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16/04/2017

Et si Marine Le Pen n'était pas au 2 eme Tour ?

280x157-3Jp.jpgLe simple fait de poser la question sans passer pour un fou est une première victoire. Depuis cinq ans, le FN n'a cessé de monter lors des élections intermédiaires, au point d'arriver en tête lors des européennes et des régionales. Depuis un an, tout le monde nous explique que Marine le Pen sera au second tour dans un fauteuil. A part une semaine après la primaire de droite lors de laquelle Fillon avait repris la première place, elle domine la course du premier tour depuis six mois. Et en fin de semaine dernière, la voici derrière Macron. Lequel baisse, mais moins que le Pen. Moins 1,5% dans de nombreuses études. Et aucune progression depuis deux mois. Il reste bien sûr le fantasme d'une forte sous-évaluation, du risque Le Pen à 30% au premier tour, agité par les proches de Valls pour mobiliser au premier tour. Mais on ne les entend même plus, désormais si vote caché il y a, c'est pour Fillon. Le Pen dévisse, irrémédiablement. Elle reste qualifiée pour le second tour, pour l'heure, mais dans la dernière ligne droite, ça n'est plus une fatalité. Sourions et redoublons d'efforts.

Comment en sommes-nous arrivés là ? La piètre qualité de la campagne frontiste explique évidemment en partie cet essoufflement. Mais en faible partie seulement. Les thèmes a l'agenda nous en disent beaucoup plus. Après les faibles 10% de son père en 2007, le Pen fille a doublé le nombre de voix pour aller chercher ses 18% en 2012, dans une élection où l'on avait beaucoup parlé de ses thèmes de prédilection : le hallal, les repas dans les cantines, l'immigration et avec la tragédie Merah de mars 2012, le terrorisme. Lesdits thèmes ont également jalonné les élections intermédiaires. Immigration er risques turcs lors des européennes et risques d'insécurité dans les transports ou besoin de préférence nationale lors des élections régionales. Bingo à chaque fois. Là, quelque chose a changé : qu'on l'aime ou pas, Mélenchon a pris le leadership sur l'agenda de la campagne et a remis la question du partage, des richesses, des ressources planétaires, du travail, au coeur du débat. Hamon, dans une autre mesure, non payant électoralement mais honnête pèse sur le débat d'idées. Quelles sont les idées en débat dans cette campagne ? Le revenu universel, la limitation des salaires à 400 000 euros annuels, la sécurité sociale avec des visions très différentes et plus largement, le rôle de l'Etat. S'opposent des conceptions régaliennes fortes (Macron, Fillon) avec retour du service militaire, renforcement des forces de polices à des conceptions étatiques (Mélenchon, Hamon) avec renationalisations, extension éducatives, lutte contre les déserts médicaux...

Au milieu de tout ça, le Pen n'imprime pas. Uniquement pour ça. Les affaires et autres poursuites judiciaires glissent comme l'eau sur les plumes d'un canard. Les électeurs FN s'en moquent comme d'une guigne. Et puis, avec un Fillon embourbé jusqu'au au cou, les autres ont intérêt à faire profil bas. Mais le programme ne passe pas. Elle étouffe, cherche des angles. Lors des deux débats, elle recevait des coups sur tous les sujets dès que l'on quittait l'immigration ou l'insécurité où elle raconte ses sornettes habituelles sur le grand remplacement à venir et la France Orange Mécanique. Si elle ne s'en sort pas, c'est que le FN ne sait pas où il habite, au niveau socio-économique : Marion Maréchal et tout le FN du sud est sur une ligne Reagan, comme Jean-Marie le Pen, avec baisses d'impôts massives et foutez la paix aux petits patrons, la suite de Poujade, en somme. Philippot et tout le FN du nord comme de l'est est au contraire sur une ligne colbertiste avec renforcement des pouvoirs publics. Au sud, le discours de Fillon est mieux rôdé. Au nord, celui de Mélenchon gagne.

On le voit, dans la spectaculaire remontée de Mélenchon, il y a des électeurs FN. Pour la première fois, en faisant le job, un candidat arrive à ramener à lui des dégoûtés de la politique. Des abstentionnistes, beaucoup de jeunes et donc, un peu d'électeurs FN. Pas assez, notamment chez les ouvriers où le FN reste le premier choix avec 40% des électeurs, mais un certains nombre de français abandonnés par la politique. Désespérés, ils veulent un chanegement fort et ne sont pas raciste pour deux sous. Le fait qu'on leur trace enfin un avenir désirable les séduit. Invitée cette semaine dans plusieurs émissions, Marine le Pen ne s'y trompe pas et tape sur le programme fiscal de Mélenchon. Sur la dette qui exploserait. Elle parle comme les technocrates et les oligarques qu'elle conspue. Le piège se referme sur elle, son attaque est inopérante.

Jusqu'où la courbe de l'insoumission fera t'elle baisser celle de la haine ? Impossible à dire. Dans cette élection folle, TOUS les scénarii sont encore possibles. Le plus cruel serait celui d'une remontée folle de Mélenchon et d'un effondrement de le Pen, conjugué à un réflexe de survie de la droite propulsant un Fillon/Macron. Au moment où l'oligarchie est conspuée comme jamais, elle enverrait ses deux représentants au second tour. C'est un risque à prendre : on aurait alors la possibilité de partir en week-end le 7 mai sans craindre l'arrivée des fascistes. L'autre possibilité, bien sûr, c'est que l'insoumission écrase la haine et accède au second tour. Hallucinante il y a encore quelques semaines, cette hypothèse est désormais plausible. Plus que sept jours...