15/04/2020
Il n’y a plus de bonnes solutions
Depuis lundi, 20h15, le débat sur la légitimité de la réouverture des écoles le 11 mai éclipse la question de savoir si le professeur Raoult mérite un Nobel au carré ou est un charlatan... Et les arguments de la fermeture des écoles "jusqu'à ce qu'on ait trouvé un vaccin" me navrent. Ceux qui disent "'c'est criminel, on peut rester confinés des mois sans problème" me navrent.
Précision avant de me faire agonir d'injures : ma soeur est instit, mon frère est éducateur scolaire, j'ai des ami.e.s en pagaille profs dans le primaire et le secondaire. Et je les aime fort. Je n'en veux pas à leur santé, ne veux pas qu'ils reprennent n'importe comment. Evidemment. Mais ça ne m'empêche pas de me poser les questions dans le bon ordre et la première qui compte est : le confinement est-il un projet de société viable ? La réponse est non.
Est-ce que la réouverture des écoles est une bonne solution ? Non. Mais, il n'y a plus de bonnes solutions, seulement la moins mauvaises à choisir. Si on remonte la chronologie, nous pourrions ne pas en être là. Nous pourrions être la Corée du Sud. Ni oubli ni pardon, nous aurions pu être la Corée avoir masques et tests et encore des usines. La disparition de 700 millions de masques, les fermetures d'usines de gel, de bouteilles, la faiblesse de nos stocks de respirateurs, le manque de lits... Tout ça est évidemment vrai. Le mea culpa présidentiel de lundi est beaucoup trop faible eu égard à sa responsabilité. Tout n'est pas de son fait, évidemment, mais il a commis plus d'erreurs qu'il n'en a concédé, à commencer par le criminel (au sens propre) maintien du premier tour des municipales. Tout ceci est vrai. Tout cela devra être jugé, dans les urnes, dans les tribunaux. Pour le passé, pour l'avenir, que ça ne se reproduise plus. Certes. Mais l'heure n'est plus à pleurer sur le lait renversé mais à voir comment composer avec l'épidémie, puisqu'elle est là.
Elle est dans l'air, sur les objets et dans les miasmes de quelques millions de français.e.s. Et elle est invisible. Il faut cesser de se regarder avec haine, parce qu'on croise des passants qui marchent sur un quai ou flâne sur une place. Cette culture de la délation, de la haine de celui ou celle qui sort est insane, et nous monte les uns contre les autres, quand on a besoin de cohésion.
Pour les écoles, avant de hurler à l'assassinat, on a besoin d'intelligence collective. Les écoles ont fermé du jour au lendemain, elles vont rouvrir dans un mois. Un mois pour s'organiser au cas par cas. Je comprends qu'on insulte Blanquer (je m'en prive peu), mais eu égard à sa tête depuis mardi, la décision ne fut pas la sienne et surtout il n'a pas les clés de la réouverture. Ca se fera différemment dans chaque ville, dans chaque établissement, mais il faut se donner une chance. Un mois pour cela et des masques et tests qui arrivent bien plus qu'il y a un mois (même si, pas assez).
Le confinement n'est pas un projet de société. Dans un manoir, avec des revenus qui tombent et sans enfants, on peut peut être tenir quelques mois sans sombrer dans la folie, mais hormis cela, ça n'est pas tenable. N'oublions pas que les inégalités extrêmes de confinement se détendront avec le déconfinement. Si on est pour la justice, on doit aussi se réjouir pour toutes celles et ceux qui vivent dans des tout petits espaces et pourront ressortir. En faisant gaffe, à distance, mais ressortir. On peut rouvrir les parcs sans qu'on s'agglutine forcément. Je pense à mes copines mères célibataires (j'ai pas de potes pères célibataires, désolé) et qui devenaient folles à l'idée de n'avoir aucun répit, aucun petit temps libre jusqu'à septembre. Les enfants ne reprendront pas à 100% tout le temps, mais un peu de répit est plus que bon à prendre. Tous les artisans, coiffeurs, libraires, fleuristes, dépanneurs, qui voyaient leurs maigres éconocroques fondre comme neige au soleil, vont pouvoir retravailler. Toutes celles et ceux qui télétravaillent avec leurs enfants et deviennent fou au point que la première angoisse des DRH de boîtes de service concerne le burn out et l'épuisement. Et les profs eux mêmes qui se sacrifient pour maintenir la continuité pédagogique dans des conditions acrobatiques... C'est humain de se réjouir que tout le monde n'aille pas mal avec le déconfinement.
En isolant les plus fragiles, les très vieux, déficients respiratoires, diabétiques sévères, obèses morbides, on s'évitera un second engorgement hospitalier. Bien sûr, en rouvrant les écoles, plus de personnes attraperont le COVID. Mais c'est inévitable. C'est une épidémie. Autour de moi, beaucoup l'ont eu. Certains s'en sont remis en 8, 10 jours, d'autres trois semaines, un mois. Comme une épidémie d'une belle saloperie. Quelques morts aussi, pas proches, mais on est tous à six contacts (on a plus le droit aux poignées de main...) de tout le monde. Oui, des morts, mais très fragiles. On ne peut agiter le spectre de la mort d'une adolescente pour demander à tout fermer, tout claquemurer, quand l'immense majorité des morts sont des personnes fragiles. On doit se protéger, faire gaffe à nous pour les autres et vice versa, mais la peur n'est pas une vision du monde. Le confinement non plus.
13:57 | Lien permanent | Commentaires (3)
Commentaires
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Du bon sens et pas trop d'imprécations ; la mise en cause de Macron , rituelle , est plutôt modérée ...
Plusieurs fautes d'expression , signe de désarroi ...
Écrit par : Jacques Aubin | 16/04/2020
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"la première angoisse des DRH de boîtes de service concerne le burn out et l'épuisement."
Le burnes out : dû à la pratique excessive de la gymnastique amoureuse à domicile .
Écrit par : Titi | 16/04/2020
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L'amour en période de pandémie : l'état bientôt souteneur ? plusieurs parlementaires demandent que "les travailleuses et travailleurs du sexe " puissent bénéficier du chômage partiel ou du statut des intermittents du spectacle .
Écrit par : 20 100 | 16/04/2020
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