22/05/2013
Le film dont l'Elysée est le héros
Je suis allé voir ce film comme j'ai voté pour Hollande au second tour : en traînant des pieds. Je savais par avance que je serai déçu. Du coup, ça a presque raté... Autant Hollande arrive à me décevoir (même si j'en attendais peu, il est pire que prévu), autant le film de Rotman dont je n'attendais pas plus, m'a parfois appris des choses. Ou invité à la réflexion. Je tiens à préciser que c'était une obligation professionnelle et que fors cela, le documentaire ne restera pas dans les annales...
On pourrait gloser sur ce qui a déjà été écrit sur ce film : mal filmé, mal monté, musique grandiloquente et ridicule (de Michel Portal), mal fagoté quoi. Bon, mais allons quand même au delà.
Le Pouvoir, nous dit-on doit être le héros. Cela est réussi. Le film n'est pas sur Hollande, il est un second rôle très présent. Le plus frappant en sortant de ce film, c'est que L'Elysée est le héros et que les institutions restent. Les pesanteurs royales, le temps suspendu, les lambris abondants. Mais le film n'aurait pas été radicalement différent avec Chirac, Sarkozy ou Mitterrand. Outre Hollande, donc, on voit un peu le gouvernement (j'y reviendrai) et beaucoup les conseillers. Au fond, dans les instituions, il y a des constantes : Lemas, le secrétaire général, a la confiance absolue et se prend régulièrement des soufflantes que seuls tolèrent les amis comme hier Guéant. Aquilino Morelle balade sa morgue ravie et se tient à distance pour mieux intriguer comme hier Guaino. Il y a aussi celui qui crève l'écran, Emmanuel Macron, le jeune banquier venu de chez Rotschild et qu'Hollande ne coupe jamais. Là, je n'ai pas d'équivalent dans le quinquennat antérieur, je crois plutôt qu'Holande a cherché son Attali, qui fut d'ailleurs (et il le rappelle) la figure qu'il a le plus impressionné quand il entrait en Mitterrandie. Heureusement, les institutions ne font pas tout. Louvrier sous Sarko était un redoutable manitou des images. Là, Christian Gravel est une espèce de ficus bodybuildé, mais son action et sa réflexion s'arrêtent là...
L'autre point, tout de même, je n'ose dire point de détail, c'est Ayrault. Parfois je trouve les critiques journalistiques un peu rudes. Il parle du côté terne, prof d'Allemand, qui revient toujours. Je sens une forme de snobisme mal placé à l'encontre de notre chef des ministres. Mea culpa. Après le film, on se dit que les attaques au lance-flammes sont très en deça de la réalité. Cet homme n'a pas l'étoffe d'un chef cab' de sous-préfecture. Il est pitoyable, déplorable, lamentable et consternant... Les quelques échanges où il parle avec Hollande sont pour le spectateur des moments de sidération. Ca doit être vrai, Hollande ne veut pas qu'on le conteste, il veut habiter la fonction à son rythme sans avoir quelqu'un qui le presse. A cette lumière, peu de risque qu'il choisisse Martine Aubry pour lui succéder...
La dernière chose qui doit faire réfléchir les trop pressés, les impétueux où les sarcastiques à l'encontre d'Hollande: pépère ne l'est pas tant que ça. Il y a sa dégaine plouc, entre manches sorties et cravate de travers. Il y a ses colères très feutrées, sa vigueur rentrée. Pour la forme. Dans le fond, le film montre bien que sur les choses les plus anodines (la photo de Depardon) comme dans les échanges avec les ministres (surtout Mosco) il écoute, mais dès qu'il entend quelque chose qui ne lui sied pas, il tranche. Net. Il peut bien faire toutes les synthèses qu'il veut aujourd'hui, pour 2017, il ne se donne pas perdant, monsieur "le garant du temps long"...
08:38 | Lien permanent | Commentaires (0)
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