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11/03/2022

La guerre contre le dérèglement climatique aura t'elle lieu ?

La crise Covid a eu la vertu de rappeler qu'en dernier ressort, le politique peut tout. Décider qui circule ou s'immobilise, peut travailler ou non, doit être aidé ou non. Des pouvoirs vertigineux qui ont tourné la tête de nombre de démocrates soudainement dotés des mêmes latitudes que des autocrates sans avoir eu à forcer le destin ou l'armée....La guerre d'Ukraine rappelle là encore que les guerres modernes sont éminemment politiques en plus d'être militaires. 

Dans les deux cas, tout au fond de ces catastrophes, il y a les ferments d'un gigantesque espoir. Du jour au lendemain, ce que les dogmes néolibéraux du doux commerces apaisant ont volé en éclat, et des alternatives furent trouvées en pagaille. Le sommet de Versailles qui réunit les 27 pays de l'UE vise à se doter de solutions de moyens terme, voire court terme, de se passer des énergies fossiles russes. Et pas seulement en important tout d'Algérie et du Qatar. Non, tous les tabous sur les financements aux énergies nouvelles, tous les lobbys sautent sous la menace de la guerre. La capacité de réaction, d'union, d'alliances jugées improbables, volent en éclat. Avez-vous entendu une seule fois une syllabe de dissonance entre les pays frugaux et les pays dépensiers d'Europe ? A la guerre comme on la guerre, on met tout en oeuvre et on verra après que faire de nos rancoeurs. 

L'existence de la guerre d'Ukraine et sa menace pour les européens ne fait pas de doute. Le caractère guerrier du Covid est plus incertain mais nombre de chefs d'état - à commencer par le nôtre- s'en sont réclamer. Là encore, on a pu laisser filer les déficits, les personnels hospitaliers avaient enfin accès à tout le matériel exigé, des choses bougeaient, des alliances économiques internationales prenaient forme. Mais il manque le cran au dessus, ceux qui se sont le plus enrichis pendant la crise et qui polluent le plus : les oligarques. On croirait le terme réservé aux russes, ou aux magnats saoudiens, nous préférons parler de "milliardaires" (plus neutres) quand ça n'est pas "capitaines d'industrie". Si on veut mener la guerre contre le dérèglement climatique, il faut la même unanimité, la même union sacrée pour casser le système extractif, revoir à la fois notre mix énergétique de A à Z, mais aussi et surtout notre système de production en obligeant les acteurs à ne plus produire de superflu, à ne plus produire de jetable (en nous faisant miroiter les possibilités de recyclage qui ne doivent être envisagées qu'en dernier recours) et à s'interdire, s'interdire, s'interdire. S'interdire de bétonner, de construire du neuf sans réaménager (à commencer par le logement) s'interdire les SUV, la 5G... Bref, faire un aggiornamento absolu de nos économies.

Face au Covid comme face à Poutine, la peur fut un carburant diablement efficace. Du jour au lendemain, nos dirigeants virent la saturation hospitalière dans un cas et l'avancée des chars russes de l'autre. Rien de tel ne se produira avec le dérèglement climatique. Il n'y aura pas un seul Armageddon. Mais il y a des tas de prolégomènes. Les méga feux chaque fois plus ravageurs et chaque fois plus incontrôlables en Californie, en Australie et en Russie. Les inondations sans cesse plus violentes, plus inarrêtables. Les ouragans plus violents. Il n'y a pas de vaccin contre le dérèglement climatique et on ne peut pas lui imposer de cesser le feu. Tout ce qu'on peut faire, c'est cesser de provoquer cette forme plus puissante que nous en émettant moins d'émissions de CO2, en massacrant moins la nature. En montrant des signes d'armistice, quoi. La guerre a déjà commencé, il serait de bon ton de l'admettre pour mettre les moyens en face... 

 

 

07/03/2022

Jadot / Hidalgo : l'irresponsabilité historique

Si les crises révèlent les femmes et hommes d'État, la guerre menée par la Russie contre l'Ukraine aura révélée la pusillanimité de Jadot et Hidalgo. Dans le fond, pourtant, je suis infiniment plus proche de leur ligne sur ce drame que de celle ampoulée et irresponsable de Mélenchon. Génie de la communication, ce dernier a réussi un tour de force hier à Lyon en réunissant 15 000 personnes en plein air et à leur faire hurler "face à la guerre, nous répondons la paix". N'importe quel autre candidat.e à la présidentielle aurait dit cela, on aurait fait le rapprochement avec Miss France, avec Bécassine, et autres termes aussi disqualifiants que misogynes. Mais Mélenchon le tribun, Mélenchon le sachant peut se permettre ce genre de renversement et se grimer en Jaurès quand sa position est en réalité plus proche de Daladier... Sa paix, c'est un cessez le feu avec une Ukraine désarmée, éloignée de tout alliée occidental, au territoire ultra majoritairement annexé par les russes, aux ressources pillées. La paix, ça n'est pas la capitulation barbare. Ça n'est pas désarmer des personnes agressées.  

