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11/01/2023

Not all the same 64

Après un scénario d'une lourdeur qui n'est pas sans rappeler les pires heures du théâtre de boulevard, Elisabeth Borne a annoncé un report de l'âge légal à 64 ans. Ce, après avoir longuement fait miroiter 65 et présenter ainsi le geste comme un progrès. Rétablir l'esclavage mais avec des chaînes allégées, en somme.

Plus sérieusement, d'aussi loin que je m'en souvienne, nos gouvernements successifs n'ont que deux totems : l'âge légal et le nombre d'années de cotisations. Avec évidemment l'idée qu'il faut les allonger tous les deux autant que possible. Comme si nous étions tous égaux face à l'emploi, face au vieillissement. Inepte. Seule une véritable révolution des retraites, intégralement à la carte, serait juste. Cette réforme, comme les autres, est inhumaine, ne prend pas en compte la diversité des vies, inutile de faire plancher un gouvernement pour ça, un algo aurait suffit.

D'abord, l'évidence : reculer l'âge légal quand nous sommes toujours les pires employeurs de séniors est une chimère... Le taux d'emploi des 55-64 ans est de 57% en France contre 63% en Europe et 73% en Allemagne... Et il stagne dangereusement. Comme l'espérance de vie en bonne santé. En repoussant l'âge légal, on envoie à la retraite soit des gens en moins bonne santé, soit des personnes plus pauvres... Les retraités ont un apport incommensurable au pays, mais non validé par le PIB : comme bénévoles associatifs bien sûr, mais aussi comme aides aux jeunes parents. Repousser l'âge légal, c'est affaiblir les assos et fatiguer les jeunes parents (ceci n'est pas une plainte personnelle, tout va bien, merci). 

Ensuite, l'évidence encore : nous n'avons pas tous le même âge à 64 ans. A 62 seulement, 25% des plus pauvres sont déjà morts contre seulement 5% des plus riches (INSEE)... Des députés Renaissance comme Marc Ferracci peuvent bien faire des sorties lunaires (sur France 5) en disant que la pénibilité disparaît puisque "les carreleurs ont désormais des protections aux genoux", la DARES dit l'inverse : en 1980, 16% des métiers étaient considérés comme pénibles, 34% aujourd'hui... De la logistique aux métiers d'aide à la personne, pour les personnes âgées et en situation de handicap, nous avons crée des millions d'emplois pénibles. Et pour les autres ? Seriez-vous prof en maternelle à 64 ans ? Moi non... Consultant, coach, plume, bien sûr, mais cariste, éboueur.euse, et tant d'autres ? Évidemment, non.

Quand Mc Cartney écrit "will you still need me, will you still feed me, when I'm 64 ?" le jeune homme (il l'a écrit à 24 ans) se moque de ce qu'il imagine comme un âge crépusculaire. Résultat, à 80 ans, il est toujours sur scène. Comme ceux des Stones qui ont survécu. La vieillesse est un naufrage pour le Graët, mais nombre d'octogénaires ont encore beaucoup à apporter à la société. Tant mieux pour eux. Je trouve plutôt réjouissante la perspective d'être plein d'entrain loin après 64 ans. Mais l'emploi n'est pas un horizon indépassable, on peut et doit s'épanouir pour le bien commun par d'autres moyens pour laisser la place aux plus jeunes. Ces derniers ont un taux d'emploi toujours déplorables ce qui implique, mécaniquement, que les 44 années pleines, ils les auront à l'âge de Mc Cartney...

L'horizon d'une retraite possible à 60 ans, c'est le seul qui rappelle l'idée de progrès. Qui dit que nos gigantesques gains de productivité servent à quelque chose. Cela n'oblige évidemment personne à s'arrêter à 60 ans, mais permet de faire souffler les millions de personnes qui voient bien les mensonges sur l'allongement de l'espérance de vie (elle stagne en France, baisse chaque année dans nombre de pays, États-Unis en tête) et qui veulent connaître une part de vie sans labeur.  

 

 

 

06/11/2022

Mais qu'est-ce qui serait raciste, alors ?

Plus les articles se multiplient, plus les interviews s'accumulent depuis la sortie ahurissante de Grégoire de Fournas à l'Assemblée jeudi, plus je me dis que nous avons désormais un bloc de médias mainstream qui acceptent une dose très forte de racisme dans la société. Et à vrai dire, je ne sais pas quelle dose serait suffisante pour, enfin, qualifier un raciste de raciste. Les sorties de Zemmour dignes de Sacha Baron Cohen, ces happenings du glauque ont achevé de notabiliser le RN et les notables ne sont pas racistes, comme chacun sait. 

