Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

23/09/2018

Européennes : ne pas banaliser les illibéraux

"Il n'y a pas de problème démocratique en Hongrie". Cette phrase prononcée par Marine le Pen lors du Grand Jury Europe 1 ce matin, ne fut suivie d'aucun démenti par les 3 intervieweurs. Aucun. Pas même une nuance, une contradiction, l'exposition de quelques faits parmi la kyrielle d'horreurs commises par le régime d'Orban. Rien. Circulez, on enchaîne sur la question migratoire... Après tout, puisqu'on a décrété que le match était Macron ou Orban, progrès ou régression, ouverture ou fermeture, on ne va quand même pas épiloguer sur une babiole comme la démocratie. Faute à nous, honte à nous, d'avoir banalisé les régimes illibéraux à ce point et en avoir fait une part du jeu. On ne parle plus forcément d'extrêmes, mais de populisme, concept mou et spongieux.  

C'est un jeu scandaleusement dangereux auquel se livre les champions du libre échange à l'européenne qui nous vendent pour 2019 : statu quo ou inferno. Sans déconner ? Vous n'avez rien de mieux à vendre que la rhétorique du chaos ? Laquelle a systématiquement échoué par le passé et vous pousse, comme vous l'avez prouvé ce matin, à banaliser le pire une fois qu'il a été élu. Car non, le chaos n'adviendra pas. L'illibéralisme, si. Et c'est précisément ce qu'il faut renseigner sur le fond aujourd'hui, plutôt que de continuer d'agiter de chimériques cauchemars qui ne font plus peur à personne. Ce qu'il faut renseigner, c'est les purges des illibéraux (en Hongrie, mais aussi en Pologne et d'autres vont suivre, sans doute en Italie, d'ailleurs) dans les médias, dans les administrations centrales et même jusque dans les programmes scolaires. Comme l'écrit très bien le politologue Yascha Mounk, ces nouveaux régimes ne sont pas totalitaires, il n'y a pas de goulags en Hongrie ou en Pologne. Les adversaires ne sont pas tous traqués dans la rue. Mais c'est aussi grave : les libertés fondamentales s'étiolent lentement et à ce rythme, d'ici une dizaine d'années, il n'y aura plus de tout de presse libre en Hongrie et fort peu de possibilités de manifester son opposition au régime.   

Au-delà de la rhétorique catastrophiste, l'autre argument pour minimiser la menace illibérale est le délit de condescendance : l'assurance qu'ils sont si mauvais qu'ils ne peuvent gagner un débat d'idées. Sortons de l'arrogance intellectuelle : un an et demi après un débat où elle fut humiliée, laminée par Emmanuel Macron, Marine le Pen n'est politiquement pas morte. Du tout. Au contraire. Les premières estimations pour les européennes donnent son Rassemblement National au coude à coude avec LREM. Et elle peut l'emporter en juin prochain. Comme gagner de nouvelles villes aux municipales de 2020 et pourquoi pas, la présidentielle de 2022. Ceux qui disent que c'est impossible sont les mêmes qui pouvaient expliquer par A+B pourquoi Trump ne pouvait jamais ô grand jamais, l'emporter contre Hillary Clinton. Pourquoi le Brexit n'adviendrait jamais. Pourquoi la Ligue et les 5 étoiles ne pouvaient l'emporter. Un minimum d'humilité serait de mise...

Tous ces leaders arrivent aussi au pouvoir parce que leur autoritarisme, non content de ne plus effrayer, est envié. Les deux tiers des américains nés dans les années 30 et 40 sont attachés à la démocratie. Ils sont moins d'un tiers chez ceux qui sont nés après 1980. Les mêmes tendances pointent en Europe. Face à la faiblesse des révolutions politiques prises, l'aspiration à la radicalité revient en force. La radicalité qu'on pourrait légitimement espérer sur l'écologie n'est hélas pas sur les radars, c'est de façon écrasante une radicalité identitaire issue d'une angoisse sociale profonde qui émerge. Face à ces peurs gigantesques, les petits pas, la consolidation de Maastricht et une PAC améliorée ne me semble pas être la digue des plus rassurantes. La vague brune arrive et nous sommes trop confiants. 

Commentaires

----------------------------------------------------------
Je n'y comprends plus rien : Castor disait , il y a encore peu , pis que pendre des " libéraux " ; et le voici qui nous met en garde contre les 'illibéraux " de Hongrie et autre lieux , la France elle-même n'étant pas épargnée par une peste presque brune ...

Son pote Mélenchon , ennemi patenté du " libéralisme doit-il être considéré comme un " illibéral ", allié objectif , donc, de Marine Le Pen ?

Eclairez , svp , ma lanterne d'étudiant novice en Science politique ...

Écrit par : Ado-Nice | 24/09/2018

------------------------------------------------------------------
C'est effectivement bien compliqué ! j'ai moi aussi besoin de quelques éclaircissements ...
Mais il est possible que Castor lui-même n'y comprenne plus rien ...

Écrit par : Pépé Castor | 24/09/2018

-----------------------------------------------------------------------
Castor n'est pas le seul à avoir un problème avec le vocabulaire .

Je ne pense pas que Mélenchon soit vraiment fascisant en dépit de certaines apparences ...

Utile , cher Ado-Nice , pour vos débuts en science politique : une recherche approfondie sur le mot " libéral" , en remontant aux années 1820 ...

Une autre recherche utile : les années 1930 , que l'on évoque beaucoup ( et sans doute un peu abusivement ) en ce moment

Écrit par : Jc Jaurras | 24/09/2018

Les commentaires sont fermés.