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30/07/2012

Les valeurs du sport, cette auberge espagnole

pince-attrape-tout-100-cm.jpgQue les sportophobes relativisent. Ce ne sont que 15 jours tous les 4 ans. Mais dans ce laps de temps, plus rien d'autre ne compte: la planète vit au rythme des JO. Nichés au coeur de l'été, au moment où l'actu prend ses quartiers de la même saison, toutes les colonnes, écrans et ondes saturent et vomissent de l'olympie en continue. Pour qui prend la peine d'écouter les paroles en plus de regarder les images, le régal est infini. Cette année déjà chargée avec un championnat d'Europe des Nations en foot, puis le traditionnel tour de France, va changer de dimension l'espace de deux semaines. Les J.O., l'événement planétaire par excellence a l'énorme avantage d'être infiniment plus consensuelle que la coupe du monde de foot.

La coupe du monde c'est un peu la fête, mais tout de même des affrontements nationaux un peu violents et beaucoup d'argent. Les J.O., c'est l'occasion pour tous les peoples, les politiques et les autres sportifs eux mêmes, d'aller célébrer : "Les valeurs du sport". Qu'on se le dise une bonne fois pour toutes, les valeurs du sport n'existent pas. Elles sont ce que l'on souhaite et qu'on en fait, aussi bien les ridicules écarts de langage et de comportements de nos footeux que "l'école de la vie" sobriquet que l'on prête souvent au judo. 

Or, dans les J.O., ça n'est que cela pendant 15 jours, chacun n'y prend que ce qu'il veut. Le miroir déformant nous mène vers tous les gentils athlètes. Coup de bol pour la France, elle excelle dans des sports où l'argent et le dopage gangrène peu : natation, escrime, judo. Il y a une réconciliation nationale éphémère autour de ces soutiers que l'on méprise tout le reste du temps car ils sont quantité négligeable de ceux qui pratiquent du sport en France (les 3 fédés réunies sont loin très loin d'atteindre le nombre de footeux). Pendant 4 ans, à quelques exception près (Manaudou, Agnel, Riner ou Flessel) on ne voit pas ceux qui s'entraînent avec des petites bourses, pas de sponsors, qui voyagent en car... Mais là, pendant 15 jours, nos politiques se pressent pour venir les encenser, mieux les autres sportifs surpayés comme les tennismen louent les vertus de l'olympie (tout en menaçant de faire grève si on ne revoit pas à la hausse leurs prochains cachets....). Bref, pendant 15 jours, tout le monde jouent un concert lénifiant de gentillesse: les jeux ne seraient que de l'amour, de la réconciliation entre les peuples, les religions et autres. A se demander comment le sport n'a pas encore ramené partout la paix dans le monde...

Ce qui est amusant, vraiment, c'est la faible attention portée à d'autres aspects des jeux. Ainsi, dès l'ouverture, samedi, Vinokourov fut sacré champion olympique de cyclisme. Un homme qui fut reconnu coupable de dopage avec transfusion du sang d'un autre homme pendant (!) le tour de France 2007. Un homme qui a fondé une équipe (Astana) avec l'argent d'un sulfureux dictateur pour assurer la promotion de son pays. L'olympie... Par ailleurs, une athlète (sprinteuse) autrichienne, suspendue et exclue par sa fédé pour dopage. Pas une ligne. Avant les jeux, une triple sauteuse grecque avait été exclue pour cause de commentaires racistes sur son compte Twitter (une histoire de moustique du Nil qui allaient pouvoir manger africain, tordant). Et nous n'en sommes à l'évidence qu'aux débuts. L'histoire des olympiades précédentes est émaillée de sautes d'humeurs, de tensions entre supporters, entre athlètes, de corruption... Non, mais la corruption, sans rire, lorsque l'on voit le montant (plusieurs dizaines de millions d'euros) chopés par Samaranch père et fils, ancien président du CIO et retrouvés comme par enchantement en Suisse. Olympie ? L'important c'est de participer pour certains, d'empocher une participation, pour d'autres... Tous ces passe droits accordés, cette débauche de luxe pour certains, les budgets faramineux accordés pour le village olympique accordé sans sourciller par David Cameron, le même qui a supprimé 20% des bibliothèques du pays pour raisons budgétaires. On ne croit pas rêver, on cauchemarde bien.

