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11/04/2022

La politique, c'est du rapport de force

Comme des millions d'électeur.ices de Mélenchon, je n'ai pas trouvé le sommeil. La colère ne passe pas.

Reprenons les choses dans l'ordre : l'extrême-droite est aux portes du pouvoir alors qu'elle pouvait être éliminée. C'est aussi simple que ça. Pendant deux semaines, tout le monde va se faire des noeuds au cerveau, pester, avoir peur pour quoi au final ? Voter Macron et donc ployer ou s'abstenir (ou voter blanc) et compter sur les autres pour éviter l'élection de le Pen... Pendant deux semaines, on va avoir des débats de haute volée. Le Pen dira qu'elle veut interdire le voile et infliger des amendes à celles qui le porterait, affrètera des charters et que sais-je. Macron rappellera son bilan avec lacération des tentes des migrants, loi contre le séparatisme votée par les députées RN, enquête ouverte dans les universités pour lutter contre l'islamo gauchisme. Miam ! On aurait pu avoir des débats sur la justice, la justesse, le partage. Le niveau juste d'héritage, de salaire maximum, des minima sociaux, le rôle de la planification pour préserver les ressources. On ne l'aura pas. Rideau. 

La colère ne passe pas. On le reproche déjà aux Insoumis.es. Les gens comme il faut le disent "on ne peut pas discuter avec les Insoumis. Trop de trolls. Trop de pulsions. Trop de fascisme". Voilà, les candidats à 2, 3 et 4% expliquent doctement à celui qui a fait 22% ce qu'il faut faire pour rassembler... L'avant centre du FC Trincamp donnant des conseils à Mbappé pour mettre plus de buts. 

Fillon Président n'aurait pas gouverné aussi à droite que Macron et le pire est à venir. Après un quinquennat qui a généré un million de nouveaux pauvres, le doublement de bénéficiaires des banques alimentaires, une augmentation des SDF et des mal logé.es, Macron propose le travail forcé pour les allocataires du RSA, la retraite à 65 ans (l'espérance de vie des plus précaires est de 64 ans, mais passons, faut payer les retraites des riches), la paye des profs au mérite et le tri scolaire des mômes dès 12 ans...  Face à un bilan et un programme aussi immonde, que Pécresse appelle à voter Macron, c'est normal. La droite décomplexée promise par Sarkozy n'a jamais aussi bien gouverné qu'avec Macron. LR devrait fermer boutique et tenter de négocier de renommer le parti en "Double LR EM" et voilà. 

Qu'LR se prosterne, c'est logique, mais les autres ? Hier, Roussel et Jadot ont tout de suite dit "votez Macron !". Sans condition, sans préalable, rien, "votez Macron" comme un réflexe pavlovien... Sandrine Rousseau a sauvé l'honneur, sur le plateau de France 2 en disant "on ne peut pas donner un blanc seing, il faut tendre la main et envoyer des signaux aux électrices et électeurs de gauche avec des mesures sociales et écologiques". Merci. La politique, c'est du rapport de force et on l'oublie trop.

Je lis tellement de banalités, de commentaires insipides et enjoués sur la force du consensus. Mais le Front Populaire ne fut possible que grâce aux occupations d'usines, aux grèves, aux mouvements sociaux. Et le CNR ! Dans la réécriture historique folle opérée par les macronistes, De Gaulle aurait assis tout le monde autour de la table, les communistes et les patrons et décrétée qu'on allait créer la Sécu et les Retraites par répartition. Voilà voilà... C'est évidemment un PCF premier parti et une CGT de combat qui arrachèrent aux patrons toutes les cotisations dont ils ne voulaient pas. Hier, il y avait une opportunité historique d'inverser le rapport de force en faveur du capital, de lui faire peur à nouveau en abordant tous les sujets dont il ne veut pas entendre parler : limites, plafonds, redistribution, droits nouveaux, responsabilités.

Il y avait une opportunité historique de changer un modèle économique inégalitaire et sexiste. Le programme de l'Avenir en Commun menait plus rapidement qu'une nouvelle Grande Cause vers l'égalité réelle. Les femmes attendront, elles ont l'habitude. Il y avait une opportunité historique d'avoir un programme qui écoute plus le GIEC que Black Rock. Le climat s'offrira le luxe qu'il ne peut s'offrir d'attendre, il en a tant pris l'habitude. Le gouffre entre l'espérance soulevée et la catastrophe sociale et écologique annoncée est si immense que la colère ne passe pas. Il va falloir réduire ce gouffre, nous donner des perspectives, donner des gages, pour faire mieux que se contenter de ne pas donner sa voix à Le Pen. 

 

 

 

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