12/12/2010
Anarchimère...
Dans un article du Monde, j'ai trouvé cette très belle phrase de Ricoeur "la fatalité, c'est personne; la responsabilité, c'est quelqu'un".
Ca n'a l'air de rien, mais cet apophtegme définitif m'a alerté sur ce qui m'exaspère chez mes amis, car ce sont pourtant mes amis, anarchistes. L'anarchisme fut mode au XIXème, il prouvait une certaine indépendance d'esprit, et de toutes façons, il était constructif puisqu'il bâtissait des utopies... Là où ça se complique, c'est de savoir vers quel bord penche l'anarchie, les lignes sont parfois ténues et durs à suivre, certains anars de droite flirtent méchamment avec la blonde éructante sur "l'occupation immigrante"...
Quoi qu'il en soit, historiquement, les anars me séduisent pour leur ultrapolitisation désespérée et au XXème, que ce soit Blondin, Nimier, Desproges ou aujourd'hui Luchini, j'apprécie leur compagnie.
Il y a aussi les anars de gauche engagés, ceux qui ont lu "à ceux que la gauche désespère" du maire courage de Sevran, Stéphane Gatignon, mais qui ont refusé de rallier un drapeau. J'en vois beaucoup s'impliquer en pensant changer le monde par le boulot, dans des projets d'entrepreunariat social ou dans des oeuvres médico-social. Il est alors délicat de critiquer leur posture puisqu'au quotidien, ils s'impliquent. Pourtant, alors que pour vomir mes croissants ce matin, je lisais un article sur la montée des extrêmes partout en Europe avec ses "partis de la liberté", m'est avis que cette résurgence anar ne vaudra rien de bon par chez nous en 2012... Et m'est aussi avis qu'elle grimpe elle grimpe vers nulle part, cette anarchimère.
On la retrouve, en plus des citoyens engagés chez un tas de plumes de chroniqueurs mondains trop apeurés de se revendiquer bêtement "de gauche"... Prenez Nicolas Bedos, ce n'est pas anecodtique c'est le plus gros "buzz" (je sais mais on est dimanche, j'ai le crâne trop endolori pour trouver le vocable idoine) de la rentrée, il fait un carton avec sa petite chronique ; pour marquer des points, il tue le père qui reconnaissait que ce n'était pas facile tous les jours d'aimer Lionel Jospin, mais que bon, si on le faisait pas, on récupérait Sarkozy... Dont acte. Et bah Nicolas Bedos c'est la figure du nouveau comique dégagé, le rigolard qui moque la gauche et en premier lieu le PS qui a, à ce petit jeu, secondé l'église catholique dont on a trop éculé les clichés sur les prêtres pédophiles...
Et je reviens donc à Ricoeur en faisant un détour par Benoît Hamon qui rappelait au moment du congrès de Reims qu'il n'a "jamais été aussi facile d'être de gauche qu'aujourd'hui", comprenez là que la crise est bien celle du libéralisme, l'assèchement d'un modèle où l'on privatise les profits et socialise les pertes, donc la responsabilité, elle est bien quelque part, il faut aller les chercher et les contraindre avec des mécanismes coercitifs; mais face à ça, alors que là c'est vraiment le moment de se remobliliser, les anars nous explique que ça sert à rien, ça changera pas, la fatalité quoi. Les banques continueront de se planquer aux Caïmans alors en attendant, buvons des mojitos...
Il paraît qu'être généreux et chercher à faire le bien, c'est bon pour la santé. Etre de gauche aussi, je crois. Peut être pourrait-on capitaliser là-dessus pour faire revenir ces bataillons de désenchantés pour la levée en masse comme dirait l'autre, parce qu'on ne sera jamais trop nombreux à évangéliser l'an prochain pour éviter le nain et la blonde éructante...
Demain, je vous dirais si j'ai retrouvé mon teint de jeune fille grâce à l'échantillon de "age re-perfect" qui était offert avec mon magazine dominical...
11:38 | Lien permanent | Commentaires (9)
Commentaires
Un duel Sarko-Marine Le Pen, l'an prochain… rien que d'y penser, tiens, je ne me sens en état d'«apophtegme définitif»!
Écrit par : Yola | 12/12/2010
Je vois plus un second tour Martine AUbry Marine le Pen, mais je ne suis pas persuadé qu'il faudra alors, en retenir l'émancipation féminine...
Écrit par : Castor Junior | 12/12/2010
Une petite phrase de Jean Prévost (écrivain, journaliste et résistant) 1901-1944, mort au champ d'honneur dans le Vercors :
« Etre un esprit libre, un homme libre, c’est prendre sa part des problèmes dont nous dépendons tous, et que personne ne peut résoudre : la destinée et la politique. Refuser de s’en mêler, c’est s’abandonner aux pires esprits, ceux qui se croient sûrs et s’arrogent l’autorité — aux présomptueux et aux fanatiques. Le courage de choisir la clairvoyance, de choisir pour soi seul, la générosité de vouloir que chacun choisisse, telle serait la liberté : qu’une seule de ces vertus lui manque, et elle meurt. » (in Les Caractères p. 260)
Écrit par : franc-tireur | 12/12/2010
Une phrase à méditer, écrite avant celle de Paul Picoeur. Elle est signée de Jean Prévost, journaliste, écrivain et résistant tombé dans le Vercors le 1er août 1944. Anarchiste de coeur, pacifiste de conviction, il a su prendre les armes pour défendre la liberté.
« Etre un esprit libre, un homme libre, c’est prendre sa part des problèmes dont nous dépendons tous, et que personne ne peut résoudre : la destinée et la politique. Refuser de s’en mêler, c’est s’abandonner aux pires esprits, ceux qui se croient sûrs et s’arrogent l’autorité — aux présomptueux et aux fanatiques. Le courage de choisir la clairvoyance, de choisir pour soi seul, la générosité de vouloir que chacun choisisse, telle serait la liberté : qu’une seule de ces vertus lui manque, et elle meurt. » (in Les Caractères p. 260)
Écrit par : franc-tireur | 12/12/2010
Desproges, Luchini, anarchistes ? Tu plaisantes, mon gars ? Pourquoi pas Depardieu aussi ?
Suffit-il d'avoir du talent, d'être abstentionniste ou girouette pour être anarchiste ?
Ce soir tu me fais de la peine.
Écrit par : estellebeaurivage | 12/12/2010
@ Franc-tireur: oui, mais Prévost après 6 mois aux jeunesses communistes a vite viré anar de droite (mais résistant donc, bon...)
@ Estelle: pour Desproges, je maintiens, pour Luchini, tu as raison, je me suis un peu égaré... Et je suis navré de t'avoir attristé, je me rattraperais avec un plaidoyer pro quelque chose, mais je ne sais pas encore quoi...
Écrit par : Castor Junior | 13/12/2010
Prévost n'a pas été aux jeunesses communistes (elles n'existaient pas encore !) mais a adhéré aux Etudiants socialistes révolutionnaires quand il était à Normale Sup.
Écrit par : franc-tireur | 13/12/2010
Et pan sur le bec ! Et ne me réponds pas que les Castors en sont dépourvus, je le sais déjà...
Écrit par : Castor Junior | 13/12/2010
Yeah !
Écrit par : Naughty A | 14/12/2010
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