17/11/2014
Vers un parti du café ?
Internet m'apprend que les potaches du web ont déjà décliné le Tea Party en France, en remplaçant la boisson trop british par un bon café du petit matin. Le défilé des candidats UMP de ce week-end au lobby au nom en forme d'oxymore, "sens commun", rappelle malheureusement que cette blague est en train de nous arriver sans humour dans l'hexagone...
A bien lire l'opposition à Hollande, soit 90% du champ politique, l'Armageddon économique menace le pays. Personne n'a de vraie solution pour le chômage, la transition énergétique, les mutations éducatives ou de santé... Bref, les enjeux inhérents à l'intérêt général sont immenses. Et les réponses d'un nombre croissant de candidats sont minuscules.
Encore et toujours, les variations sur l'infiniment petit et l'infiniment grand. Dépenser tellement d'énergie, mais tellement d'énergie, pour revisiter la loi Taubira. Raisonnable ? Evidemment non, mais on voit bien les hommes politiques professionnels, d'appareils, dépassés par des bases militantes et incapables de tenir une ligne. Idem sur l'immigration. Une priorité française ? Un rapport mondial de l'OTI et un second de l'OCDE montrent que l'apport financier de l'immigration est positif pour les comptes sociaux. Grâce à nos immigrés, nous pouvons mieux (moins mal...) payer notre sécurité sociale ou nos retraites. La question n'est donc pas de savoir s'il faut plus ou moins de migrants, mais comment redistribuer le travail, relancer l'investissement public dans des secteurs stratégiques (grands travaux, énergies). Pourtant, là aussi, nous dépensons une énergie infinie pour une politique de gribouille où François Fillon ose s'aligner sur l'infâme préférence nationale...
Tout cela marque tout de même le fait qu'une bonne partie de nos élites est prise dans un cyclone, dans une mutation économique forte à laquelle, à l'évidence, les réponses historiques du libéralisme ne permettront pas de sortir. Le dernier baromètre OpinionWay sur la confiance montre des résultats effarants, pire que jamais, en matière de défiance à l'égard des partis politiques, droite et gauche confondues... Les médias, les syndicats, les banques et les grandes entreprises, même l'école en prend pour son grade. Les mieux préservés de la vindicte populaire sont les hôpitaux, la police et l'armée... Tu parles d'une troïka et d'un programme de relèvement. Et pourtant, cette spirale n'est pas prête de s'inverser tant que les responsables des partis de gouvernement s'entêteront à pilonner les marges du cadre et à laisser intact le tableau tout entier. La dégelée récente d'Obama, emporté par une radicalisation de l'opinion américaine à droite comme à gauche, devrait inviter nombre de responsables français à s'interroger. Surtout à gauche, avant que nous ne retrouvions nous mêmes avec notre oléoduc XL à gérer, ces 2400 km de tuyau ralliant le Canada et le Golfe du Nouveau Mexique. Notre barrage de Sivens à côté, est infiniment petit. Espérons qu'il en aille ainsi encore quelques temps...
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11/11/2014
Uber, ou le chant du cygne capitaliste
Hier, pour des raisons diverses (heure tardive, éloignement de l'un lieu où je pourrais facilement trouver un taxi) j'ai finalement recouru aux services d'Uber. Mes copains sur place avaient déjà leur abonnement. J'aurais pu commander un taxi, mais non, j'ai cédé. Rien à redire, la voiture est arrivée en 6 minutes. Le type conduisait plus attentivement qu'un taxi, ne nous infligeait ni sa radio à fond ni ses commentaires vibrants d'ignorance sur l'état politique du pays, et nous a même proposé de l'eau ou des bonbons.
Le tout pour une course qui nous est revenu à 5 à 10 euros de moins que si nous avions commandé un taxi. Que demande le peuple ? N'est-ce pas beau, le progrès, le service individualisé et sur mesure ? Sans doute est-ce pour cette optimum qualité de service que le fondateur de Uber est devenu en quelques années seulement, milliardaire. Amen.
C'est pas sérieux... Quand je pense que certaines voix de gauche, les modernistes évidemment, se sont réjouis ! Evidement. Ils ont été bien coachés les petits, ils ont bien manigancé leur arrivée en France, les coquins. Très belle campagne, un peu facile tant elle joue sur du velours en France, eu égard à la détestation des taxis tricolores. Geignards, en retard, trop chers et introuvables. Qui voudrait défendre cette corporation ? La bataille était gagnée avant que d'être jouée.
Rappelons tout de même qu'Uber figure dans la liste des entreprises qui font du Double Pump, à savoir qu'il emmagasine des pertes dans tous les pays et centralise ses profits en Irlande histoire de bien dégraisser les impôts. Et pour les conducteurs, quid de la protection sociale, des arrêts maladies, des assurances diverses et autres droits fondamentaux auxquels ont droit n'importe quel travailleur ? Oubliettes. Uber comme tant d'autres capitalise sur l'armée de réserve des chômeurs pour décréter "take it or die waiting". Et ironie de l'histoire, tant de jeunes cools applaudissent. Les jeunes, surtout, plébiscitent ce nouveau service, preuve supplémentaire de l'absence de mémoire et des contradictions de l'époque : nous continuons à descendre dans la rue pour empêcher de repousser la retraite à 60 ans, nous arrimons pour maintenir une santé gratuite, les 35h, payer les heures supplémentaires le dimanche... En clair, fort heureusement, un modèle social protecteur et de plus en plus protecteur pour tout ceux qui sont déjà dedans. Ceux qui sont en dehors ? Qu'ils crèvent... Uber l'a bien compris qui embauche de nombreuses personnes qui sont déjà des salariés précaires, mais avec un système de protection sociale, et qui arrondissent leurs fins de mois en faisant la nique aux taxis. Quand je vois des intermittents du spectacle encenser Uber, je m'interroge longuement...