En attendant, nos nageurs nous ont apportés les deux premières breloques dorées, marseillaise de rigueur. Et puis il faut reconnaître que ça occupe bien, avant le départ en vacances. Ayant la chance d'aller bientôt très loin, je relativiserai l'importance des jeux depuis ce pays qui compte, d'après internet, une délégation de 18 sportifs. Ouais, l'important c'est de participer... 

26/07/2012

"Guérir les homos" ? Difficile d'en gay rire...

charlatan.jpg

Le progrès est vraiment, vraiment, une longue marche. Je sais bien que le passage de Jean-Louis Bory en direct sur Antenne 2 pour parler de son homosexualité, en insistant bien sur le fait qu'il ne s'agit pas d'une maladie, avait déclenché un véritable tollé auprès de la chaîne. Toutes ces lettres indignées, ces appels exaspérés aux dirigeants "évidemment que c'est une maladie". C'était il y moins de 40 ans, peu après qu'il a révélé son homosexualité dans "ma moitié d'orange" et qu'il prit part à tous les combats du FHAR. Depuis, les choses ont tant évolué en la matière que mes étudiants de 2012 peinent à me croire quand je parle de Jean-Louis Bory. Je les aide à relativiser en rappelant que dans 90 pays l'homosexualité demeure un délit passible de la peine de mort. Parfois, "juste" de prison. Je ne veux surtout pas enjoliver, dire que tout va bien, on parle d'étudiants, donc après le bas et à Paris.

Des zones noires, il en restent. Géographiques - tous les quartiers difficiles, j'imagine que la mentalité montagnarde n'est pas toujours propice...- professionnelles (sportif, l'armée, les chasseurs et autres) et plus globalement, toute la population est concernée par certaines dérives langagières ; "fais pas ton pédé" peut ainsi aisément signifier au choix "ne rentre pas déjà te coucher" ou "finis ton verre", renvoyant chaque fois au manque de courage supposé des homosexuels. Bien sûr que cela persiste. Mais quand même. Mon neveu de 10 ans me disait récemmetn, "non mais en fait je crois pas que je sois homosexuel, je peux me tromper, mais vraiment, je crois pas". 10 ans, et déjà il pressent bien que ce n'est ni une maladie, ni un choix, mais une évidence. Comme disait Karl Lagarfeld dans le film qui lui avait été consacré (oui, je sais, mais bon, chacun son truc) "je ne me suis jamais posé la question, un matin je me suis rendu compte que j'étais attiré par les garçons, voilà". Certains suivent clairement leurs inclinations d'autres refoulent plus ou moins à cause de critères sociaux, de familles et autres. Je sais cela. Mais je pensais qu'en même, en France, en 2012, au pire, on se cachait un peu pour aimer. Naïf que je suis...

Donc, en cette France de 2012 où la question semble de moins en moins clivante, puisqu'aujourd'hui les débats portent sur le mariage et l'adoption,  on tombe sur ce genre d'article: http://www.lepoint.fr/societe/un-stage-pour-guerir-les-ho...

Pour ceux qui ne l'ont pas lu, une association protestante sobrement baptisée "Torrents de vie" propose moyennant 400 euros de vous guérir de votre homosexualité. Pour les couples, il vous en coûtera 700 euros pour aller "vers une sexualité réconciliée". Cette saloperie prospère en Australie, en Suisse et évidemment aux Etats-Unis. Des pays très libéraux où il est fort délicat d'interdire. Chez nous, en revanche, où l'on sait si bien affirmer une rigidité à l'égard de tout ce qui ne rentre pas dans notre boîte républicaine, on a donc laissé faire ça avec nos amis catholiques pour louer les locaux où se tinrent ces joyeuses réunions. Non, mais on se pince... On opposera que la tenue de ce stage n'est que marginale, que l'ordre moral ne peut être partout et surtout que le fond du projet de stage est d'essence spirituelle... Il n'empêche : on a bloqué tout le pays, lancer un grand débat avec barnum itinérant et surchargé l'assemblée de décrets pour 400 femmes voilées, eu égard à cela on pourrait peut être prendre 10 minutes pour trouver le texte idoine afin de punir sévèrement ceux qui proposent ce genre de distractions à leurs ouailles. Par exemple interdire leur existence associative, les poursuivre au pénal pour objet illicite de formation ou autre. 

