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26/05/2014

Le vote sale gosse

4262807a.jpgAu-delà de toutes les explications des sondeurs et politistes sur la montée du vote frontiste, j'hasarde une toujours périlleuse explication psychologique. Et si, dans le renouveau d'un FN dédiabolisé, il y avait une hausse du vote sale gosse ? La figure de proue en serait Florian Philippot. Archétype de la pensée unique détesté aujourd'hui, il prend un malin plaisir à casser son pâté de sable sans réfléchir aux conséquences. Diplômé d'HEC et de l'ENA, homosexuel non déclaré, mais non niant il est pro mariage pour tous mais pas au point de s'afficher en faveur de la mesure, pour l'euro mais en détaillant le taux de change, pour une certaine forme d'immigration, mais pas trop forte...

Bref, Florian Philippot, avec 2/3 gifles et quelqu'un qui l'aurait aidé à résoudre son problème de déficit narcissique, serait au PS (il a d'ailleurs commencé chez Chevènement) ou à l'UMP. Comme toute la nouvelle élite du FN qui s'est rué sur le seul parti permettant des ascensions professionnelles express. On voit débarquer aujourd'hui au front des énarques, des technocrates sans convictions mais voyant là une nouvelle auberge avec plus de lits disponibles que les grands partis. Pas racistes pour un sou, il accepte de se boucher le nez et de fermer les yeux sur la réalité d'un parti qui reste éminement raciste et surjoue les voyous à la radio ou à la télé. Entendre Philippot, ce gentil scout, parler de fermeté, on croit rêver... Quand on entendait Pasqua évoquer les rétorsions, on tremblait pour les immigrés, mais Philippot... Il joue, il se goberge, il jubile et depuis hier il touchera un gros chèque mensuel de cette Europe qu'il vomit... Des leaders sans âmes comme cela on permis de libérer tous les pauvres hères français et les guider vers le bulletin honni. Tel le joueur de flûte de Hamelin, il séduit les électeurs, leur fait croire que leur vote sera pur et sans haine. Dans la fable, les rats finissent à l'eau. Chez nous, ce sont nos institutions, notre croyance dans le politique et notre capacité à faire collectif qui s'effondre à cause de certains sales gosses qui aiment à animer des peurs factices pour leur seule jubilation égoïste... 

22/05/2014

Lost in Responsibility

12063288-large.jpgJ'ai une amie chère à la Société Générale, arrivée après Kerviel. J'ai un ami cher qui a longtemps frayé chez Bygmalion. Dans les deux cas, cela alimente les discussions narquoises lors de mes dîners en ville... J'imagine même que l'adjectif choisi pour parler de ses amis peut faire sourire. Cher, démesurément cher même. Pourquoi se priver puisqu'il s'agit de boîtes où l'on peut tout pigeonner et se servir ? Je dois être aussi con, n'ayant jamais empoché 1 euro de leur part. Ils doivent être encore plus bête que moi, n'ayant pas profité des prébendes de leurs entreprises respectives, malgré de beaux postes...

Si je mets les deux sur le même plan c'est que dimanche dernier a été rythmé par les frasques du marcheur Kerviel et les folies facturières de Bygmalion. Dans les deux cas, cela concerne des individus isolés, un peu fous, mais au final, le déficit d'image concerne 150 000 personnes dans un cas, et une caste (les communicants, les politiques) de l'autre... Et ça commence à gonfler. Je ne sais plus la formulation exacte, mais Ricoeur écrivait grosse mode que l'irresponsabilité est anonyme quand la responsabilité s'incarne dans quelqu'un. Or, aujourd'hui, nous vivons une crise sans précédent de la responsabilité. Lorsque nous dénonçons sans fin des "systèmes" et autres "mécaniques" déraillantes, leur point commun tient justement à leur inhumanité à part quelques accidents. Madoff et Kerviel vont dormir en prison, mais quid des autres responsables, irresponsables plutôt qui ont laissé une finance aveugle, machinisée, sans borne ni éthique, spéculer sur les matières premières ? Ceux là ne sont pas en prison. Ni même au chômage, ils se sont recasés gentiment. Mieux, nombre d'entre eux viennent donner de doctes leçons sur les meilleurs moyens d'encadrer la finance sur les plateaux de télé... Idem pour l'écologie : des conférences et des sommets, mais quand on voit le sixième continent (formé par un agglomérat de déchets entre le Pacifique et l'Indien) impossible de boucler quelqu'un. Pire, le patron de BP ou de TEPCO ont sauté suite aux catastrophes du Golfe du Mexique et de Fukushima, mais guère plus. Le Rana Plaza où 1500 travailleurs ont perdu la vie pour avoir voulu fabriquer des fringues low cost, idem. Personne ne s'occupait de cet immeuble. Mais quelqu'un devait bien empocher la marge nette...

