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21/10/2019

Les élus ont-ils le droit de penser en dehors du cadre ?

Ce matin sur France Inter, la députée européenne LFI Manon Aubry a ferraillé avec Nicolas Demorand et Léa Salamé qui lui reprochait de confondre son rôle d'élue avec celui d'une "activiste". Ce, parce qu'elle soutenait ouvertement le mouvement Extinction Rebellion, lequel appelle à la désobéissance civile pour alerter sur le dérèglement climatique. Et la jeune élue (29 ans) de devoir rappeler à ses intervieweurs les fondements les plus élémentaires de la lutte politique, mais ils semblaient rester hermétique...

Dans le monde économique, on n'a pas de panégyrique assez fort, de mots assez puissants, pour ceux qui "think out of the box" tant il semble évident que le génie humain va nous emmener vers quelque chose de meilleur. Et qu'au fond, si on y parvient, il faut le ou la soutenir car c'est juste. Le parallèle vaut évidemment pour la politique, reste "juste" à déterminer si la cause est juste.

Pour y répondre, on peut lire ou relire le père de la désobéissance civile, David Thoreau, qui nous exhortait déjà à ne pas nous laisser intimider par les lois. Ecrites et conçues par des hommes, elles n’ont rien d’éternelles et sont faites pour être remises en causes et questionnées de façons permanentes. Face à des lois injustes, choquantes, ineptes, scandaleuses voire insensées, il faut savoir se poser les bonnes questions. Sans doute celles soulevées par Martin Luther King sont elles les bonnes : « sur certaines prises de positions, la couardise pose la question : est-ce sans danger ? L’opportunisme pose la question « est-ce politique ? », et la vanité les rejoint et pose la question « est-ce populaire ? ». Mais la conscience pose la question « est-ce juste ? ». Et il arrive alors un moment où quelqu’un doit prendre position pour quelque chose qui n’est ni sans danger, ni politique, ni populaire, mais doit le faire parce que sa conscience lui dit que c’est juste ».

On comprend bien King et Thoreau sur le sociétal : on encourage à désobéir, à être activiste contre la peine de mort, à militer pour la dépénalisation de l'homosexualité ou, chez nous, on remercie les médecins qui pratiquent déjà la PMA pour deux femmes et on comprendrait que certain.e.s élu.e.s les soutiennent. Mais pour le reste ? 

La défense de la macronie pour Sylvie Goulard était de dire que son cas était légal, puisque ne posant pas question à la commission des lois. Mais il faut renverser la question : est-ce juste de gagner plus que son indemnité parlementaire pour un job aux motivations obscures n'exigeant que l'organisation de deux réunions par mois ? Evidemment, non. Si ça n'est pas illégal, c'est qu'il faut changer la loi. Est-ce que le système actuel permettant aux entreprises de payer leurs impôts dans le pays à la fiscalité la plus basse (les Pays Bas, le Luxembourg ou l'Irlande, généralement) au mépris de payer là où ils commercent est légal ? Oui. Est-ce juste ? Non, évidemment. Quand le monde est injuste, la désobéissance n'est pas une possibilité, c'est le chemin de la justice. Chère Manon Aubry, on vous a posé de bien injustes et de biens stupides questions, ce matin. Continuez et ne lâchez pas, vous ouvrez la voie.