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25/03/2017

N'euphémisons pas le pire : Le Pen aurait plus de pouvoir que Trump

10542755-couronne-en-or-representant-la-royaute-et-de-la-richesse-comme-un-symbole-du-prix-de-la-noblesse-et.jpgDans une actualité où les mauvaises nouvelles semblent voler en escadrille, ne boudons pas notre plaisir : les revers récents subis par Trump ont de quoi susciter un beau sourire. Après son décret sur l'immigration, c'est sa tentative de torpiller l'Obamacare qui a été désavoué par son propre camp. Il y avait quelque chose de joyeusement pathétique à voir Trump lancer un appel aux démocrates...

Deux revers réels qui en annoncent sans doute d'autres et surtout, qui annoncent probablement la début d'un peu de tempérance de la part du président qui commence à comprendre que les outrances de campagne ne fonctionnent plus dans le bureau ovale. Cette tendance va permettre à la planète de respirer : appliquée aux relations internationales, à la dissuasion nucléaire ou encore aux relations avec le voisin mexicain, une normalisation est à espérer. Le poids des contre pouvoirs américains devrait ramener Trump à la raison dans ses relations avec la Chine, éviter ce non sens de mur avec le Mexique et ainsi de suite... Il ne sera jamais un parangon de justice, mais pas forcément le nouveau Mussolini que l'on craignait le 9 novembre. 

Pour la planète, donc, un soupir. Pour la France, une bouffée d'angoisse. Car l'équation vote d'extrême-droite = catastrophe est soudain floutée. Le parallèle avec les années 30, le spectre d'un renouveau fasciste et nazi, les cris d'orfraies, vont s'atténuer. Le Klux Klux Klan a pu se réjouir de l'élection de Trump, mais il ne parade pas encore dans les rues américaines... De quoi désarmer ceux qui voudraient alarmer sur les conséquences d'une élection FN en disant qu'au fond "ça n'est pas si grave". Et cette euphémisation, cette minimisation du danger est une terrible nouvelle car elle repose sur une ineptie institutionnelle : Marine le Pen aurait bien plus de pouvoir que Trump, toutes proportions gardées, évidemment, et en cas d'élection, ne doutons pas qu'elle imposerait toutes ces mesures programmatiques épouvantables, préférence nationale en tête. 

L'article 16 de la Constitution, utilisé une seule fois depuis 1958 a ainsi permis au Général d'utiliser les pleins pouvoirs pour s'asseoir sur les prérogatives et oppositions du parlement, appliqué à Marine le Pen, la rédaction très vague de l'article : "Lorsque les institutions de la République, l'indépendance de la Nation, l'intégrité de son territoire ou l'exécution de ses engagements internationaux sont menacés d'une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exigées par ces circonstances, après consultation officielle du Premier ministre, des Présidents des Assemblées ainsi que du Conseil constitutionnel". Avec ça, n'importe quelle menace d'attentat justifiable par l'état d'urgence prolongé sine die, ou des manifestations anti Le Pen émaillée de violences (déjà prévisibles) suffiraient à la présidente pour réussir ce qui, pour une fois, mériterait l'appellation contrôlée de "coup d'état institutionnel".

Dès lors, elle aurait les mains libres pour mener sa politique profondément raciste et je doute, au regard des dernières études d'opinion que les forces de polices se rebellent contre ce nouveau pouvoir, au contraire. Idem pour l'armée. Dès lors, là où Trump doit composer avec des puissances judiciaires fortes, des ONG et contre pouvoirs puissants, Le Pen pourrait expulser à tour de bras, organiser réellement des charters vers l'Afrique et le Moyen Orient. Elle pourrait faire une purge sans précédent dans les médias. Publics, pour commencer, et en menaçant les privés de représailles fiscales, d'émissions sur les ondes et autres rodomontades, elle adoucirait l'opposition à son encontre.

La pierre angulaire du programme FN, c'est la préférence nationale. N'en doutons jamais, elle le ferait. Je ne me résous pas à l'écrire au futur et préfère le conditionnel, mais n'en doutons jamais, élue, elle l'appliquerait illico. Des milliers d'expulsions des HLM. Les étrangers d'abord, puis les français "moins français que d'autres" et idem pour les emplois... Regardons de près les dégâts considérables qu'a commis Orban en Hongrie : des clôtures partout, une loi permettant à la police de tirer sur les migrants, des purges dans les médias, l'université... Elle ferait pareil à bien plus grande échelle. Nier la puissance du politique dans un cynisme complaisant, c'est s'exposer au retour du refoulé. Weber a toujours raison "le politique a le monopole de la violence légitime", ça ne veut pas dire la "violence pour le bien commun", ça veut dire que lorsqu'ils veulent, ils peuvent. 

Bien sûr, l'abstention ne serait pas responsable de l'élection de Marine le Pen, les un peu plus de 15 millions de français qui voteraient pour elle serait responsables. Bien sûr, les responsables qui se sont succédés et n'ont arrêté ni la montée des inégalités sociales et écologiques sont les premiers coupables. Bien sûr. Néanmoins, les voix qui manqueront au second tour face à Marine le Pen doivent bien réaliser ce que sera la présidence de cette dernière. On a le droit de ne pas vouloir choisir entre des partis sociaux libéraux ou libéraux tout court, on a le droit d'être en colère et exaspéré par ces endogames au politique aveugles, mais il faut le faire en conscience de l'inhumanité que serait l'exercice du pouvoir par le Pen... Personnellement, je ne m'y résoudrais pas. Si mon candidat Insoumis n'arrive pas au second tour, la mort dans l'âme mais sans regret, j'irai mettre le bulletin de vote qui nous évitera 5 ans de fascisme. Ce d'autant que le fascisme a ceci de répété dans l'histoire qu'il arrive au pouvoir démocratiquement et ne repart pas si facilement... 

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