18/12/2013
Edouard aux mains de boue
Il faut imaginer Edouard heureux. Il a échappé aux sombres desseins que la pythie avait pour lui. Finalement, son destin n'est plus de lutter encore et toujours contre les forces du Grand Capital. Voilà, il s'est faufilé hors de l'usine, il a trouvé le chemin de Bruxelles et il est sauvé. Ouf. Les milliers de copains d'usine d'Edouard se sont réveillés les yeux embués, voyant que leur copain les avait abandonné. A la sortie de l'usine, un candidat FN distribuait des mouchoirs et le verre de l'amitié... Mais ça c'est une autre histoire qui s'écrira, à coup sûr, dans 6 mois.
Comment peut-on lire ce revirement sans vomir ? On peut y voir une certaine cohérence: le PS demande l'abolition de la prostitution pour cause de pratique inhumaine et offre donc à Edouard Martin un job de pute de luxe. Voilà pour l'outrance. Plus prosaïquement, je me demande ce qui m'horripile le plus dans cette histoire. Qu'Edouard Martin ait craqué après quelques années de lutte et ait goûté les petits fours et les petites phrases à force de passer sur les plateaux télé ? Assurément. Mais je crois avoir encore plus de rancoeur pour ceux à l'amoralité assez forte (Hollande, Ayrault ? Un autre) pour avoir eu le toupet de lui proposer la tête de liste. Si le long naufrage de Florange n'est pas uniquement le fait de François Hollande, il faut tout de même que ce dernier accepte ses responsabilités quand il en a fait la grande promesse ouvrière de sa campagne. Florange, c'est le symbole du cynisme, du renoncement éternel du PS à changer le monde et maintenant, en récupérant Edouard Martin ils ajoutent l'insulte à la blessure comme on dit dans la langue de l'économie cannibale... Le PS ne se rend même plus compte de ce qu'il fait tous les jours, qu'il avance comme un gros Moloch répugnant qui lamine toutes les promesses faites en 2012 : verdir l'économie, lutter contre la finance, réenchanter le monde du travail. Et c'est business as usual. De la technocratie, de la superstructure partout et une politique fiscale de gribouille. Ils nous évitaient un seul affront de l'époque Sarkozy : la politique par casting. Un reste d'élégance. Fini... D'un autre côté, la CFDT affiche plus de constance. Ils ne promettent jamais rien : sociaux-traîtres hier, aujourd'hui et sans doute demain. On dit que Merckx est le plus gros porteur de maillots jaunes de l'histoire, mais comparé aux leaders CFDT, c'est un poussin...
Dans La société de défiance, comment le modèle Français s'autodétruit, le trio Algan/Cahuc/Zylberberberg montre que les français sont les plus réticents à croire leurs dirigeants. Cette nomination contribue à alourdir le fardeau. Mais le PS s'en fout, lui qui ne va pas sombrer aux municipales grâce à l'étiage incroyable du FN, lui qui n'aime pas l'Europe et s'en fout des européennes. Les régionales sont plus ennuyeuses puisqu'avec 21 régions sur 22 détenues par la gauche, les élections de 2015 s'annoncent façon "chronique d'une mort annoncée". Leur problème...
Reste pour les communicants à tenter de sauver la face en rédigeant à la hâte un récit de ce cocufiage en règle. Le pire, c'est que le PS pourrait en partie réussir son OPA mentale. Ils veulent envoyer à Bruxelles quelqu'un qui a le sens du combat syndical, qui propose une autre voie... C'est vraiment du social washing grossier, mais ça passe. Par rapport à une UMP qui vire un sortant compétent, travailleur et polyglotte (Arnaud Danjean) pour mettre une inculte, à peine monoglotte et feignasse (Morano) doublée d'une europhobe patentée... Dans le duel UMP / PS, le PS n'est donc même pas perdant et c'est tout ce qui les intéresse. Le 3ème larron de l'élection dans cette région, Florian Philippot, voit le boulevard électoral dont il disposait déjà, s'élargir jusqu'à l'indécence.
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