Emprisonné dans son "campisme", son anti-américanisme primaire et paranoïaque, Mélenchon a manqué beaucoup d'occasions de se taire, comme avec la Syrie ou le Vénezuela il y a 5 ans. Et sa chimérique proposition "d'alliance altermondialiste" nous fait hésiter entre rire inextinguible et pitié. Déjà que l'Europe toute entière n'est pas prise au sérieux sur la scène internationale, face à la Chine ou aux US, qui écouterait 3 pays d'Am sud avec la France ? D'ailleurs Boric, au Chili, n'a aucune ambiguïté et soutient les ukrainiens. Bref, rien ne va...

Pour autant, depuis le début de la guerre en Ukraine, Jadot réserve toutes ses philippiques à Mélenchon. Toutes. Comme si c'était non seulement l'avocat de Poutine, mais aussi le seul, en France. Le Pen et encore plus Zemmour sont bien plus Pro Kremlin, pro agressions, pro non ingérence. Et ces deux crapules totalisent près de 30% à elles deux. C'est le moment où jamais de les acculer pour dire aux gens de droite "soyez décents, votez Macron et taisez vous", ce que font déjà les pécressistes, d'ailleurs. 

Nous sommes à un mois du premier tour et les dynamiques sont plus claires que jamais. Mélenchon monte, Zemmour et Pécresse baisse, Le Pen stagne. Avec ce trio dans un mouchoir de poche, il y a une opportunité unique de mettre la gauche au second tour et de changer radicalement le climat politique. Bien sûr, ça ne changerait pas le rapport de force total : l'extrême droite est à 30% et la droite dure à plus de 40%. Bien sûr. Mais ça relancerait une dynamique et une espérance, un des carburants politiques les plus puissants. Ça permettrait de sortir de la résignation, de l'impasse à gauche. Dans le dernier mois, on joue sur ses forces et on attaque ses vrais ennemis. Jadot et Hidalgo ciblent Mélenchon. Un contresens historique. Ce dernier ne réplique pas, d'ailleurs. Il joue sur son programme et vise les électeurs d'extrême droite pour leur dire qu'ils se trompent de colère et ceux de Macron, pour leur dire qu'il y a eu un quinquennat d'injustice sociale et écologique, avant la crise ukrainienne. 

Je voudrais rappeler à mes amis socialistes et écolos réformistes mous qu'il y a une raison pour la percée Mélenchon et que ça n'est pas liée à la guerre en Russie. C'est lié à un programme très clair. Mélenchon parle de violence des riches, de capitalisme prédateur, il parle de bas salaires indignes et indécents et propose des mesures réellement redistributrices, de l'héritage à une grille d'impôt réellement progressive et juste. Sa planification écologique est plus crédible que "l'ISF climatique". Je comprends évidemment, c'est d'ailleurs mon cas, qu'on critique les positions internationales de Mélenchon, mais elles sont infinitésimales dans les raisons de ralliement à LFI. On ne peut pas disqualifier la force motrice à gauche pour cette seule raison. Il y a trois mois, la gauche était jugée certaine de ne pas être au second tour, là, elle a une chance historique. L'argument des soutiens de Jadot pour ne pas s'en réjouir vaut son pesant de cacahuètes : Mélenchon n'a aucune chance de gagner le second tour contre Macron car il ne rassemble pas assez, donc votons Jadot plus consensuel. Et par cette magie, le candidat à 6% est plus fédérateur que celui à 12%...

