22/05/2014
Lost in Responsibility
J'ai une amie chère à la Société Générale, arrivée après Kerviel. J'ai un ami cher qui a longtemps frayé chez Bygmalion. Dans les deux cas, cela alimente les discussions narquoises lors de mes dîners en ville... J'imagine même que l'adjectif choisi pour parler de ses amis peut faire sourire. Cher, démesurément cher même. Pourquoi se priver puisqu'il s'agit de boîtes où l'on peut tout pigeonner et se servir ? Je dois être aussi con, n'ayant jamais empoché 1 euro de leur part. Ils doivent être encore plus bête que moi, n'ayant pas profité des prébendes de leurs entreprises respectives, malgré de beaux postes...
Si je mets les deux sur le même plan c'est que dimanche dernier a été rythmé par les frasques du marcheur Kerviel et les folies facturières de Bygmalion. Dans les deux cas, cela concerne des individus isolés, un peu fous, mais au final, le déficit d'image concerne 150 000 personnes dans un cas, et une caste (les communicants, les politiques) de l'autre... Et ça commence à gonfler. Je ne sais plus la formulation exacte, mais Ricoeur écrivait grosse mode que l'irresponsabilité est anonyme quand la responsabilité s'incarne dans quelqu'un. Or, aujourd'hui, nous vivons une crise sans précédent de la responsabilité. Lorsque nous dénonçons sans fin des "systèmes" et autres "mécaniques" déraillantes, leur point commun tient justement à leur inhumanité à part quelques accidents. Madoff et Kerviel vont dormir en prison, mais quid des autres responsables, irresponsables plutôt qui ont laissé une finance aveugle, machinisée, sans borne ni éthique, spéculer sur les matières premières ? Ceux là ne sont pas en prison. Ni même au chômage, ils se sont recasés gentiment. Mieux, nombre d'entre eux viennent donner de doctes leçons sur les meilleurs moyens d'encadrer la finance sur les plateaux de télé... Idem pour l'écologie : des conférences et des sommets, mais quand on voit le sixième continent (formé par un agglomérat de déchets entre le Pacifique et l'Indien) impossible de boucler quelqu'un. Pire, le patron de BP ou de TEPCO ont sauté suite aux catastrophes du Golfe du Mexique et de Fukushima, mais guère plus. Le Rana Plaza où 1500 travailleurs ont perdu la vie pour avoir voulu fabriquer des fringues low cost, idem. Personne ne s'occupait de cet immeuble. Mais quelqu'un devait bien empocher la marge nette...
Mêmes les plus libéraux, même les fans de Rawls s'accordent sur l'importance de l'égalité devant la loi pour que la société fonctionne. Seule des sanctions pénales fortes permettront de faire avancer les causes sociales et écologiques seules la condamnation exemplaires des vraies personnalités coupables permettra de remédier au "tous pourris". Dimanche, ce sera la kermesse de l'irresponsabilité dans les urnes, le grand défouloir. Espérons que cela amène au moins un sursaut pour la suite...
08:18 | Lien permanent | Commentaires (0)
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