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25/11/2017

Affronter des moulins à vents macronistes

Don-Quichotte01.jpgCette semaine, je fus saisi comme jamais par la peur du vide. Non pas sous, mais face à moi. Ce vide sidéral avait les traits poupins de jeunes collaborateurs parlementaires macronistes. Après m'avoir entendu parler politique et fiscalité, ils me demandaient ce que je pensais de leur début de quinquennat et de leur super budget. Alors que je détaillais point par point, l'insanité des 46% de baisses d'impôts concentrés tout en haut et surtout la folie qu'il y avait à accorder 400 000 euros de baisses d'impôts aux 1 000 français les plus riches et en même temps des baisses d'APL ou du gel de point d'indice pour les fonctionnaires, ils ne bronchaient pas. Ils clignaient beaucoup, bichaient presque.

Alors, je haussais le ton concernant l'idéologie délirante et mortifère à propos des chômeurs vus comme des ultra privilégiés "qui abusent de leurs allocs pour faire le tour du monde au Bahamas avec des montures Channel offertes par la prodigalité de notre welfare state". Toujours pas plus de réaction qu'une bernique. Je montais encore dans les tours à propos de la politique agricole suicidaire que nous menons en klaxonnant joyeusement, soutenant encore plus l'agriculture intensive et saccageant les aides au bio. Mes interlocuteurs clignaient des yeux, prenaient des notes sur leurs téléphones et affichaient une lippe boudue. Je sentais qu'ils allaient enfin me répondre, mais je devançais leur réplique en explosant définitivement en parlant des Paradise Papers dont ils n'avaient absolument rien à foutre alors que tout prouve que ces pratiques ôtent 20 milliards de recettes fiscales au pays chaque année. Là, tout de même, après un nouveau clignement d'yeux, mon interlocuteur m'opposait : "bien je comprends. Vous ressentez une certaine déception face à l'action présidentielle". Et il reprenait sa rapide mastication car sa députée ne voulait pas s'éterniser... 

Je n'en revenais pas. La moitié de mes critiques aurait suffi à faire sortir de ses gonds n'importe quel sarkozyste. Il n'en avait rien à faire, il a noté des chiffres, deux formules, a regardé les dizaines de notifications qui s'étaient amoncelé sur son smarphone pendant le déjeuner, m'a souri et est parti sans envie de débattre ou de convaincre. Tels des moulins à vent, les macronistes ne répondent pas. Le vent, c'est celui que fait souffler Jupiter via son messager Christophe Èole Castaner en éléments de langage reproduits à l'infini. Va affronter ça... Cela m'a souvent frappé depuis que j'en fréquente : aucune aspérité, aucune colonne politique chez les marcheurs, des techniciens. J'ai vu des députés faire applaudir par des salles d'employeur des mesures ultra techniques. Aux "nous voulons un pays où les gens respirent et mangent sainement car aujourd'hui l'air et nos assiettes font plus de morts que les armes", une vision de société, ils opposent "nous réintégrerons le RSI au sein de la Sécurité Sociale à périmètre fiscal constant et prévoyons un dégrèvement des cotisations au delà de 3 SMIC". Et des types applaudissent ça... Ca laisse songeur sur l'époque et l'échec des grandes utopies politiques, reconnaissons le...

Mélenchon l'a admis d'ailleurs, il y a peu. On doit lui donner raison, le 1er round revient au Président. Les manifs ne prennent pas, le mécontentement ne monte pas, ça n'est pour autant que l'adhésion est là. Une immense majorité de français jugent la politique fiscale du gouvernement "injuste", "à destination des hyper riches", "écologiquement injuste, tartuffe". Mais faute de grives, on mange de merles, et faute d'une alternative envisageable, on subit la marche. Surtout, on subit le rythme du vent. Nous voudrions encore parler des ordonnances de la loi travail, mais le vent nous a déjà déporté vers la réforme des retraites et le financement de l'assurance chômage. Le piège serait d'aller boxer dessus où les moulins à vent vont encore nous enrhumer. 

Il nous faut réapprendre à boxer différemment. Reprendre la main sur un agenda différent, avec des priorités qui parlent à tous : l'air, l'alimentation, une éducation qui permette à chacun de se réaliser, un vrai partage des richesses, des ressources, du temps. Sur ces sujets, nous sommes ultra majoritaires. Prenons le temps de nous rassembler pour faire bloc et levée une masse tel que le vent s'essoufflera contre elle.  

 

 

16/11/2017

Des porcs sans tête de l'emploi

"Ho oui, mais quand même Hervé le Bras n'a pas une tête de harceleur". Ainsi me répondait brillamment un distingué philosophe alors que nous échangions sur le harcèlement sexuel, pratique selon lui "réservée à certains milieux" et peu présente dans les milieux universitaires où "les gens sont cultivés". Je tombais de ma chaise et lui citais le cas du démographe Hervé le Bras, qui fut poursuivi par d'anciennes étudiantes en thèse qui, dans des termes très crus avaient expliqué qu'elles avaient été incité à pratiquer la promotion canapé. Mon interlocuteur se bloqua dans le déni au motif spécieux que le Bras n'avait pas la tête de l'emploi pour un harceleur...

Dans ces cas là, la phrase d'Einstein "il est plus facile de briser un atome qu'un stéréotype" prend un relief particulier. Les stéréotypes facilitent la vie de ceux qui aiment à ranger leurs représentations ; des pulls qui grattent pour les profs, des punks à chiens pour les intermittents, et donc sans doute des têtes de porcs pour les harceleurs sexuels... 

