07/05/2013
Je ne veux pas ta photo
Quand je faisais mes études, les profs les plus feignants nous donnaient invariablement des images publicitaires à commenter. Un exercice stimulant au début, qui nous aidait à polir notre esprit critique, puis vaguement lassant, à force. Les pubs reflétaient souvent les hypocrisies de l'époque et puis, les pubards faisaient gaffe donc les affiches devenaient mois amusantes à disséquer.
Je me rabattais bien vite sur les spots et de toutes façons, décidais que je ne passerai pas ma vie à me battre 70 heures par semaine pour convaincre mon client qu'une révolution de la consommation de viande serait en marche une fois qu'il aurait adopté mon idée révolutionnaire "Bravo le veau". Ou la semaine d'après que je libérerais les femmes qui mettent des tampons avec applicateur avec ce slogan de génie "Vous ne tenez pas en place, nous oui !" (authentique, la marque consommateur Monoprix, jamais avare de calembours finauds)... Bref, je devenais peu à peu hermétique à ce petit exercice et indifférent aux créations de l'époque.
Et puis hier dans le métro je suis tombé sur cette nouvelle affiche des Galeries Lafayette. Je passe sur la platitude du slogan (dire Baseline dans les salons sous peine de passer pour un con, pire un provincial -d'ailleurs on ne dit plus la province, mais "les territoires" et ça c'est le progrès. Enfin, il paraît) "L'été vit plus fort". J'imagine sans mal les poings serrés et la lippe avide du directeur créa qui a regardé son client des galeries farfouillettes en lui disant "l'été vit PLUS FORT". Ha, bon très bien très bien...
Mais ici, la pictosphère explose la graphosphère. Ce qui compte c'est cette naïade parfaitement épilée et avec ce qu'il faut de litre de monoï pour bien cramer. Ni black ni beur, ni trop blanche. La perfection faite femme de la diversité sans choquer l'électeur gentiment raciste. Gloire à toi Pocahontas. De quoi s'agit-il ? De vendre un nouvel espace "bain de soleil". Là, l'idiot ou le plouc se dit qu'après Paris-Plage, il y a Galeries Plages. Mais non, triple buse c'est juste un nom plus vendeur pour dire "rayon maillot de bain" une appellation d'une ringardise choquante. Mais revenons à la fille qui garde précieusement le haut de son maillot de bain qui est défait pour suggérer un côté gentiment sulfureux (et en même temps un peu conne car sur le dos, comme ça, il ne risque pas de glisser)... La question est : que fait le bas de son maillot de bain délicatement posé au bout de son pied ? Pourquoi cette réclame pour l'espace maillot de bain fait-il incidemment la réclame des plages naturistes ? Ou des plages pour escorts (on ne dit plus "pute", c'est vulgaire) ? N'aurait-on pas pu se contenter, pour cet espace de vente de maillot de bains, de montre Jojo & JojoE à la plage, tous les deux ? Un homme et une femme puisqu'à priori les représentants des deux sexes achètent souvent des maillots ? Et genre pas à poil ? Pas monoïé à mort ? Un peu comme nous à la plage ou à la piscine, en somme. Et si, amis pubards, la vraie disruption, pour parler comme vous, ce serait de montrer la normalité ?
08:43 | Lien permanent | Commentaires (0)
Les commentaires sont fermés.