Mon cher quotidien Le Monde, peu téméraire en matière économique, mais naguère courageux pour dénoncer la langue et les actes brunes parle pour l'incident de jeudi de "propos présumés racistes". Beuve Méry doit se retourner dans sa tombe. La judiciarisation de la société, les pressions systématiques du RN qui menacent quiquonque les qualifie "d'extrême-droite", payent. Depuis 3 jours, on ne reprend que leur récit, leurs éléments de langage et on se prosterne devant. Il ne visait pas son collègue député, mais les bateaux de migrants et ça n'est pas raciste, c'est une politique. Hier soir dans son talk show dégoulinant d'un poujadisme putride à même de faire passer Hanouna pour une émission avec de la tenue, Léa Salamé questionnait Clémentine Autain sur ce sujet en disant "moi je ne juge pas cette phrase". RIP service public de l'information... 

Il y a trop de complaisance avec un parti raciste, un parti rempli de racistes. Tout l'entourage du nouveau président Bardella est composé de la Gud Connection, tout l'historique internet de De Fournas est un mélange de Jean Raspail et Renaud Camus, un combo du pire du racisme primaire. L'objectivité ça ne peut pas être cinq minutes pour Hitler et cinq minutes pour les juifs, mais ça ne peut pas non plus consister à se demander si cette sortie raciste l'est réellement... Trop de commentateur.ices et de politiques ont la bouche et la plume qui tremblent et ça n'a jamais été un moyen d'éloigner les racistes du pouvoir. 

30/10/2022

Si l'automne devient le nouvel été, l'été sera le nouvel enfer...

D'aussi loin qu'il m'en souvienne, je me suis baigné à la Toussaint. Dans cette saison qu'on appelle l'été indien et sublimée par Joe Dassin. Je me baignais chaque année au même endroit, à Nice (faut de quoi la comparaison serait biaisée). Mais je me souviens qu'il y avait des années imbaignables ou alors la baignade relevait de la bravade d'enfants en buvant un chocolat chaud en sortant pour cesser d'avoir les lèvres bleutées. Par solidarité, mon père qui redoutait l'eau sous toutes ses formes, nous accompagnait d'un blanc sec, voire d'un calva, car il peut et il doit faire frais, fin octobre. Cette année, je suis descendu en vacances sans écharpe, sans blouson, une simple vareuse suffisant amplement. Précaution de parisien, les locaux sont en t-shirt.

L'eau n'était pas tiède, cette année. C'était de la soupe. Tout le monde rentrait d'un coup, personne ne s'arrêtait aux genoux, rebroussant chemin face aux frimas. Que dalle. Et tout le monde laissait la soleil les sécher. Si nous ne voulons pas nous souvenir que ça n'était pas le cas avant, ça n'est pas par déni climatique mais par le mécanisme baptisé par le biologiste Daniel Pauly "d'amnésie environnementale". Le climat se dérègule peu à peu, ne nous laissant pas le temps de voir les changements. Les oiseaux n'ont pas disparu des champs en une année, pas plus que les moucherons n'ont cessé de mourir sur nos pare brises du jour au lendemain... Hier, il faisait presque aussi chaud, mais avant hier, non. Et ça s'accélère... Nul ne sait sur la trajectoire que nous empruntons ce qui peut advenir. 

Nous devrions nous indigner contre celles et ceux qui osent encore légender leurs articles d'enfants insouciants sur la plage et parler de "la douceur agréable". Cet été, nous avons connu une vague inédite de sécheresse (toujours en cours, évidemment, les réserves ne se reconstituant pas par temps sec...), de végétation brûlée alors que nous n'étions "que" 3 ou 4 degrés au dessus des normales. Là, c'est plutôt 10... Que fera-t-on l'été sera détraqué de 10 degrés sur quelques jours ? Montrera-t-on encore la munificence des étals des marchands de glaces ? Ou reconnaîtrons-nous que lorsque les automnes ressemblent à l'été, l'été ressemble à l'enfer ? 

Quand j'ai commencé à m'intéresser au dérèglement climatique, peu après "une vérité qui dérange' d'Al Gore, je me souviens d'avoir entendu une conférence disant que sans inflexion de nos émissions  de CO2, le réchauffement modifiera le climat et importera des maladies dans des endroits où elles n'ont jamais été recensé. Je m'en souviens d'autant plus facilement que l'exemple portait sur 2050, à Nice. On y trouverait des cas de malaria. Quand le sage montre la migration des moustiques, l'imbécile montre des enfants mangeant des glaces les pieds dans l'eau.