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12/04/2022

La négociation part mal

Ce matin, les journaux narrent que Macron "se fait plus social". En cause, son "absence de fétichisme du chiffre" pour la retraite à 65 ans et la possibilité d'aller seulement jusqu'à 64. Mieux "il est ouvert à un référendum" Et alors, pas belle la vie ? Il arrive ce barrage ? 

Pour reprendre les amabilités Giscard / Mitterrand, quand Macron dira à le Pen que son programme appartient au passé, elle pourra, à raison, lui rétorquer que son quinquennat affiche un impressionnant passif. Et c'est à cause de ce dernier que la négociation d'hier est mal embarquée. Le compromis historique français depuis 40 ans a toujours poussé les Présidents à faire moins que promis en se rapprochant du centre. Mitterrand, Jospin, Hollande durent écornés un peu, beaucoup, à la folie, leurs mesures de gauche pour complaire aux marchés et à l'UE. Chirac, Juppé et Sarkozy durent mettre beaucoup d'eau dans leur vin pour ne pas courroucer la rue, les profs, les usines et renoncer aux mesures les plus anti sociales. À l'inverse, Macron promis peu aux marchés (l'ISF et la flat tax) et alla beaucoup plus loin. La violence inouïe de sa réforme de l'assurance chômage en est l'illustration la plus criante, sa réforme des retraites escamotée par le Covid, itou. Et il monte en tensions avec son travail forcé pour le RSA et donc la réforme des retraites à 65 ans. Peu importe, au fond, qu'il dise être prêt à céder un an, il repartira de l'avant, c'est son mantra.

Pour la première fois, la France a élu un idéologue. C'est vraiment Madelin en plus malin, en plus madré, en plus charismatique. Une haine, non pas de l'État (il adore jouer le chef de guerre, pincer les joues des flics et se montrer démiurge de la nouvelle économie) mais de la fonction publique. En apparence, c'est la seule promesse faite aux marchés qu'il n'a pas rempli : supprimer 120 000 fonctionnaires. Mais il est plus pernicieux, plus vicieux que ses prédécesseurs néolibéraux. Plus malin, aussi. Plutôt que d'affronter les syndicats sur des mesures inacceptables, il joue le pourrissement et rend la fonction publique si inattractive qu'elle meurt d'elle même. Sous son quinquennat, le nombre d'aspirants aux concours de professeur.es a plus chuté que la cote de Valérie Pécresse, c'est dire. Idem pour l'hôpital public que son "Ségur" en trompe l'oeil ne sauve pas. Idem pour la justice où les heures supp (non payées) sont la norme et que Dupond Moretti ne sauvera pas. Niveau suppression de fonctionnaires, il a tout de même donné des gages étonnants : Bercy par l'intermédiaire de Darmanin a supprimé 5 800 postes de fonctionnaires aux impôts, chargés de la lutte contre la fraude, pour leur substituer des algos traquant les mouvements suspects. Le service qui pouvait renflouer l'État se retrouve à la diète, ballot. Imaginez que ça soit fait à dessein pour complaire à ses potes oligarques, mais je n'ose y croire. Hormis les flics (précieux pour réprimer les mouvements sociaux), nos services publics peinent à attirer autre chose que des vacataires, des intérimaires, des bouches misère. 

Voilà le passif, en cinq ans. Alors vous comprendre qu'hier, la négo du bout du lèvre soit aussi crédible qu'un voeu d'abstinence médiatique de BHL. Quant à "la possibilité d'un référendum" si c'est aussi brillant et abouti que le Grand Débat ou la Convention Citoyenne pour le Climat, on trépigne par avance. 

Encore un effort, Macron, on ne veut pas de votre charité, on veut le vrai partage. 

 

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