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06/05/2013

Hannah Arendt

arendt1.jpgDans ce genre de films, les regards sont souvent braqués sur l'acteur principal avec une question lancinante : Oscar ou pas (ou César). Daniel Day Lewis dans Lincoln, Oscar, Marion Cotillard dans la Môme, rigolade. Dans les deux cas, deux purges, mais l'histoire oublie ça. Ces dernières années, le nombre de projets bio picisant à explosé : le Che pour que Benicio del Toro sorte ses muscles, Ali pour que Will Smith prouve qu'il n'est pas qu'un bouffon. Chez nous, des films avec nos politiques ou des chanteurs morts. Ha ! Jérémie Reinier en Cloclo... Sinon, la télé s'y met aussi pour notre plus grande rigolade : souvenons nous l'hilarante prestation de Laurent Deutsch en Sartre et Anna Mouglalis en  Beauvoir. Certes, rigolade involontaire, mais quelle nullité.

Si l'on résume le dilemme à la question initialement évoquée, c'est râpé. Barbara Sukowa fait le job, mais elle ne nous transporte pas. Pire, vers la fin du film elle tente de surjouer un peu la colère et le subterfuge laisse perplexe. Passons. Si en revanche, on cherche d'autres choses, alors le film est une franche réussite. Dans ce qu'il montre de ce procès hors norme, bien sûr. L'intelligence consistant à glisser de nombreuses images d'archives plutôt que de singer Eichman souligne la volonté de ne pas aller trop loin dans le spectacle et de respecter l'histoire. Les passes d'armes autour des articles de Arendt rendent bien l'atmosphère. Le découpage du film est intelligent, l'image un trop académique avec trop de gros plans léchés (le mégot d'Hannah est le vrai meilleur second rôle). Bien, mais ce qui rend ce film particulièrement intéressant se trouve au-delà. Dans ce qu'il dit de la réflexion critique et autonome et d'un certain rapport au temps.

Jamais Arendt ne se répand auprès d'autres journalistes venus couvrir le procès Eichmann. Elle cogite, seule, imperturbable. Allongée sur sa méridienne ou perchée sur des terrasses, elle avance sa pelote de réflexion, imperturbable au ronron du monde. Quand tous débitent leurs premiers compte rendu, elle reste hermétique et ne se laisse pas contaminer par le reste. Fort. Nous n'avons plus Eichmann mais l'époque récente nous a offert les procès de Sadam Hussein ou de Douch et là, les compte rendus arrivaient quasiment en direct; demain, les audiences des procès de terroristes feront l'objet de live tweets.... Par ailleurs, quand Arendt rend son travail au New Yorker, elle refuse de transiger. Sur les délais, sur la taille du texte rendu et sur la possibilité de montrer des bouts avant. "Je ne délivre pas au compte goutte, Mr Shwaun". Cette quête d'une réflexion absolue, imperturbable par la marche du monde fut pour moi la plus grosse claque du film, songeant aux philosophes cathodiques actuels accrochés à la remorque de la caravane du spectacle... M'en vais fouiller les rayonnages des libraires pour retrouver des penseurs hors champ. En évitant soigneusement les livres faisant le bilan anniversaire d'Hollande.

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