Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

19/01/2022

Mesures à la jeunesse : le clivage droite gauche bien vivant

Évidemment, "les jeunes" n'existent pas, en tant que groupe social. Cette précaution oratoire à la portée de tout lycéen ayant eu une introduction aux sciences sociales, les commentateur.ices de la présidentielle ne l'emploient pas, lorsqu'ielles détaillent les mesures des candidat.es à la présidentielle. Or, évoquer, "les jeunes" comme s'ils étaient sur une ligne de départ égale liée à leur état civil euphémise les inégalités folles contenues dans les propositions politiques. Si vous doutiez encore de la pertinence du clivage droite/gauche en 2022, il suffit de regarder ce qui est proposé pour la jeunesse. 

En septembre dernier, plusieurs ouvrage dont ceux de Paul Pasquali et Annabelle Allouch montraient que la situation s'étaient considérablement dégradée depuis "les héritiers" de Bourdieu et Passeron de 1964 à point que nous nous dirigions vraiment vers une "Héritocratie" une société où le "destin au berceau" pour reprendre une expression de Camille Peugny est presque scellé. Dès lors, toute mesure favorisant celleux qui ont déjà le plus relève du séparatisme. Et nous ne sommes pas déçus.

Jadot, Hidalgo et surtout Mélenchon, proposent des mesures universelles. Donner des droits aux jeunes, tous les jeunes, pour pouvoir étudier plus sereinement, sans avoir à travailler lourdement à côté. Une aide du service public pour celles et ceux qui ne peuvent rien demander à des familles impécunieuses ou des réseaux inexistants. L'échec en licence pointé par tous les exécutifs depuis 30 ans n'est pas que financier, évidemment, mais les conditions matérielles, la sérénité inhérente à un frigo rempli et une connexion assurée par la paiement de son forfait, ça change la donne. 

Zemmour, Pécresse et Macron veulent favoriser les donations. En clair, permettre aux héritier.es d'hériter encore plus vite. On héritait à 42 ans en moyenne dans les années 1990, 48 ans aujourd'hui et ça sera 57 ans en 2050. Pour "fluidifier" le ruissellement des plus riches vers les enfants des plus riches, une bonne petite niche fiscale et hop ! Leurs mesures sont catégorielles pour celles et ceux qui ont déjà le plus. Surtout, elles contredisent l'ADN libéral dont ces candidat.es se targuent. Quoi de plus antilibéral que la naissance ? Les libéraux conséquents sont pour une taxation à 100% de l'héritage et la plus faible possible du travail. Voulant ceinture et bretelles, la droite de 2022 veut la naissance et la vie, comme dans l'Ancien Régime.

Le Pen n'est pas en reste, elle qui vise un ultra démago "absence d'impôt sur les revenus de moins de 30 ans". Passons sur l'inévitable effet cliquet qui produira du mécontentement chez les jeunes de 31 ans qui se mettront d'un coup à payer ce qu'ils auraient dû payer pendant des années et pesteront contre "l'état rapetout", mais surtout qui paye l'IR ? Moins d'un.e français.e sur deux payent l'IR, 43% exactement. Aussi, les moins de 30 ans qui ont la chance d'en payer sont précisément celles et ceux qui ne sont pas en galère. Aucun.e livreur.euse Deliveroo, détenteur.ice d'un job précaire, petit boulot et autre rustine n'en paye. Alors peut être que Marine le Pen vise les fameuses victimes des effets de seuil, les quelques milliers de jeunes français.es, tout juste assez riches pour payer l'impôt sur le revenu, mais absolument pas assez pour être à l'aise, surtout sans famille derrière. C'est possible, mais on parle de quelques milliers de personnes, quand une classe d'âge, ce sont 600 000 personnes, 8 millions pour les 18-30 ans.

Universalité des mesures d'un côté, catégorisation de l'autre ; justice contre injustice, mérite contre naissance. Le pilonnage permanent sur le thème "le clivage droite gauche n'existe plus" produit un enfumage très fort. Mais qui ne résiste pas aux faits...  

18/01/2022

Look trickle down

Alors que la crise sanitaire Covid se termine peu à peu, le bilan social dépasse l'entendement : 160 millions de nouveaux pauvres dans le monde, 22 millions de nouveaux chômeurs. C'est donc que nous vivons une crise économique terrible, que tous les indicateurs financiers sont écarlates ? Que nenni. Le rapport d'Oxfam hier dévoile des chiffres pour lesquels aucun superlatif n'est plus à la hauteur : un milliardaire nouveau toutes les 26h. La fortune des milliardaires a plus augmenté en à peine deux ans qu'en une décennie dans le monde. En un an, la richesse des milliardaires français a bondi de 86%. Les cinq premières fortunes possèdent autant que les 40% des Français les plus pauvres. "La folie des grandeurs", à côté, ressemble à un décor de gagne petit.