De toutes façons, 2022 sera la dernière campagne de Mélenchon, même s'il va au second tour, il jettera l'éponge après. Le socle de LFI, les jeunes talents de LFI (Quatennens, Aubry et tutti quanti) seront incontournables pour recréer la gauche. Taper sur Mélenchon comme un sourd, c'est empêcher la future "union des gauches" que tant de voix disent appeler de leurs voeux. C'est obérer une refondation complète des gauches françaises, comme l'ont fait les chiliens, mais bien d'autres dans l'histoire. C'est s'empêcher un programme commun inversé avec la dominante radicale majoritaire et les réformistes minoritaires puisque l'histoire veut ça. La folie de l'anti mélenchonisme primaire (le secondaire est plus qu'admis, j'en ai moi même abusé en début de billet) c'est qu'admettons que, hypothèse plausible, une grande partie des laissé.es pour compte de ce quinquennat, des perdants des réformes iniques se mettent à voter Mélenchon et lui donne les 2/3% qui lui manquent pour accéder au second tour. C'est tout à fait plausible et il a déjà fait une grande partie du chemin. Admettons, donc. En toute logique, Jadot et Hidalgo devraient appeler à voter Macron ou, a minima, une abstention minable. La violence de leurs discours actuels rendrait tout soutien dans un mois inaudible. Le drame ukrainien n'a évidemment aucun mérite, mais disons que depuis l'observatoire du pire, nous aurons eu la confirmation de ce qu'on ne sort de l'ambiguïté qu'à ses dépens et que certain.es sont prêt à tous les prétextes pour dire leur effroi face au partage. Minable. 

04/03/2022

Plus de mots

Il y a deux ans tout juste, Macron déclarait une guerre qui n'en n'était pas une contre un virus qui a envahi la planète entière. Alors qu'on sort des tracas qu'il nous a causé, on prierait pour qu'une sixième vague surpuissante ensevelisse les soldats russes. Là-bas, Poutine nie le terme de "guerre". Il dit qu'il y a une "opération spéciale", un "plan", une "invasion ciblée" et autres entourloupes sémantiques pour ne pas dire ce qui est. Ce que tout le monde voit, sauf les syriens et les nord coréens, coupés du monde par les dictateurs qui les asservissent. Les russes parlent de "guerre", eux. Ils sont vents debout contre cette guerre qui n'est pas la leur, qu'ils ne veulent pas. Depuis 8 jours, on ne compte plus les exemples de démissions, de mise en retraits, de pétitions, d'artistes et de scientifiques (7 000 hier...) contestant cette guerre au péril de leurs carrières, de leur santé, de leur famille. Le courage qu'il faut pour s'opposer à un autocrate comme Poutine est quelque chose que nous ne pouvons imaginer, nous qui vivons dans un pays où notre président est insulté et contesté quotidiennement. 

Cette étrange guerre où un pays seul en envahit un autre malgré l'opposition de la planète quasi entière ne fait que monter en intensité avec cette nuit un bombardement de centrale nucléaire. L'incendie a duré peu de temps, les endroits les plus critiques de la centrale n'étaient pas visés par des armes ultra précises. Les russes savaient ce qu'il faisaient : non pas jouer à la roulette avec l'humanité, mais monter de mille crans dans la menace de vitrification de millions de personnes si on le les laisse pas s'emparer de l'Ukraine entière. En 38, à Munich, il y a évidemment une forme de lâcheté à ne pas combattre Hitler, mais là ? Quel courage y-a-t'il à bomber le torse face à un forcené ? Quand Le Maire a parlé de "guerre" et Ursula Von der Leyen (ceci pour clore l'argument de "les femmes sauveraient forcément le monde", certes les belligérants sont souvent masculins, mais la féminité n'est pas un pacifisme indépassable) de "guerre nucléaire économique" c'est vraiment l'intelligence tactique du gros sel sur la plaie à vif... 

Cette guerre d'Ukraine rappelle tant d'autres guerres récentes, à commencer par la Syrie, évidemment, puisqu'on retrouve Poutine et les armes russes, on retrouve des réfugiés par millions et des civils pris pour cible. On retrouve aussi l'imagerie de Tienanmen avec des civils au courage hors norme faisant face à des chars pour les empêcher d'avancer. Malgré tout, cette guerre, par la menace de fin du monde qu'elle fait planer ne ressemble à aucune autre. Je n'étais pas né, lors de la baie des cochons, mais Krouchtchev et Kennedy étaient rationnels. Poutine ne l'est pas. Sans rationalité, on ne peut plus mettre de mots sur ce qui se passe. 

Le matin, la radio s'est tue chez moi. Je ne veux pas que ma fille écoute ces mots-là. Mes levers sont en chanson, avec le bon roi Dagobert en boucle. Par les temps qui courent, convenez que mettre sa culotte à l'envers est un moindre mal.