Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

31/03/2021

Dans quel régime sommes nous ?

Je ne sais pas ce que dira Macron, ce soir à 20h. Personne ne sait, fors le Président lui même. Les épidémiologistes, les scientifiques, les partenaires sociaux et économiques, les conseillers politiques, tous pissent si fort dans un violon que le malheureux instrument n'est plus jouable, offrant une magnifique allégorie de ce que subissent les professionnel.les de la culture de ce pays.

C'est assez dingue, tous les parents qui s'appellent pour s'organiser : "tu fais quoi toi si ça ferme ?" C'est probable, mais pas certain, n'a-t-on pas déjà assistés, médusés, à une volte face fin janvier quand l'inéluctable fermeture nous était promise ? 

Quelle tristesse que de nous voir englués dans un présentisme permanent, obligés et contraints de nous adapter par obligation et non par choix. Et tout ça parce qu'une personne décide seule et terrorise tellement tous les autres que plus personne ne peut décider autrement en attendant. On l'a vu sur des choses aussi triviales que les vaccinodromes qui relevaient du bon sens puisqu'il faut partout et tout le temps, dont Macron ne voulait pas "par peur des images de stades vides" et qu'il appelle désormais de ses voeux.... 

Nous ne sommes évidemment pas en dictature, les images des quais de Saône bondés après le couvre feu en atteste. La possibilité de critiquer le leader maximo est puissante et pas un opposant au Néo Nobel de médecine ne dort en prison ou n'a vu ses enfants abattus pour perfidie contre le régime. Pour autant, hier en me promenant le long du Canal Saint Martin, j'ai vu deux jeunes femmes donner leur carte d'identité et se voir infliger 135 euros d'amende pour le crime abominable de boire une bière au grand air sans masque. Le temps de la verbalisation elles avaient remis les masques et essayaient mollement de contester mais les Pandores avaient choisi leurs victimes. Les nervis plus vindicatifs ne se faisaient pas contrôler, les rapports étaient vraiment ceux de chats et de souris peu décidés à s'affronter pour de vrai.

Nous ne sommes pas en dictature, mais nous ne sommes franchement plus en démocratie quand toutes nos vies sont suspendues à la décision d'un bonhomme égotique comme je n'en ai jamais vu (et j'ai interviewé Gilles Kepel...) et impossible à suivre. Suivre les avis du conseil scientifique n'était déjà plus de la démocratie : personne ne les a élu, personne n'a soutenu leurs mesures et leurs avis successifs, contradictoires et oubliant des "trous dans les raquettes" (les 3 millions d'indépendant.es, les intermittent.es, les gérant.es et j'en oublie) mais il y avait une forme de cohérence. En 2020, on appliquait les décisions d'une poignée. Même ça c'était trop, maintenant nous sommes suspendus à la vision d'un seul. Un peu comme si nous suivions Jeanne d'Arc qui est sûre et certaine des voix qu'elle a entendu. Voilà en quel régime nous sommes : nous sommes en crise mystique. 

23/03/2021

Fox Newisation du débat

Je ne sais pas comment fait Samuel Gontier pour s'infliger quotidiennement des heures de chaînes d'info en continu. Je comprends bien l'idée de regarder à distance, avec esprit critique, le besoin d'alerter, de montrer les chausses trappes rhétorique au grand public, leur lire les sous-titres derrière les propos à l'écran. Il n'empêche. Ça fait près de vingt ans que je n'ai plus de télé et chaque expérience passée à la regarder me navre. Ce d'autant qu'en 2020, avec le confinement, toutes les chaînes d'info ont connu des audiences records. Les plus de 50 ans regardant même la télé 5h26 par jour. 5h26 sur 17 éveillé, près d'un tiers. Folie...

Bernard Stiegler avait raison de noter, peu de temps avant sa mort et donc avec des réseaux sociaux déjà très puissants qu'une des pires erreurs d'analystes politiques était d'annoncer la mort de la télé, alors qu'elle n'avait jamais été autant regardé par celles et ceux qui votent le plus. C'est sympa d'aller sur TikTok, Twitch, Instagram et passer du temps sur Twitter pour attraper des jeunes qui ne votent plus et certainement pas pour ceux qui les singent, mais ceux qui votent le plus sont ceux qui regardent le plus les chaînes d'info. Le noeud du drame, il est là.

Bloqué dans une chambre d'hôtel pour le boulot et réveillé par une insomnie, je me suis infligé une prescription sévère pour comprendre : 1h de BFM, 1h de C News. Il y a quelques nuances, BFM pilonne l'agresseur sexuel Pierre Ménès quand C News passe l'affaire du journaliste de Canal sous silence par esprit de groupe. Mais globalement, la trame est la même : trop de bureaucratie en France, trop d'islam en France (j'ai appris que "la maire islamogauchiste de Strasbourg allait financer une mosquée turque dans sa ville"), trop d'islam dans l'économie (j'ai appris que Laurent Wauquiez créait un "intéressant fonds régional pour éviter que les entreprises ne tombent sous pavillon qatari") j'ai appris que le carnaval marseillais était organisé "contre la France et pour demander la mort des flics". Bref, j'étais sidéré par les choix éditoriaux en temps de crise sociale sans précédent...

