Quelques livres pour noël...

Bon, ne nous mentons pas, Nöel approche. Personnellement, m'asseyant joyeusement sur le politiquement correct et ayant réussi à convertir ma famille aux thèses de Gorz sur la décroissance, on a cessé les cadeaux pour cette année... Une victoire sur l'hystérie consumériste que j'espère reproduire pour les dix prochaines années. 

Mais toi, toi qui me lis et qui face aux luminaires de rue, aux vitrines arrogantes ne sais que répondre si ce n'est "aïe, je vais devoir faire allégeance avec le capital". Certes, mais on se calme et on boit frais; comme chaque année, tu vas pouvoir offrir des livres. Souviens toi que 28% des français ne lisent qu'un livre par an ou moins, donc tu as de grandes chances de ne pas faire doublon, contrairement aux DVD et myriades de cadeaux glacés de technologie que l'impétrant aura déjà et revendra dès le lendemain sur leprixduministre ou labaiedel'eu... 

Bon, si celui que tu vises est un peu chic, un peu hype et qu'il n'aime pas avoir le même présent que les autres, tu lui offres qu'avez vous fait de moi, d'Erwan Larher. Premier roman, petite maison d'édition, du nerf de la politique, mais sans aspirine et jargon marxiste, t'es sûr de ton coup... 

Si ton parent est très consensuel, limite chiant et qu'il ne jure que par les bandeaux des prix littéraires... Change de parent, ou d'ami. Mais bon, quand même, dans ce cas, offre lui l'excellent naissance d'un pont de Maylis de Kerangal, ça évitera d'acheter une escroquerie grimée en prix Goncourt....

Si, mieux, ta connaissance se pique d'aimer la littérature qui dérange, celle qui dit quelque chose sans avoir forcément quelque chose à dire, va sur corpus delicti de Julie Zeh. Julie Zeh c'est cette allemande  qui avait eu le cran de produire une fille sans qualités après Musil et d'y être parvenue. On retrouve cette écriture au scalpel et cette intelligence au laser ou l'inverse où, dans un monde perdu entre Gattaca et Kafka, elle invente une séditieuse en procès contre la société qui réclame le droit d'être malade, voir de fumer. Pas fumeux pour un sou, mais bluffant en diable.

Si ton ami ou parent est gros lecteur, déprimé sans être dépressif, fin sans être transparent, alors il faut foncer pour Svevo en Quarto. Personnellement, la conscience de Zeno fut une gifle; de celle que seul un Tyson courroucé peut vous infliger. Découvrir que le trentinois avait été capable de réitérer la performance d'exploration psychologique trois fois en autant d'autres romans, me mit proprement K.O.. Svevo, c'est l'anti-Berlusconi, il n'y a rien de trop, pas de pathos à la Moretti pas d'excès ou d'emphase à la Begnini, juste cette bienveillance glacée à la Tabucchi avec quelque chose en plus, une suprême analyse de l'âme humaine, quelque chose qui ressemble à la grâce, en fait.

 

 

Bon, ton ami ou parent de noël, il peut aussi avoir peur des romans, ou pas envie. Pas comprendre pourquoi on s'acharne à lire des fables quand la réalité affabule plus souvent qu'à son tour. Dans ce cas là, il y a les biographies et les essais, mais si t'offres palimpseste ça va sentir le sapin et pas seulement pour des raisons de conifères. Non, en cette fin d'année, noire, prend un truc sombre mais qui s'avale d'une lampée et ça c'est le dernier mort de Mitterrand de Bacqué qui raconte comme si elle avait tenue la crosse, la vie de François de Grossouvre jusqu'au moment où celle ci fut trop pesante pour lui...

 

 

Enfin, si ton ami ou parent aime les surprises, je ne saurais que trop lui conseiller un homme louche de François Beaune. Pourquoi une surprise ? Bah, je l'ai pas lu, donc c'est ma surprise du chef, mais une cheftaine m'assure que c'est ce qu'elle a lu de mieux cette année et elle se situe aisément dans ces 72% de français lisant plus d'un livre par an, donc, je vais la suivre.

Sinon, demain, les autoroutes se chargeront, les hottes aussi et les estomacs trembleront devant les embouteillages à venir.... Sommes nous vraiment plus stupides que ces dindes que nous gavons pour l'occasion ?