Mêmes les plus libéraux, même les fans de Rawls s'accordent sur l'importance de l'égalité devant la loi pour que la société fonctionne. Seule des sanctions pénales fortes permettront de faire avancer les causes sociales et écologiques seules la condamnation exemplaires des vraies personnalités coupables permettra de remédier au "tous pourris". Dimanche, ce sera la kermesse de l'irresponsabilité dans les urnes, le grand défouloir. Espérons que cela amène au moins un sursaut pour la suite...

17/05/2014

Le côté obscur de la guerre des clones

cote-obscur-300x200.jpgLa vie vaut tellement la peine d'être vécue quand on vit des moments tels que j'ai pu en vivre hier. Si l'on met de côté le léger inconvénient qu'il y a à se cogner un aller/retour Paris/Colmar dans la journée pour un petit 6h de transport, j'ai passé une journée merveilleuse. Avec 2h de rencontres avec 70 lycéens de terminale et mon comparse Saïd Hammouche en apothéose de l'escapade alsacienne.

Notre venue résultait de la volonté forte d'une prof de MUC (management des unités commerciales) qui pense que l'école doit être un lieu de débat ouvert sur la cité, de démythification, de délcoisonnement. Nous sommes arrivés devant une grande cité scolaire, située en ZUS. Comme le disait les profs, "en arrivant au lycée, on ne se rend pas compte qu'on est en ZUS". Zemmour et Finkielkraut seraient malheureux. Dans les 1300 gamins qui fréquentent l'établissement, beaucoup de non souchiens comme ils disent, des couleurs plus nombreuses que les pâleurs et pourtant peu de décibels supplémentaires, pas de rap assourdissant devant l'établissement, pas de ton comminatoire entre les uns et les autres et même pas de shit (moi qui me serait bien détendu après une grosse semaine, mais passons). 

Après un déjeuner avec les deux professeurs (l'autre enseignant la philo) nous nous sommes lancés dans l'arène, une salle surabondante. Seconde défaite pour les réacs : on a pu échanger pendant deux heures dans un calme remarquable, sans consultation de téléphone ou non. Seul un jeune homme dessinait avec concentration, mais lorsqu'il est venu me voir à la fin pour faire signer notre ouvrage, je puis attester qu'il avait fort bien suivi les échanges.

Les questions fusaient. Classiques "vous êtes riches ?", "vous êtes pour les quotas ?", "vous croyez vraiment qu'on peut changer les choses ?". Plus inattendues, "vous pensez qu'on peut remplacer le capitalisme ?", "comment faire pour renverser l'image de mon quartier sur mon CV ?". Puis vint la question délicate, la vraiment inattendue, l'uppercut au foie. Le jeune homme était tout près de nous, à côté de son voisin qui tenait l'Ipad pour filmer l'intégralité de la rencontre avec un sérieux incroyable (sa réalisation, pas forcément la rencontre). Il avait un parlé un peu heurté, mâtiné d'alsacité dans les aigus. Après la rencontre, il vint lui aussi demander une dédicace et devant mon étonnement à l'écoute de son prénom il me révéla être d'origine albanaise. Ce que je n'aurais su dire à l'aune de sa question : "vous parlez tout le temps de la couleur de peau depuis tout à l'heure. Mais les français comme moi ont besoin d'être aidé aussi, non ?". Impensable de laisser passer ça. Insister sur le fait que les autres sont tout autant français, nonobstant leur non appartenance à la blanchitude dominante. Et le rassurer, revenir et expliquer les phénomènes de discriminations qui résultent souvent d'inégalités agglutinés, sédimentées, supersposées. Lui dire que dans les quartiers les plus populaires, souvent le blanc se fait plus rare. Que dans le très beau livre d'Aymeric Patricot on peut voir qu'il est même parfois seul et à ce titre ostracisé, ce qui est tout autant condamnable que le racisme ordinaire. Le calme est revenu, nous avons son attention et il se laisse embarquer dans notre exposé sur la guerre des clones à mener. Mais tout le monde ne dispose pas du luxe du temps nécessaire de la pédagogie, lorsqu'on se retrouve englués dans l'immédiateté, ces nuances ne passent pas et on bascule du côté obscur de la guerre des clones. Des personnes persuadés que la lutte contre la discrimination consiste à enlever aux blancs pour tout donner aux noirs et aux arabes par mauvaise conscience. On ne doit pas les tancer ou les blâmer mais retrouver les espaces où le temps de la pédagogie existent. Ca doit quand même être une utopie réaliste, bordel.