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05/01/2019

L'anti-macronisme n'est pas un humanisme

Petite mise au point en période chaude, où toute prise de distance avec les gilets jaunes vaut procès en idiot utile du macronisme à côté de BHL et Cohn-Bendit : je déteste Macron et le macronisme depuis juin 2012. Alors, le conseiller économique de François Hollande avait commenté la légitime taxe à 75% sur les revenus au dessus d'un million d'euros "c'est Cuba sans le soleil". Depuis lors, je n'ai cessé de haïr cet idéologue plein de morgue, de mépris de classe mille fois répétées avant même d'être président : des ouvrières illettrées de GAD au costard pour parler bien, de "ceux qui ne sont rien", à son soutien d'Uber pour "car c'est mieux que de tenir les murs en banlieue". Je le hais et modestement, je revendique une certaine antériorité en la matière.

Je hais cette politique d'une iniquité sans pareille qui détruit les services publics et compte sur un peu de charité des ultra riches pour relayer. Le ruissellement, la start-up nation, le vieux monde, le besoin d'un roi, son admiration littéraire pour Maurras, je hais presque sans exception, l'ABCD macroniste. Jamais au grand jamais je ne serais allé voter si le second tour avait été Macron / Fillon. Même si je pense que Fillon aurait été plus facile à combattre dans la rue, avantage du vieux monde soucieux des équilibres partisans, et qui entend la rue car il pense aux sénatoriales, aux municipales... Voilà, j'ai fait campagne contre, comme beaucoup. On a perdu. Nos idéaux de justice écologique et sociale et de partage ont perdu face à une énième mystification providentielle. C'est dur à admettre mais c'est aussi ça, la démocratie parlementaire. 

Notre problème collectif c'est de croire que la vie politique s'arrête là et qu'elle recommencera fin 2021, pour la prochaine bataille. Il y a beaucoup de choses à faire à côté. Comme disait Lénine, "n'érigeons pas notre impatience en dogme". Parce qu'au fond, c'est aussi ça, les gilets jaunes. Des gens qui en ont marre. Marre marre marre. Et je les comprends. Je les comprends parce que des décisions d'injustice territoriales, fiscales, sociales répétées avec de nouveaux oripeaux depuis trop longtemps, ça rend chèvre. Surtout quand Macron, contrairement à Chirac par exemple, ne fait pas semblant d'entendre la grogne. Je comprends, ça bien sûr. Mais l'anti macronisme n'est pas un humanisme, n'est pas un programme.

Renverser la table ? Oui, sans doute, mais il faut des règles. Et du calme. Car Macron se délecte du pourrissement. Sa rhétorique historique "moi ou le chaos" retrouve toute sa pertinence pour tout un tas de gens. Les partis historiques, PS et LR se dirigent vaillamment vers une branlée aux européennes, laissant le bloc central de Macron comme rempart. Mais comme rempart aux fachos surtout, car camarades qui prenez vos rêves de révolution d'octobre pour des réalités 2019, c'est le Pen qui va tirer les marrons du feu. Parce qu'un mouvement qui dit "les politiques dehors", "journalistes, collabos", "on en a marre". Et uniquement "Macron, démission", sans jamais un autre nom qui sorte, un mouvement aussi essentialisé sur la figure du chef, ça ne profite qu'à l'extrême droite. 

A gauche, nous ne sommes pas là pour régner. On sème, on plante, on gagne toujours par effraction, on arrive au pouvoir temporairement, le temps de changer la vie et de repartir discrètement, moqués par la droite qui ne revient pas sur les progrès sociaux pour autant. Maintenant que nous faisons face à un type qui s'attaque vraiment aux acquis du CNR et qui va continuer avec les retraites et le chômage, il faudra augmenter la radicalité de la riposte. Mais ça se construit, ça ne se hurle pas. Voila. Peace and love. Sur ce, je m'en vais à ma librairie favorite butiner dans la rentrée littéraire de janvier, m'est avis qu'on a besoin de fiction...