12/11/2011
Renouveler les déchets, c'est bien, ne pas renouveler les dirigeants ça craint
Détournement quand tu nous tiens. Mais là encore, je m'excuse en précisant que, si comparaison n'est pas raison, le piratage d'un slogan culte de la Sécurité Sociale peut faire sens. En effet, la réclame alertait sur ceux qui abusent du système en fraudant ou en s'absentant du travail trop souvent. Le discours actuel continue de le matraquer, mais avec moins de nuances: haro sur les fraudeurs sociaux ! Soit, ça n'est pas bien. Mais il a été reconnu par la Cour des Comptes que la fraude fiscale a des conséquences financières dix fois supérieures et là, l'objurgation est bien discrète.
Et si notre démocratie hexagonale était avant tout malade de cela ? Jusqu'au dérapage comme l'imbécile sortie de Montebourg cette semaine, qui s'est trompé de colère en réclamant la mise au pas des élus de plus de 67 ans. Des propos discriminants au plus haut point, quand son raisonnement lui même ne visait pas l'âge, mais bien la durée de mandats. 75 ans, si on a commencé sa vie politique après 40 ans dans le civil, à 60 ans, ce n'est pas nécessairement un drame. Mais 55 ans, quand on est élu depuis 30, c'est plus pénible. Or, la tendance actuelle est bien celle-ci. L'Assemblée élue sous Mitterrand I, en 1981 traduisait l'éclosion d'un renouvellement que nous n'avons jamais retrouvé. a moyenne d'âge au Palais Bourbon était alors de 40 ans. Elle est aujourd'hui de plus de 55 ans car il est très délicat de déraciner ceux qui sont en place. Il faut à chaque fois des coups de force, des résultats inattendus pour renouveler le personnel politique. Ainsi des européennes 2009 où le score d'Europe Ecologie a porté quelques nouvelles figures aux responsabilités. Fors cela, on se fige dans une reproduction à l'identique toute digne d'Huxley.
Ne pas renouveler notre personnel politique est condamnable moralement, bien sûr, mais c'est surtout un drame puisque ceux qui nous représente, endogames au plus haut point, sont empêtrés dans une logique mainstream, n'en connaissant pas d'autres. Ils ont tous le même totem, le AAA et s'auto-persuadent du vomitif et confiscatoire idéologie TINA (there is no alternative) qui constitue le summum de la violation démocratique. S'il n'y a pas d'alternative, alors arrêtons le débat et retournons en dictature... Le non renouvellement pousse toujours les mêmes idéologiquement et toujours les mêmes physiquement, empêchant les femmes d'être promues. 40 ans de lutte et toujours seulement 18% de députées ? Idem pour le renouvellement, appelez cela "minorité visible" "diversité, mais comment expliquer que pour plus de 500 députés en Métropole, une seule (Georges Pau Langevin) en soit issue ? Tout cela concoure à créer de la désespérance. C'est grave, mais il y a pire.
Il y a pire dans la mesure où le privé s'aligne dessus joyeusement. Un Didier Lombard auteur de la pire politique de management chez Orange trouve une semaine après un très beau strapontin au CA de ST Microelectronics. Idem pour Daniel Bouton de la Société Générale, des homologues du Crédit Agricole, ou encore de Desmarets qui gérait Total lors de l'Erika... Tous se recasent joyeusement en couronne. Pas un seul des dirigeants de banques qui ont causé le crash sans précédent de 2008 n'a été condamné, quelle justice ? Si l'on revient en politique, comment continuer à être crédible quand on accable de tous les maux le dealer de rue où celui qui vole des conserves dans un supermarché quand Bernard Tapie revient triomphalement avec 300 millions d'euros, quand Patrick Balkany revient à l'Assemblée Nationale après avoir obtenu des faveurs sexuelles sous menace d'une arme et corrompu la moitié de sa ville, que Manuel Asechliman maire d'Asnières condamné compte revenir et l'on pourrait continuer la liste ad nauseam mais je n'y tiens plus...
In fine, cela conforte le nouveau clivage qu'a dramatiquement fait émerger la crise de 2008 : non plus entre droite et gauche, comme cela devrait être le cas, mais entre puissants et humbles. La ploutocratie contre la démocratie. Sans un renouvellement sain, cela ne peut bien finir. On l'a compris pour nos déchets où nous renouvelons pour éviter le trop plein. Filons l'analogie et tirons en les conséquences avant qu'il ne soit trop tard...
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