Il faut bien relire les chiffres ci dessus, des deux côtés du spectre social et se rappeler la propagande ploutocratique pour justifier le ruissellement : la création de richesses privées crée des emplois et elle permet de faire du bien à l'ensemble de la société. C'est sans doute vrai quand lesdites richesses sont crées dans le respect absolu des taxes et impôts retournant aux Communs et le respect des normes environnementales. Mais les fortunes créent par Amazon génèrent infiniment moins d'emplois qu'elles n'en détruisent (rappelez vous les 22 millions de nouveaux chômeurs, les entrepôts mi-automatisés mi esclavagistes d'Amazon sont-ils plus créateurs d'emplois que les boutiques et petits commerces qu'ils remplacent). Et les fortunes engrangés par LVMH ou BNP ne profitent évidemment pas aux français.es puisque elles sont grandement placées dans des paradis fiscaux (révélées par les Panama Papers et encore Open Lux en 2021...) de la part de groupes qui ont bénéficié depuis 2014 d'un inepte et inutile CICE en milliards d'euros qui n'a eu d'autre but que d'augmenter les dividendes versées aux actionnaires (records absolus en 2021). Et ces richesses se font en contractant une dette littéralement non remboursable puisqu'elle se fait aux dépends du vivant, BNP battant encore des records de mensonges débusqués par Reclaim Finance qui a prouvé qu'une obligation "verte" de la banque finançait le nouvel aéropot d'Hong Kong...

Hausse de la pauvreté et du chômage, baisse de l'espérance de vie y compris hors Covid avec la baisse de l'offre de soins gratuites, le bilan du trickle down est absolument cataclysmique, tout les scientifiques le disent, mais les thuriféraires de Reagan, journalistes comme politiques, continuent à sévir tous les matins, s'enthousiasmant pour les 3 000 milliards de capitalisation boursière d'Apple, comme si cela allait aider un seul américain non cadre sup ou actionnaire de la marque à la pomme. En termes d'aveuglement, ils ne valent pas mieux que le yuppie de la tech et la présidente américaine de Don't Look up. Et contrairement au film, ça n'a vraiment rien de drôle. 

15/01/2022

La bataille du pédiluve

Il y a un mois, Taubira promettait de ne pas ajouter une candidature surnuméraire, mais tenterait de tout faire pour essayer "l'union à gauche". Raillée (à raison) pour sa posture mi new age et mi mystique avec des voeux de nouvel an slamés, elle s'est déclarée candidate aujourd'hui. Pourtant, depuis un mois, pas un.e seul.e candidat.e ne s'est désisté.e. Même les candidatures guignolesques de Montebourg et Roussel sont toujours, officiellement, en lice. Les fans de Taubira s'en prennent à Mélenchon et son refus de l'union, mais force est de constater que même Jadot et Hidalgo ne se sont ni retirés, ni ouverts à une nouvelle désignation commune. En allant seule à la Primaire Populaire, elle va récolter un score de dirigeant soviétique en pourcentage, mais le total de voix d'une législative partielle... Pas exactement une rampe de lancement. 

Nous sommes à trois mois de la présidentielle et un seul candidat à gauche enclenche une dynamique d'opinion, c'est Mélenchon. On peut ne pas aimer le bonhomme, regretter ses oukases, sa démagogie sur la crise sanitaire qui lui ressemble peu, ses conflits judiciaires inventés pour se victimiser, mais c'est le seul à engranger. Et s'il n'engrange pas sur son nom, c'est qu'il engrange sur un programme. Quand il parle planification écologique, redéploiement des nouveaux services publics, écart des salaires, taxation de l'héritage et autres, on voit une vision de société. Il sait où il va et pourquoi il fait les choses. Hidalgo n'est pas foutue d'expliquer le pourquoi du comment de sa grande mesure, le doublement des salaires de prof à part "pour rattraper l'Allemagne". Jadot n'explique pas pourquoi il repeint son ISF en ISF climatique, il a l'air perdu dès lors qu'on lui demande de mettre en résonance "justice" et "écologie". Quand à Taubira, elle pitch pour le mieux, envoie des buzz words, c'est une starp uppeuse for good, quoi. 

Hormis Mélenchon qui est dans le grand bain, tous les autres sont dans le pédiluve et se battent pour être le seul à y rester. Le rêve fou de Jadot est qu'Hidalgo se désiste pour lui. Le rêve fou de Taubira est qu'Hidalgo se désiste pour elle. Le rêve fou d'Hidalgo, c'est se réveiller en se disant que toute cette campagne foireuse n'existait pas. Je veux bien qu'on déplore le manque d'union de la gauche, car c'est patent, mais l'union autour d'un.e candidat.e ayant encore une bouée et des brassards par mer agitée, ça n'est pas crédible...