Bien sûr que les taxis sont une corporation contestable en bien des points, mais comment avons nous pu collectivement inverser la charge de culpabilité à ce point ? Tristesse. Il faut arrêter de se coucher devant ces créations de fausses valeurs. Monétaires, certes, mais après ? A part gonfler le PIB et maximiser les profits de quelques uns, quelle est la valeur et l'utilité sociales créés par Facebook, Uber ou Airbnb, autant de nouvelles sociétés qui s'engouffrent dans les failles du capitalisme.
Uber, ce n'est pas la maladie infantile du capitalisme, mais plutôt son chant du cygne. Comme le prophétise Rifkin, "nous sommes entrés dans une ère de décomposition du capitalisme, ou quelques malins exploiteront le besoin d'ultra court termisme sur des niches". Pour l'heure, il faut que le politique reprenne la main et se disent que si Uber consacre une part démesuré de son chiffre d'affaires à embaucher des bataillons d'avocats, c'est peut être plus par connaissance d'un système frauduleux généralisé que par amour du droit... Cette bataille vaut la peine d'être livrée et la victoire est plus qu'envisageable.
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10/11/2014
Bas du Front et relevés du Front
Hier soir, avec mon camarade frontiste favori, nous sommes allés regarder le Classico dans un bar. Au comptoir. Les 2h passées là m'ont permis de voir un très beau match et d'entendre un monceau d'horreurs. Littéralement d'horreurs. L'arbitre, Clément Turpin, devient Clément Tapin (ha ha) le joueur Nkoulou devient le cousin de Kiroukou et ainsi de suite... Une litanie beauf, raciste, misogyne, homophobe, tout ça d'une crasse. J'avais oublié.
Comment ai-je pu oublier ? J'ai plus de 15 ans de Parc des Princes derrière moi, j'ai été abonné plusieurs années et j'en ai entendu, des monceaux d'horreurs... Pour le coup, ce n'est pas une singularité française, quand je suis allé au Maracana à Rio ou au stade de Gênes, j'avais entendu les mêmes dégueulasseries. Dans des très beaux écrits sur le football, Pasolini rappelle que le "tifoso" le supporter de football italien tire son nom du typhus, il est si malade de l'amour qu'il porte à son club qu'il en est comme malade. Bref.
Je ne penses pas avoir regardé le match avec des électeurs du Front National. Je pense avoir regardé le match avec un paquet de fiers abstentionnistes. Rien à foutre tant qu'on a Zlatan... Inutile de tirer sur l'ambulance des spectateurs de foot, ça ne voudrait rien dire, nous sommes des dizaines de millions à regarder, donc bon. En revanche, en revanche. Dans une époque singularisée par une défiance envers les partis politiques traditionnels, mais aussi, de perte de repères droite/gauche, nombre de responsables politiques en appelle à une force abstraite ; LE PEUPLE.
Et tout le monde de flatter le peuple pour ses vertus homériques. Car c'est bien connu, le peuple a du bon sens, il ne ment pas, ne triche pas, a des aspirations nobles. Il est travailleur, se lève tôt et veut une vie tranquille sans se soucier de ce qui se passe chez son voisin.... Aujourd'hui, les commentateurs tentent de nous dire que Front de Gauche comme Front National ont la même finalité par rapport au peuple ; sortie de l'Euro, je ne sais quoi, démagogie et autres facilités de gazetiers qui n'ont pas pris la peine de lire les programmes. Surtout, instiller dans les esprits l'idée que "c'est la même chose" car il y aurait 3 convergences alors même que la seule raison d'être d'une politique, sa finalité, sont divergentes à 180° concernant le fameux peuple.
Hier, un excellent reportage de France Inter évoquait le désarroi chez les électeurs du Parti Socialiste. Revenait fréquemment une question majeure "pourquoi on s'engage au PS ? Quelle est la vision de société d'un socialiste ?". Aujourd'hui, il n'y en a plus, si ce n'est gérer un peu moins mal que les libéraux UMP, les dogmes progressistes du FMI. Bon. La vision de société du Front de Gauche, c'est l'élévation de tous, la culture pour tous et l'éducation de tous, l'ouverture à l'autre. Les discours du Front de Gauche portent un idéal du peuple -d'où sa difficulté dans les urnes car un grand nombre d'électeurs ne se retrouvent pas dans cette vision sublimée et n'ont pas la patience de devenir cela- quand celui du Front National ne promet rien d'autres que le retour aux hier qui chantent. Pour cela, on ferme. Les frontières, les cultures pour en retrouver une seule -la gauloise- l'éducation pour revenir aux fondamentaux et ainsi de suite. Les nouveaux élus FN dans les mairies se démarquent par leur haine de toute politique culturelle ou d'ouverture éducative. C'est une vision de société, après tout. Mais qu'on cesse de dire qu'elle est partagée. Le Front National sait qu'il existe des discours comme ceux entendus hier au Comptoir, et ça lui va très bien. Le Front de Gauche veut les éradiquer pour qu'on ne parle que du beau jeu. C'est un peu David contre Goliath mais il faut continuer à chercher nos frondes.
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