Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

15/08/2016

Gagner la guerre en déplaçant le champ de bataille

Tombe.jpgLe débat proprement délirant qui entoure la décision municipale - tout autant délirante - d'interdire les burkinis sur les plages de Cannes le prouve : le combat culturel ne peut être gagné sur les questions identitaires. Nous sommes français et ces questions de visibilité de la religion vont nous rendre dingues. Peu importe que toute la presse anglo saxonne se moque de nous, peu importe de la stupidité sans nom consistant à lier lutte contre le terrorisme et les femmes qui choisissent de se baigner avec une tenue de plongeur... Ce débat nous rend dingue depuis l'affaire de Creil en 1989 et nous avons peu avancé en 27 ans...

Les guerres se mènent avec des codes, des règles et des conventions. Toutes choses rationnelles qui ont depuis longtemps déserté la querelle en question. Et la pente actuelle suit un éloignement de la sacro-sainte raison au profit d'une mauvaise foi démentielle. L'axe Zemmour/Bouvet s'enferre dans une logique stupide où le burkini incarne le sas d'entrée vers l'EI. Navrant... Problème, le héraut de l'opposition à ces Jocrisses, Edwy Plenel, brandit les mêmes armes et fait de ces femmes les héritières des suffragettes. Cher Edwy, la liberté ça n'est pas nécessairement de se foutre à poil, mais bien de faire comme l'on veut. Les femmes que tu exhibes n'avaient pas le choix : s'exhiber en bikinis leur aurait valu les foudres de la bonne société. Qui peut s'en réjouir ? Idem pour aujourd'hui, n'idéalisons pas les femmes en burkinis par défense pavlovienne. Si elles veulent être pudiques, fort bien, mais n'en faisons jamais autre chose que des victimes de textes qui installent et consacrent l'inégalité entre hommes et femmes. En effet, les mêmes qui t'expliquent que les femmes doivent porter une tenue de scaphandrier par 40° peuvent eux se pavaner en quasi tenue d'Adam (pardon, c'est biblique) ce qui est plus indiqué lorsque la température est caniculaire.

J'en ai vu, en Turquie, des femmes en burkinis. Elles marchaient respectueusement quelques mètres derrière leurs maîtres, pardon leurs maris et mangeaient ce que monsieur avait commandé pour elles au restaurant. Pas très républicano compatible, mais, hélas, tant que c'est entre adultes consentants, il est délicat de s'opposer plus que de raisons. Dans un pays qui croit encore à la toute puissance du politique, il nous est délicat de délaisser certaines décisions à l'individualisme, mais il le faudra bien faute de quoi nous emprunterons une route dangereuse. Au nom de l'égalité femmes/hommes, on ne peut plus longtemps tolérer les parties fines et autres sauteries échangistes où de multiples partenaires échangent des fluides. Veut-on aller là et se demander si les Chandelles sont compatibles avec la République ?

Voilà où nous mènera immanquablement un affrontement frontal avec les tenants d'une laïcité anti musulmane folle. Comme aux Etats-Unis, leur rhétorique empreinte de racisme larvé sait muer et prendre des contours pudibonds pour devenir socialement plus acceptables. Le piège est béant devant nous. Contournons-le et revenons à la question sociale, bordel.

La présidentielle 2017 s'annonce comme une nouvelle saison de 2012 : même acteurs, même timing avec quelques bons et mauvais inversés. En 2012, de quoi a t'on parlé alors que les menaces sociales et écologiques étaient colossales ? De viande hallal, des menus des cantines et le dernier mois de la guerre civile qui résulterait de Mohamed Merah. Sans minimiser ces questions, nous valons mieux que ça. A nous de changer le scénario de 2017 et ne pas faire l'immense plaisir à Marine le Pen de restreindre le débat à des questions vestimentaires, religieuses, et sécuritaires. L'absence de voile ne constitue pas un horizon pour unifier 68 millions de personnes ; la réinvention de l'égalité, si.