Harvey Weinstein, DSK, Tariq Ramadan, maintenant, tous ont "la tête de l'emploi". C'est sûr qu'à y regarder de plus près, ils ont quelque chose dans le sourcil, dans la lippe bavante, oui, retrospectivement, c'est sûr, ils ont des têtes de pervers. La vindicte populaire aimerait ainsi se débarrasser de types qui porteraient les stigmates. Ca n'est évidemment pas si simple. Et surtout l'ampleur de la libération de la parole des femmes avec les #Metoo font ressortir une telle masse d'hommes harceleurs que les rues devraient être littéralement invivables, défigurées par tous ces pervers dégoulinants. Il va donc falloir chercher ailleurs et dépasser nos croyances dans une tête de coupable pour prêter plus attentions aux mots, gestes et autres attitudes qui pourraient trahir un agresseur en puissance. Prenons Denis Beaupin, pour finir, il a posé avec du rouge à lèvres pour dénoncer les violences faites aux femmes. Il a posé avec son petit vélo en citoyen responsable, on lui aurait donné le bon Dieu sans confession, on ne l'aurait jamais soupçonné. L'histoire a montré, prouvé, re re reprouvé qu'on aurait eu tort. Les agresseurs sexuels ont souvent la responsabilité en étendard, la mise parfaite et le sourire en coin. Mais ils laissent partout des traces de mots, de gestes et d'attitudes visibles de beaucoup. C'est cela qu'il faut dénoncer dès le début car ce qui frappe dans toutes les histoires de harcèlement et d'agressions, c'est la durée sur laquelle elles s'étalent. Hier encore, Thierry Marchal-Beck, encore un bon petit à tête de chef scout qui n'était que patron du MJS se serait livré à des agressions sexuelles entre 2010 et 2014. Quatre années pendant lesquelles il a abusé de nombreuses jeunes femmes. La possibilité que personne n'ait rien vu, entendu, remarqué, est proche de zéro. Quatre années pendant lesquelles personne n'a voulu dénoncer un type qui n'avait pas la tête de l'emploi, du présumé coupable... 

13/11/2017

Le procès en droito-traîtrise est ouvert

Amateurs de boxe en famille, à vos pop corn : la droite va s'entre-déchirer et ça ne sera pas du chiqué... La gauche française connaît ces combats fratricides, avec des affrontements célèbres (Jaurès et Guesde, Mitterrand et Rocard, Valls et Montebourg, rayez la mention inutile) où la "gauche du réel" tance la "gauche idéale" qui lui intente en retour un inévitable procès en sociale-traîtrise. A droite, la tradition veut que l'on tranche l'épineuse question du chef par des méthodes plus viriles de concours de... méthodes plus viriles, en somme. "Un chef, c'est fait pour cheffer" aimait à dire Chirac repris récemment avec gourmandise par l'ineffable Wauquiez. Lequel Chirac s'était imposé après avoir crucifié Balladur lors d'une campagne présidentielle et avant d'être trahi de l'intérieur par son ministre de l'intérieur qui supplantera le bellâtre de Matignon. A droite, on a le concours sanguin, le concours de binette, de biceps, de c... mais jamais on ne s'abaisse à trancher le débat sur des idées ; cette lubie de gauchistes.

Problème, depuis la primaire de l'an passé, il a bien fallu pimenter le concours de beauté par des différences de lignes politiques. Raison pour laquelle Sarkozy regimbait, craignant une fracturation hydraulique de sa famille. Qui advint. Non pas après le premier tour, mais pendant la campagne. Remonté à bloc par la campagne de Sens Commun sur le mariage pour Tous et le livre de leur héros sur les ravages de l'islamisme, les soutiens de Fillon ont fait le boulot de recomposition idéologique. On l'a un peu oublié, mais l'argument massue de l'entre deux tours des fillonistes était "Juppé, il est pas vraiment de droite. Il soutient le mariage pour tous, il tape pas sur les mosquées, il est de gauche, quoi". Passée la violente défaite, le camp de la droite n'est pas revenu à la raison. Au contraire, les nervis s'excitent et pensent qu'ils ont perdus contre la gauche macroniste (même si 51% des électeurs fillonistes plébiscitent la politique économique du gouvernement) et qu'il faut remettre un vrai coup de barre à droite. Une tendance dopée par le ralliement de Juppé à Macron pour les Européennes de 2019. Tous les traîtres qui sont partis, on va les écarter. Wauquiez l'a dit "dehors, les constructifs". On pourrait, hâtivement, y lire un suicide politique, la perte d'une grosse part de ses troupes. Wauquiez sait compter. Et il sait surtout que le Pen a fait 8 millions de voix au premier tour, qu'elle a perdu tout crédit avec son débat d'entre deux tours, perdu son cerveau avec le départ de Philippot et que tous ses électeurs en colère cherchent un chef qui sait cheffer. Et il va les chercher, avec sa parka rouge, ses fautes de grammaire factices et ses velléités de nouvelles croisades internes... Et s'il fait sauter la banque frontiste, il pourrait faire péter la banque. 

Sur l'identitaire, il va se créer son boulevard du mortifère. Sur l'économique, pour ne pas se tromper, il va Trumper. Dire n'importe quoi. Un mix de protectionnisme bien franchouillard et raciste pour rassurer les électeurs FN, une dose de libéralisme fiscal pour rassurer les notaires et les pharmaciens et une bonne grosse dose d'anti-fonctionnarisme et d'europhobie parce que ça vous ôte rarement des voix à droite. 

Le procès en droito-traîtrise va s'ouvrir et il risque d'être expéditif, avec un verdict épouvantable...