Devant tant de médiocrité, je m'en vais retourner lire un Jean-Louis Bory, pourquoi pas "voir les passants ou les miettes célibataires". Un style si aérien que cela me réconciliera avec cette époque encore souvent mal embouchée.

 

 

25/07/2012

Une époque in girum imus nocte et consumimur igni

pt27227.jpgC'est un de ces longs articles déprimants. D'autant plus déprimants qu'ils sont longs, instruits et documentés. Implacables. Le titre, déjà : "l'évasion fiscale dans le monde pèse plus que le PIB de la France". Soupir, immense. Face à cela, on est pris d'effroi tant on sent les vaines marges de manoeuvres de nos politiques nationaux.

L'article peut se retrouver ici : http://www.lemonde.fr/economie/article/2012/07/23/l-evasion-fiscale-mondiale-dix-fois-le-pib-de-la-france_1736985_3234.html

Il évoque au mieux le cynisme de quelques uns, au pire l'espèce d'éternelle folie qui s'empare de ceux qui veulent faire de la possession leur unique destinée. Cela m'a évoqué une lecture d'il y a quelques années, couplée au visionnage du film du même auteur : Guy Debord. Le titre est tout un programme et le plus long palindrome (qui se lit dans les deux sens) que je connaisse: in girum imus nocte et consumimur igni. Nous tournons en rond dans la nuit et nous nous consummons.

L'époque évoque cela, une éternelle course confuse en milieu liquide. En bas, des masses de plus en plus nombreuses qui payent pour les conneries de ceux du haut en assumant collectivement les sinistres. En haut, une élite qui elle aussi enfle - dans des proportions moindres, mais tout de même - sans savoir quoi faire de ces milliards et même quand elle se fait très peur (en 2008) elle trouve le moyen de se renflouer via les dettes souveraines des états. Les chiffres avancés par Piketty sur la croissance de Bill Gates ou Bettencourt donne envie de vomir en ces matins où PSA confirme qu'il va vraiment fermer PSA. Et tout cela, il le font sur fond de gentillesses publiques. 

Le mythe de l'Etat-Nation, un des plus brefs de l'histoire de l'humanité puisqu'il n'aura même pas tenu trois siècles, s'effondrent dans tous ces états confettis qui les accueillent. Les propos d'Antoine Peillon (le frère du ministre) déroutent, achèvent et poussent à lire son livre : 600 milliards qui manquent à la France. De façon très impressionnante, il montre comment chaque année, 1/6 du budget de la France prend la fuite. Les 600 milliards sont répartis sur plusieurs années, pour faire un titre impressionnant. Mais tout de même, chaque année, pour moitié les entreprises et pour moitié nos ultra riches grugent la France qui lui donne tant en termes d'avantages fiscaux. Juste sous son nez, puisqu'1/3 du total se barre en Suisse...  

IL faut écouter Peillon (quelle famille !) dans l'article on retrouve un lien vers une interview de lui sur France Info. Les sources pour arriver à cette enquête sont également fort instructives. A l'évidence, ce ne sont pas les Bettencourt, Arnault, Pinault ou Margerie qui se sont précipités pour révéler les zones opaques de leurs RIB. Non, si aujourd'hui la vérité commence à sortir sur ces chiffres rocambolesques c'est que les juges, les pandores spécialisés et de plus en plus de banquiers honteux, passent aux aveux. On sent un système se fendiller, mais pas prêt de vaciller pour autant. Re-soupir...

Edit 9h50 : de retour de jogging, couru une heure avec un des tout chefs de la BNP m'expliquer des horreurs sur les scandales actuels; Appolonia qui enfoncent des gens de peu en abusant de leurs étiquettes de banques mutualistes (Crédit Mutuel) ou le Libor de Barcalay's où mon ami m'explique à demis mots que nous n'en sommes qu'au début car, pour que de tels abus aient pu avoir lieu c'est qu'il y eut association de malfaiteurs, peu ou prou... Et c'est reparti pour un tour de manège désenchanté.