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29/08/2013

Absolutely Fabernique

faber-tristan-garcia-9782070141531.gifC'est un livre attendu de la rentrée littéraire, dont les premières critiques laissent transpirer une certaine gêne. Les éloges embaument l'admiration pour la personnalité de l'auteur et les philippiques se font rares pour les mêmes raisons.

Tristan Garcia est un surdoué touche à tout. Normalien, docteur en philosophie, il écrit de la fiction, se passionne pour les zombies et les BD, les séries télés ; le tout sans négliger Proust et Faulkner, qu'il lit avec du Wu Tang Clan ou du Snoop Dog en fond. Erudition mâtinée de cool culture. Il a écrit un roman dont un singe est un héros. Porté aux nues par la critique, il a un autre avantage pour les journalistes littéraires : il parle admirablement bien de son oeuvre. Brillant, spirituel et drôle, que demande le peuple ?

J'avais personnellement beaucoup aimé son premier roman, La meilleure part des hommes, roman à 3 voix sur les années SIDA. Je m'étais jeté puis avais jeté le livre dont le singe est un héros. J'y voyais une métaphore de l'auteur, singe savant qui fait des pirouettes pour qu'on lui donne des cacahuètes. Pas bégueule, j'ai acheté le nouvel opus, convaincu de ce que j'en entendais. Et j'ai été emballé... 60 pages.

60 pages pendant lesquels il porte son lecteur vers de folles espérances qui vivent très fort sous son crâne : celle d'un personnage énigmatique, Faber, entouré d'un halo de mystère. Apparemment, il fut un soleil noir dans une vie antérieure, un révolutionnaire, un surdoué des arts et lettres, de la politique et de la castagne. Soyons juste : Garcia vit avec ses personnages. Féru des Etats-Unis et de leur classes de créatives writing, Garcia a bâti une oeuvre très scénarisée, très découpée avec flash backs récurrents, voix alternées et cliff hangers fréquents pour faire monter la tension. Bravo à lui.

Double hélas. Primo, Garcia a trop fréquenté son personnage et s'est persuadé qu'il tenait une bête. Mais le fait de faire revivre sans ellipses le CP,CE1,CE2,CM1.... Jusqu'à la première accumulant les anecdotes sur l'inexorable progression du jeune Torquemada. Ca lasse plus que ça épate. Ca ne prend pas et l'écart grandit entre la fièvre de Garcia et la platitude gelée des faits : il fume des joints et martyrise ses profs. Bon. In fine, il y a un meurtre et une grève dans un lycée. Pas de quoi justifier l'armagedon qu'il est censé avoir déclenché dans sa ville natale.

Second hélas, Garcia ne fait qu'écrire. Ni mal, ni bien. Il écrit. Au kilomètre. Normalien, il connaît le sens des mots et a la délicatesse d'éviter les clichés (encore qu'Eric-Emmanuel Schmit soit normalien, donc l'argument ne vaut pas) et lourdeurs. Mais sa phrase ne dégage rien, elle est vide. Et c'est long, 463 pages de vide. Surtout les 400 dernières.

Quand sortira le prochain Garcia, comme pour un melon, je le humerai longuement avant de le prendre ou non. Pour voir si l'émotion qui fait défaut à celui-ci a éclos comme par enchantement. En attendant je m'en vais lire le nouveau Thomas Reverdy, pour lequel un comparse au goût sûr m'a affirmé que c'était fort bon.

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