copé est mort. Fillon compte sur son CV de premier ministre pendant 5 ans pour l'emporter sur un simple député-maire d'une ville de banlieue qui fut vaguement ministre du budget. Drapé dans sa suffisance, Fillon ne veut pas de castagne : il n'y aura pas de débat télé, pas de pugilat interne. L'excuse invoquée, ne pas déchirer la famille UMP pour préserver la nécessaire unité, préalable à toute reconquête.

Invité sur de nombreux plateaux, Fillon distille avec soin ses phillippiques sur Hollande au sujet de la TVA, de la compétitivité, de l'emploi ou de l'Europe. Chaque fois, il y associe l'aigle de Meaux comme pour mieux l'asphyxier et résumer leur affrontement à un concours de beauté. Habile. Mais Copé sait que l'image c'est plus que cela, c'est du storytelling où l'on peut savamment instiller des valeurs ou des impressions. Copé passe pour un dur, il doit le maintenir. Bébé Chirac, baptisé "Chichihuahua" dans un portrait de Libé il y a une dizaine d'années où l'on apprenait que ses dents "rayent le parquet de l'étage du dessous" Copé a dû son ascension au sein de l'UMP à la méthode Sarkozy: médiatiquement briser des tabous. 

Là, dans son nouveau libre, il est donc décomplexé et veut parler du "racisme anti-blanc". Il écrit ceci : "Ces phénomènes sont impossibles à voir depuis Paris, dans les sphères médiatiques et politiques où la grande majorité des dirigeants sont des Français blancs de peau, nés de parents français. Dans ces microcosmes, le manque de diversité limite la présence de personnes de couleur ou d'origine étrangère", écrit le député-maire de Meaux (Seine-et-Marne). Et d'ajouter : "Mais regardons la vérité en face : la situation est inversée dans beaucoup de quartiers de nos banlieues.". 

Là, je me dis, bien joué Jef. T'es pas tout seul, à penser comme ça... Tu vas y arriver mon gars. Tant pis si ce faisant tu as ouvert les vannes en grand du déconomètre et que les fans de Morano et autres dans ton camp vont parler avec cette élégance ouatée qui a caractérisé le beau débat sur l'identité nationale... Comme Sarkozy en son temps, Copé va mettre Fillon et même la gauche mal à l'aise. Dire que les propos de Copé sont faux, c'est choisir le camp de l'élite, des bobos et des BHL en Berlutti. Attaquer Copé là dessus, c'est renforcer tous les blancs des quartiers sensibles dans l'idée que personne ne s'intéresse à eux, qu'en France impossible de taper sur des arabes, des pédés ou des juifs, mais des bons gros gaulois pas de souci... Copé le sait en jubile. On peut déplorer qu'il ne complexe pas plus.

L'expression du racisme anti blanc, à part chez Jean-Marie le Pen, est ressorti en France au moment des manifs anti-CPE de Villepin, lorsque l'ineffable Alain Finkielkraut s'était écrié que les jeunes bourgeois manifestants dépouillés de leurs téléphones portables et de leurs Ipod par d'autres jeunes moins favorisés (ou plus cons...) l'avaient été au nom du "racisme anti-blanc". Une lourde erreur d'appréciation tant les scènes ressemblaient à s'y méprendre à des Jacqueries, des émeutes très spontanées pour "casser du riche". Et ce qui se passe dans certains quartiers, ce que stigmatise Copé peut évidemment s'y apparenter, en dépit d'une réalité factuelle très différente. Il y a évidemment des blancs très pauvres, mais on les voit pas ou ne les montre pas. On laisse se propager des clichés sur les richesses et pauvreté, pacifisme et violence des uns et des autres. Tout cela finit par un enlèvement d'Ilan Halimi, ce smicard vendant des téléphones portables, torturés à mort car supputé millionnaire puisque "juif". Cher Jean-François, ouvrir les vannes de ce genre de légendes urbaines entraîne ce type de fléau. Que n'es tu plus complexé, parfois...

Dans une actualité sombre où l'on tend à opposer les uns aux autres, je ne suis pas malheureux de partir à Lille avec mon compère en déconstruction de clichés, je suis sûr qu'on nous fera bon accueil...

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