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13/07/2016

Lettre à mes amis marcheurs

panomarcheurs2.jpgHier soir à la Mutualité, Emmanuel Macron a donc fait salle comble. Lui qui se veut différent a repris les mêmes ficelles grossières que tous les politiciens de carrière en parlant de 3 000 personnes réunies quand le site de la Mutualité nous apprend que l’espace en question peut accueillir 1 728 personnes. Véniel, allez… 1728 marcheurs, donc, beaucoup de gens « éloignés de la politique traditionnelle », nous dit-on. « Fatigués du clivage droite-gauche », ajoute-t-on.

Au fond, à quoi Macron doit-il sa percée dans l'opinion ? A la droite, avant tout. Une droite réactionnaire, rance, raciste. Libéral en diable, ouvert sur les questions des droits sociétaux, progressiste, il est également favorable à l'immigration et hausse la voix contre les discriminations. Il insiste d'ailleurs sur ces points qui lui valent également quelques amitiés à gauche. Une gauche de droite (DSK, Collomb, Patriat, Terrasse). Fier de cette popularité comparable à celle d'un Kouchner des grandes années, Rintinin de Bercy se sent transporté. Et j'ai nombre d'amis qui sont tombés dans le panneau et ça me navre. 

Macron anti système ? Pourquoi pas Mgr Barbarin à la protection de l’enfance.

L’audace absolue est le signe grâce auquel on peut les reconnaître disait Michel Audiard. En la matière, Emmanuel Macron enfonce la concurrence. Anti système, lui ? On parle d’un homme qui a fait les études les plus conventionnelles et classiques de cette élite (Sciences Po, ENA) avant d’embrasser une carrière au sein de la banque privée du système (Rothschild) où il a exercé ses talents sur un gros deal qui lui a rapporté 2 millions d’euros lors d’une « concentration » pour Nestlé. On a connu plus marginal, tout de même. En parallèle de cela, il fut rapporteur de la Commission Attali sur la croissance pour Nicolas Sarkozy, laquelle a rendu des solutions de « déverrouillage de l’économie » comprenez par là, faire sauter les normes environnementales et sociales qui bloquent quelques professions : les taxis (il a depuis, avec force, défendu Uber), les coiffeurs et autres professions règlementées.

Ses autres propositions tournent autour d'un sujet encore plus punk : baisser la fiscalité du "haut". Il veut supprimer l'ISF (et a montré l'exemple en oubliant de le payer...) veut favoriser le capital risque et il estime avec son humour légendaire que taxer à 75% au-delà d'1 million d'euros c'est aller vers "Cuba sans le soleil". Qu'est-ce qu'on rigole.... 

Ecologie ? Le sujet que vous avez demandé n’est pas au programme…

Lui qui est si bavard sur les questions de fiscalité ne parle jamais d'écologie. Que le premier qui a entendu Marcon en parler se lève. Il promeut le car, selon vous c'est un bon signe ? Il veut encourager le nucléaire ? Quand on est contre les normes, les obligations et les contraintes, écologiquement, c'est pas gagné... En conclusion, mes amis marcheurs, je vous le dis tout net, vous vous leurrez. Macron c’est un américain à Paris : le programme de Michael Bloomberg avec une com’ qui singe Justin Trudeau. Si vraiment ça continue de vous faire envie, c’est pas marcher qu’il vous faut, mais voler vers les Etats-Unis.

 

 

12/07/2016

Le retour du collectif refoulé

coaching_projet_equipe.jpgMaintenant que l'Euro est terminé, on peut parler football. Une évidence s'impose alors que la compétition est terminée : le collectif fut de la fête. Peu de grands matchs, pas d'exploits individuels en meute, pas de raids de 60 mètres avec trois dribbles assassins façon Messi. Comme toujours, heureusement, quelques joueurs se sont dégagés, mais personne n'a surplombé ou éclipsé la compétition.

Le meilleur joueur du tournoi nommé hier est français, Griezmann, et a inscrit 6 buts, certes. Mais il s'est fondu dans le collectif avec un dévouement extraordinaire, s'est replié, battu, bref, mis au service de l'équipe qui le lui a bien rendu en lui faisant quelques offrandes qu'il a habilement transformé. Au-delà du sympathique Grizou, cet euro a vu 2 équipes que l'on disait plus faibles aller bien plus loin que prévu : le Pays de Galles dont les commentateurs pensaient qu'elle ne possédait qu'un joueur, le mythique Gareth Bale est allé en demie-finale et surtout le Portugal, présumé faible fors Christiano Ronaldo l'a emporté alors même que leur géant a du sortir dès le début de la finale. Cela ne signifie pas, loin de là, que les deux individualités ont éclipsé les autres, au contraire. Elles ont magnifié, emporté, entraîné leurs collègues. Je ne sais si cela pourra faire tâche d'huile, mais je crois que c'est une tendance de fond pour ce qui concerne les sélections.

