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25/12/2010

De la quasi impossibilité d'être un dandy aujourd'hui...

brummel1.jpgPour le déjeuner du 25, j'étais en fort bonne compagnie, avec des journalistes de France Culture, la percutante Cécile Guilbert et l'amusant Frédéric Rouvillois pour 40 minutes étonnantes qu'on peut retrouver là:

http://www.franceculture.com/emission-du-grain-a-moudre-u...

La question était peut-on être un dandy au féminin ? Bon, Guilbert fermait le ban en rappelant que le dandy est réac, voudrait une résurgence de l'ancien régime avec des êtres d'élite et que la place des femmes dans ces mondes implique que les demoiselles sont moins enclins à adorer le dandysme de la même façon que les crocodiles ne raffolent pas des usines de maroquinerie...

Mais ce qui caractérise foncièrement le dandy c'est son refus de la masse, et même du groupe: quand ses idées sont partagées par plus de un, il soupire. Des Esseintes, le héros de Huysmans cherche d'autres peintes et d'autres écrivains à aimer dès lors que ceux qu'il apprécient rencontrent le succès; il doit s'en séparer, ne peut tout bonnement pas apprécier des artistes appréciés par d'autres. 

A l'inverse, le snob suit désespérément ce qui fait l'élite, ce qui fait foi quoi. Le snob lit Houellbecq en espérant que ça devienne mode et lorsque cela le devient, il jubile. A contrario, le dandy lit Echenoz et Pierre Michon, et quand ils sont primés de Goncourt et de Décembre, s'en vont ailleurs vomir leur haine de l'humanité avec des auteurs plus confidentielles, dans des maisons moins connues, le culte du secret.

En écoutant cela, je me disais qu'il était quasi impossible aujourd'hui de continuer à être dandy à une époque d'affirmation du moi qui pousse certains mirmidons à l'égo inversement proportionnel à aimer leur propre statut sur facebook pour entraîner du monde avec eux... PLus personne ne voudrait avoir à tout prix les lumières loin de lui. La posture du rebelle revient très en forme, mais le pourfendeur est snob plus que dandy, il veut le succès et ne le fuit pas, qu'il s'appelle Onfray ou Zemmour ou autres... On n'aurait plus aujourd'hui des Gracq ou des le Clezio souhaitant réellement qu'on leur foute la paix. Certains s'en accommodent poliment comme Echenoz, mais la plupart court vers la mode comme des phalènes affolées par des lampadaires comme ce petit Bégaudeau....

Personnellement (l'auto-analyse étant à la mode) je m'en tartentpignole joyeusement. Je ne suis ni l'un ni l'autre et me contente d'aller là où mes goûts et mon butinage me portent... Je vomis Houellbecq car il n'y a pas de langue et aime Gavalda même si ça fait rire les snobs, j'avale toutes les oeuvres complètes de Dominique Scnhapper, non pas pour être dans une caste restreinte mais parce qu'elle a une pensée aiguisée comme un katana... Je continue à adorer Echnoz et à trouver Michon un peu chiant sans pour autant penser que je doive m'en excuser...

Au fond, sur ce sujet, je plains sincèrement tout ceux (et ils sont légions) qui continuent de s'interroger, angoissés sur les goûts qu'il "faut" avoir: peut-on vraiment trouver Proust emmerdant et pourquoi doit-on dire que Desplechin est génial... A tout ceux là, il faudrait poser au pied du sapin les 1000 pages de la Distinction chez Bourdieu et quelques libres penseurs en plus...

Demain, nous verrons si ça se réveille un peu car aujourd'hui ma promenade post-prandiale fut ponctuée de cris italiens et anglais, mais les français étaient tous au rendez-vous du réveillon...

Commentaires

Bon débat.
Il existe à Nîmes un personnage extraordinaire et que je nomme "Le Dandy". Il fait la manche sur un rond point très fréquenté. Il ne te nettoie pas le pare brise (il laisse ça aux Roms), il ne tend pas la main : il marche le long de la file de voitures arrêtées et c'est tout.
C'est un vieux mec hirsute et puant. Mais ce que j'admire par dessus tout, c'est la qualité de sa garde-robe. Une variété incalculable de haillons superposés, des bonnets aux chaussures ; des loques tellement loqueteuses que même au tri selectif on n'en voudrait pas. Des saloperies déchiquetées qu'il porte indifféremment été comme hiver et qui laissent apparaître des parties dénudées de son corps, jusqu'aux plus intimes.
Au premier secours populaire venu, il pourrait trouver du "convenable", mais lui ne veut pas être convenable : il veut être "distingué".

C'est ça le Dandysme

Écrit par : estellebeaurivage | 26/12/2010

Clap Clap Clap ! Merci Estelle, c'est uniquement pour cela que j'avais laissé "quasi" dans le titre; pour qu'on me signale un personnage digne de Gainsbourg qui donnait chaque matin ce qu'il avait dans sa poche à un pochard (100, 200f) en lui disant "c'est tout pour boire, rien pour manger"...

Écrit par : Castor Junior | 26/12/2010

A défaut d'être dandys en force, restons dindons de la farce.

Écrit par : r1 | 27/12/2010

@ R1: je pourrais aussi faire un post "de la quasi impossibilité de ne pas être les dindons de la farce..."

Écrit par : Castor Junior | 27/12/2010

Quand je pense que je suis en première année de Master de Lettres Modernes et que je fais Mon mémoire sur le dandysme ... Je sens que vous allez nourrir mon sujet pour encore bien logtemps =)

Écrit par : Sabiskote | 11/01/2011

L'un des derniers billets du Chouan des Villes traite du dandysme également...

Écrit par : Dan | 24/11/2011

Les commentaires sont fermés.