Pas un mot sur la culture en grève partout en France, avec plus de 100 scènes nationales occupées depuis plusieurs semaines par des artistes et technicien.nes qui luttent pour leur survie, pour travailler, pour faire vibrer, pour nous raccrocher à la vie. Pas un mot, sur non pas la détresse, mais la désespérance étudiante avec une explosion de l'anorexie des jeunes filles, des tentatives de suicides chez les ados, des résultats scolaires en loque. Pas un mot sur les hôteliers restaurateurs qui n'ont pas ouvert depuis des mois et qui vont finir par se foutre en l'air, toutes et tous ces gérant.es qui n'ont pas le chômage partiel et ont vu, en un an, fondre les économies d'une vie. 

Deux heures de télé, j'ai la nausée, les yeux sales, j'ai perdu le goût de vivre et l'odorat de la curiosité. Les chaînes d'info, c'est du Covid pour le cerveau. 

 

21/03/2021

Gouvernement hors de contrôle

Alors qu'on guette tous les variants avec l'angoisse que leur action rende l'épidémie hors de contrôle, voilà que le gouvernement prend tout le monde de vitesse en rendant la gestion pandémique hors de contrôle en huit jours à peine. "Le gouvernement, on dirait l'équipe de Mont de Marsan à Intervilles, quand ils n'arrivent plus à remonter sur le boudin en mousse et retombent à la flotte à chaque fois", me disait un ami aux références insoupçonnées. 

D'abord, il y eut l'impensable suspension pendant 36h du vaccin Astrazeneca, pitoyable pantalonnade pour s'aligner en panique sur l'Allemagne. Évidemment, les scientifiques ont rassuré, mais dans un pays où les anti-vaccins sont nombreux, pourquoi cette palinodie superflue ? Puis vint le non-plan de Castex. "Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément". Si Boileau avait écouté Castex, il en aurait déduit que notre Premier Ministre avait bien mal conçu son plan. Et effectivement, dès le lendemain, il revenait sur ses propres mesures pourtant concertées, amendées et soupesées nous disait-on. Coiffeurs, fleuristes et autres avaient le droit d'ouvrir, mais pas d'autres boutiques qui maugréent comme jamais, et à raison. Les étudiant.es, les ados en souffrance, doivent encore patienter. Pas tenable. Castex le sent, d'où son idée de les laisser s'aérer avec une attestation pour 10km, avant d'enterrer et d'annuler cette énième norme kafkaïenne... Cerise sur le strüdel : alors qu'un nombre croissant de théâtres, de salles de spectacles sont occupées pour exiger leur réouverture attendue et alors que toutes les études disent que ce sont des lieux sûrs à condition d'y fermer la buvette, Roselyne Bachelot s'incruste à l'Opéra où ils filment un spectacle et chope le Covid. 

C'est assez fou. Nous sommes dans une situation d'exception où le gouvernement peut faire passer les mesures qu'il veut sans possibilité pour l'opposition de discuter le bien fondé des textes, et malgré cela, ils arrivent à se prendre les pieds dans le tapis. Le problème n'est pas pour ou contre le gouvernement, pour ou contre le confinement comme au temps de Boccace. Bien sûr que la pression hospitalière est extrêmement forte, mais elle l'est d'autant plus que nous sommes au 55ème rang mondial pour la vaccination, plus efficace et rapide moyen d'endiguer la pandémie. Elle est d'autant plus que ce gouvernement a détruit des lits de réa depuis 3 ans et n'a rien relancé avec le crapoteux Ségur. Elle l'est d'autant plus qu'on a pas fait depuis le début de la pédagogie efficace et transparente en laissant parler librement les scientifiques. Bien sûr, on rabâche, mais connaissez-vous d'autres gouvernants, à part Bolsonaro et Trump qui ont affirmé, à plusieurs reprises, que les masques ne servaient à rien ? Vous pouvez revenir dessus après, mais vous avez instillé le poison du doute et c'est criminel. Surtout quand vous ne vous excusez pas.

Nos institutions sont ce qu'elles sont, ils vont garder la main sur la gestion de cette épidémie pendant encore un an. La campagne de vaccination, les suites à y donner, ça sera eux. La réouverture des facs, les sauvetage des entreprises en faillite, toujours eux. Les millions de nouveaux pauvres, de nouveaux affamés et de nouveaux désespérés, toujours eux. Bien sûr qu'ils ne sont pas responsable du virus, mais ils ont clairement inoculé le variant de l'incompétence nimbée de suffisance. Je doute que cela nous vaccine contre le Pen.