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29/10/2010

Bienvenue à Gattaca sur Seine...

Vincent Sourire.jpgJ'aurais mis le temps, mais j'ai enfin compris le pourquoi du succès de Michel Houellebecq: c'est le seul écrivain à parler des  moches ainsi. Pas une espèce de bien pensance sirupeuse de gôche qui dit qu'il faut les aimer comme ils sont; pas une méchanceté vipérine facile sur les excès de cellulite des unes ou la non digestion d'un ballon de basket au niveau de la poche ventrale pour les autres...

Non, Houellebecq parle des gens à chemisettes à carreaux, ceux qui mettent des chaussettes blanches sous leurs costumes ou des gourmettes et en fait ses héros... Tout ce qui suscite des rires de hyènes façon Fogiel chez les petits modeux dès la cour du lycée (j'avais alors des chaussettes blanches, une chemise jaune moutarde et le genre de doudoune à même de susciter lesdits rires). Houellebecq parle d'eux et ils se retrouvent et sous la plume de Mimi, les hyènes doivent se sentir merdeux de dédaigner ainsi leurs frères humains. C'est juste, Mimi, on t'accorde cela et une légère prescience sur l'objet parfait où l'esbroufe en art contemporain, mais rien qui ne justifie que l'on entame une thèse de littérature sur le style chez Flaubert et Houellebecq.

Et s'il est un endroit où Michel est lu par les hyènes, c'est bien Paris. Paris qui coûte si cher que nombre de mes potes l'ont quitté. Chaque fois que je vais les voir, à Figeac, à Avignon, dans les montagnes savoyardes ou à Clermont, les regards des autres ne s'arrêtent pas sur mes chevilles ou mes poignets ou sur la finition de mes mèches. C'est reposant, plus que cela même. A Nice, comme à Paris, on est à Gattaca, sur Méditerrannée dans un cas, sur Seine dans l'autre. 

Hier soir, cette sensation me prenait à la gorge avec une pression paroxystique, mais heureusement, je pouvais soulager ladite gorge à grands renforts de champagne. Nous étions dans une somptueuse salle de réception d'un non moins somptueux musée. Nous étions deux cents, mûs par l'amour de l'art bien sûr et une très forte envie aussi de laisser les pieds des mouettes au sec en pompant des bulles. Et là, l'observateur avisé eut pu dire que pour rentrer il fallait non pas un carton, mais un casting: les filles sortaient de chez Modigliani, pouvaient jouer à cache cache derrière des lampadaires. Les filles qui étaient en fleur depuis plus longtemps le grimait avec force artifice de chez l'Oréal de sorte qu'on le remarquât moins. Les garçons aussi avaient la démarche amidonnée de ceux qui transpirent plus en salle de muscu pour séduire plus. Et au milieu de tout cet écosystème, un hurluberlu en pantalon orange à la coupe improbable, les cheveux d'un ordonnancement approximatif et un gilet façon mineur chilien (remonté de la mine). Il fallait voir les centaines d'yeux converger vers lui et un murmure monter comme dans la chanson de Bécaud. Il avait voler l'orange du marchand. Il était coupable, d'un attentat à la mode assurément mais plus certainement pour l'assistance, il menaçait le vivre ensemble du lieu, il était leur Rom en quelque sorte...

Pourtant, le Rom souriait plus que bien d'autres et s'est barré sans quitter son sourire alors que les conversations continuaient avec les voix pâteuses de celles qui ne devraient pas boire d'alcool car c'est contre indiqué avec leur cocktail matutinaux de Valium et Xanax avalés le matin. Car le pendant de Gattaca sur Seine, c'est que la France est le premier pays consommateur de psychotropes au monde et qu'à force de vouloir assumer au quotidien cette photo parfaite, les membres de Gattaca se rongent de l'intérieur. Il faut imaginer les gattaciens heureux, mais je crois que comme Sysiphe, c'est impossible car chaque matin ils doivent reporter la lourde pierre des apparences et c'est un peu plus dur chaque matin à mesure qu'ils prennent de l'âge...

Demain, nous nous rappellerons que Marguerite Yourcenar n'a pas écrit que des chefs-d'oeuvre, elle en a aussi prononcé. A Mussolini qui se vantait d'avoir un régime politique où tous les trains arrivent à l'heure, elle avait retoqué dans un meeting "l'important n'est pas de savoir quand arrivent les trains, mais où ils vont". Et toc !

Commentaires

Je me marre...

Écrit par : Cecile | 29/10/2010

Excuse Cécile, j'ai mis un peu de temps à répondre, le temps de finir des pompes et des abdos... Oh, mon Dieu ! Tu ne pousserais pas l'espièglerie jusqu'à te marrer avec un soupçon de fiel ?
La vie moderne pousse parfois à des injonctions contradictoires, je te le concède...

Écrit par : Castor Junior | 29/10/2010

Je ne suis que pure douceur et générosité.

Écrit par : Cecile | 29/10/2010

Une dictature du "on" qui ne dit pas son nom... Ce n'est pas pour cela qu'il faut qu'on nous prenne que pour des cons !
Eveillons les consciences et dessillons les yeux des pauvres consommateurs : "vaste programme" aurait dit un certain Charles (de Gaulle) !

Écrit par : franc-tireur | 29/10/2010

"je pouvais soulager ladite gorge à grands renforts de champagne. Nous étions dans une somptueuse salle de réception"

je vois que tu as des goûts de droite.

Écrit par : Humanfly | 30/10/2010

"le Rom souriait plus que bien d'autres et s'est barré sans quitter son sourire" : j'ai finalement trouvé la mienne et je me tiens rigoureusement à elle. Accroupie à mon tabac, on s'est mis d'accord sue 50 centimes par jour.

Écrit par : ema | 30/10/2010

@Cécile: j'en ai jamais douté... Mais je veille quand même.

@Franc Tireur: ouais et ce pauvre Charlie est revendiqué par tout le monde à l'oral, moins à l'écrit...

@HF: quand il s'agit de profiter de ma générosité de gauche et de siphonner ma cave, tu es moins narquoise...

@EMA: qui va payer, tu as vu l'état des finances publiques ?

Écrit par : Castor Junior | 30/10/2010

Les commentaires sont fermés.