La différence est majeure, ça n'est presque plus le même sport. Les clubs sont plus proches des entreprises, avec une grosse majorité de PME qui vivent leur quotidien comme possible, sont très exposées aux aléas conjoncturels et ne voient pas tellement au-delà de deux trois matchs. Ces clubs sont souvent managés avec une volonté de créer une famille, de retenir les joueurs (on ne parle pas de "talents) et la culture commune se crée sans le dire. Les très grands clubs, la trentaine de clubs qui dominent la scène européenne, c'est le CAC 40. Management par la peur, bal des egos, mais tout le monde file droit pour aller vers l'objectif : gagner du blé. C'est ainsi que les grands clubs sont tous dirigés : pression maximale sur l'entraîneur à qui on fait comprendre qu'il sera licencié et lui même reporte le stress des actionnaires sur les stars, surpayés pour se taire. C'est ainsi qu'on peut faire marcher droit des petites frappes pleine de talents comme Cantona, Zlatan ou Benzema. Tous ont en commun d'avoir une très grosse carrière en club, mais systématiquement échoué en sélection.

Car la sélection, c'est différent, c'est un conglomérat d'individualités mues par un objectif commun : la victoire. Même rondelettes, les primes en cas de victoire sont dérisoires eu égard aux émoluments que les joueurs touchent en club. Ca n'est pas ainsi que l'on peut récupérer les joueurs. Et le faible nombre de matchs doublé du fait qu'ils sont tous d'une importance considérable ne les autorisent pas à abandonner le collectif pour briller en solo devant les caméras. Ne pas chercher le dribble de trop, oublier sa pomme, araser son délire mégalo pour penser collectif, ça fut beaucoup le cas lors de cet Euro et ça peut servir de leçon a beaucoup de monde, dans beaucoup de domaines.  

 

 

09/07/2016

L'autre bonheur privé malheur public

9782213012438.jpgLes sociologues ont une formule pour résumer l'étonnante ambivalence des français par rapport à l'optimisme et la confiance. Persuadés que nous allons collectivement vers l'abîme, nous avons avec la même force, la certitude de nous tirer d'affaires de façon individuelle : bonheur privé, malheur public. Cette expression a été reprise en titre d'un ouvrage célèbre de Hirschman pour réfléchir sur ces discrépances de perception de notre félicité.

Derrière cette différence maintes fois rabattue se cache à mon sens un autre dysfonctionnement majeur : le fait que le privé hurle, tonne, somme le public de s'inspirer des méthodes de l'entreprise, mais l'inverse n'existe pas. Alain Erhenberg montre très bien dans "le culte de la performance" que notre imaginaire collectif est littéralement contaminée par la pensée (simpliste) selon laquelle le nec plus ultra de toute chose est de s'inspirer d'un mix des JO et du CAC 40 : plus vite, plus haut, plus fort, sans être trop regardant sur les règles... Sans cesse, on demande aux puissances publiques de "faire ce qui marche", la même logique s'empare des associations et ONG, sommées de "maximiser leur impact social". Mais les entreprises, elles, n'ont aucune leçon à recevoir, aucun apprentissage à recevoir de la part des autres. Non, non : croissance, redéploiement, OPA, optimisation, marge nette, marge brute ; what else ? Pourquoi se faire chier avec des notions obsolètes comme la qualité de service au public, l'universalité de l'offre, la relation humaine non tarifée ? On s'en bat les steaks. 

Il faut voir avec quelle hargne et quelle arrogance les grands argentiers, les grands patrons et autres éminences privées intiment aux politiques d'apprendre "la vraie vie, celle des entreprises". Ils sont souvent "choqués" (les pauvres petits) par "l'inculture économique, le manque de connaissance de la vraie vie" de nos élus. Je ne dis pas que c'est faux, mais je suis amusé (et un peu courroucé) que les mêmes ne soient pas choqués par leur incapacité à comprendre les logiques du public et du non lucratif. Comme tous ces crétins qui répètent à l'envi que nous avons 57% de "prélèvement de nos richesses qui partent en dépenses publiques". Ce genre de crétinisme répétés finit par devenir une vérité dans l'esprit de certains alors même qu'il ne faut pas être grand clerc pour voir qu'une bonne part des 5,3 millions de fonctionnaires français payent des impôts sur le revenu et tous payent de la TVA et autres TIPP, bref, ça ne sont pas 57% qui fuient toutes les poches... C'est énervant. 

Depuis 30 ans, les états à grands renforts d'injonctions peu aimables du FMI, de la BCE et autres s'exhortent à se comporter comme des entreprises et nul ne peut nier que la mutation s'est faite. Côté grands groupes, grandes entreprises, quel chemin ont-elles fait en retour pour aller vers un modèle plus socialement et écologiquement vertueux ? Le match n'est pas vraiment nul, le résultat, si...