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07/09/2013

Ne pas savoir dire merci peut coûter cher

mxe3j0z4.gifDans un ouvrage que j'ai co-écrit avec mon amie Perrine Daubas, se lancer dans la collecte de fonds, nous avons intitulé un chapitre : "Savoir dire merci, un art capital". M'est avis que nous devrions en envoyer quelques exemplaires à Bernard Cazeneuve, Pierre Moscovici, ou François Hollande...

Nous y narrons une anecdote célèbre dans le petit milieu des fundraisers : Frédéric Jousset, fondateur de Webhelp avait réussi un LBO et empoché un joli pactole. Sortant d'un restaurant étoilé, il sent une mauvaise conscience l'envahir en regardant la foule devant le camion des Restos du coeur. Il appelle les Restos le lendemain et demande quel est le don moyen. Apprenant que c'est 30 euros et s'estimant 1000 fois plus riche que le français moyen, il envoi un chèque de 30 000 euros. Les jours passent, son chèque est débité et il ne reçoit aucune nouvelle. Au bout de six mois, un reçu fiscal arrive par la poste lui permettant de défiscaliser son don à hauteur de 66%. Aucune autre forme de procès, pas de coup de fil du président des restos, pas d'invitation à aller servir une soupe. Pire, aucune explication de ce qu'on allait faire de cette manne importante. Alors Jousset s'est senti écoeuré. Devenu entre temps immensément riche, il donne des millions au Musée du Louvre. A chaque nouvelle exposition, on l'appelle, on lui demande un avis (sans pour autant donner de pouvoir) on le convie à dîner, on lui présente des gens qui partagent son goût pour les arts. Et les Restos du coeur vivent sans ces dons...

Le parallèle avec l'Etat ne vaut pas entièrement. Les citoyens n'ont pas le choix que de payer leurs impôts. Ceux qui peuvent échapper à l'impôt ou quasi grâce à une nuée de conseillers fiscaux sont les mêmes que ceux qui peuvent choisir de quitter la France pour des raisons fiscales (d'autres partent pour d'autres raisons). Mais ceux qui restent n'ont pas le choix. Ils ont exprimé un "ras-le-bol fiscal" paraît-il. Et je les comprends, même si je considère que l'impôt est l'instrument premier de l'égalité entre les citoyens avec l'héritage (qu'il faut augmenter largement pour vraiment redistribuer sous peine d'aller pleinement vers la société de rentiers dépeinte par Piketty). Personnellement, j'ai payé bien plus d'impôts cette année que les précédentes. C'est en partie pure justice car j'ai gagné bien plus que les années précédentes. Mais en partie seulement, car de fortes hausses de dernière minute se sont greffées sur mon troisième tiers. Consultant autour de moi, nous sommes légions de fortunés (si on paye des impôts c'est déjà que la situation n'est pas si précaire) à avoir vu cette hausse. Sans explication, logique ou cap de réformes politiques justifiant cette hausse soudaine. 24% des recettes supplémentaires de l'Etat proviennent de l'impôt sur le revenu et 18% des taxes sur les entreprises d'après une infographie trouvée dans le Monde hier. Pour quel résultat ? Quelques nouveaux profs. C'est tout. Aucune augmentation des salaires de fonction publique qui continuent leur inexorable déclassement, aucune embauche pourtant nécessaire dans la justice, des policiers ou des soignants... Le maintien de techniques aveugles, onéreuses et inefficaces comme ces milliers d'emplois aidés qui n'ont d'emploi que le nom et n'aident en rien. Allez chercher un boulot pérenne après avoir été pousseur sur les quais de la RATP pendant 3 ans, agent d'ambiance péri-urbain ou exhausteur de sociabilité... Difficile de dire que ces rustines pour tous justifient les saignements de chacun...

Dans le même temps, cette même première année de mandature de ceux qui pérorent qu'ils incarnent le changement, le patrimoine des 500 premières fortunes de France a augmenté de 25%. Ceux-là auront sans doute dit merci à Caguzac et Moscovici... Pour les millions de cocus de la réforme fiscale, beaucoup de résignation et, je le crains, son corollaire électoral pour certains. A Marseille comme ailleurs, le Front National se frotte les mains. Ne pas savoir dire merci peut vraiment coûter cher...

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