23/01/2016
Ne laissons pas le revenu universel aux libéraux !
Comme disaient nos regrettés dessinateurs de Charlie, c'est dur d'être aimé par des cons. En l'occurence quand j'ai vu les élans d'amour de Gaspard Koenig pour le revenu universel, j'ai vu déferler la lame libérale sur le revenu universel qui, si nous ne sommes pas vigilants, sera balayé par la pensée mainstream avant que nous n'ayons eu le temps de dire ouf... Alors que je soupirais profondément devant son navrant plaidoyer, je me suis renseigné sur l'identité des nouveaux hérauts de la lutte pour le revenu de base. Et quelle ne fut pas ma stupeur de découvrir l'amoureux des belles lettres, celui qui déclare que Zadig et Voltaire (sic) est son oeuvre favorite, Frédéric Lefebvre, se déclarer en faveur de cette revendication historique de la gauche. Soit j'avais trop bu, soit on me prenait pour un con et étant généralement sobre avant 18h, j'ai opté pour la seconde piste et me suis dirigé vers ma bibliothèque pour voir à quoi cette farce me faisait penser.
Eureka ! Dans leur magistral essai le nouvel esprit du capitalisme, Chiapello et Boltanski montrent parfaitement comment la matrice patronale a, avec une habileté indéniable, recyclé tous les maux d'ordre de mai 68 ; autonomie et liberté en premier choix, pour en faire leurs chevaux de bataille. Saisissant vertige de penser que l'autonomie de Castoriadis, Deleuze ou Baudrillard a pu être la mère des réformes de Sarkozy à l'université. Ce parallèle doit nous servir à méditer ce qui nous attend et ne pas croire que ces personnes à nos côtés dans la bataille sont nos alliés.
Le patronat a repris les mots d'ordre et avant de les mettre en avant, les a soigneusement évidés, détournés, essorés de sorte que les promoteurs de la liberté et de l'autonomie en ont perdu leur autonomie, à l'exception notable de Daniel Cohn Bendit, mais respectons la convention de Genève et ne tirons pas sur l'ambulance.
C'est le même détournement qui nous menace : l'idée initiale du revenu de base, c'est le partage. Partager le temps, les ressources, les compétences, les emplois... Sans doute un peu utopique, l'idée fait son chemin mais s'appuie sur des valeurs communautaires et d'entre-aide très fortes. Ca n'est pas une fin en soi et certainement pas une logique d'allocation. Il y a des tas de préalables et de dimensions sociales fortes, faute de quoi ça n'est rien. Ce rien, c'est ce que poussent Lefebvre et Koenig reprenant la notion foireuse et floue de "revenu citoyen" de Dominique de Villepin. Que nous disent-ils les ultra libéraux ? Surtout ne réfléchissons à rien sur l'ineptie de notre système actuel qui produit de la richesse à vide, de la valeur monétaire sans valeur sociale avec une inégalité de plus en plus affirmée et pour éviter les Jacqueries et les soulèvements de pauvres hères, passons à un revenu qui leur permet de glander devant la télé. Quelques doctes économistes chiffrent le problème et décident qu'à 800 euros par mois, on fait pas chier, on ne vole pas de sac et ne frappe pas les gens, on glande devant la télé et on laisse les traders et autres margoulins tranquilles. Le pied, quoi ?
Si c'est véritablement cette option qui l'emporte alors nous aurons perdu toute foi dans une possibilité d'autre chose, de redistribution, de partage, de redéfinition de la valeur collective et nous aurons réalisé l'utopie de Friedman et des empereurs romains : du pain et des jeux, mais sans intempérie pour gâcher les récoltes et avec des jeux en continu. L'assurance que plus jamais la plèbe ne suive un nouveau Spartacus....
18:08 | Lien permanent | Commentaires (29)
Commentaires
"les maux d'ordre de mai 68 " ; humour vache !
Écrit par : Père Castor | 23/01/2016
"la notion foireuse et flou " ; " flouE " conviendrait mieux
Écrit par : Père Castor | 23/01/2016
"l'idée initial du revenu de base" ; initialE svp !
Écrit par : Père Castor | 23/01/2016
"Le patronat à repris" : a sans accent svp !
Écrit par : Père Castor | 23/01/2016
"les traders et autres margoulins tranquille." S !
Écrit par : Père Castor | 23/01/2016
"En l'occurence " ; il manque un "r" ...
Rien de bien grave ; un peu d'alcool après 18 h ...
Écrit par : Père Castor | 23/01/2016
"c'est dur d'être aimé par des cons." : bien des filles le pensent sans nécessairement le dire ...
Difficile ou facile ?
Écrit par : Léo | 23/01/2016
Les aléas du recyclage des idées , bonnes ou mauvaises :
La démocratie grecque , idée faussement bonne ( admet l'esclavage , n'autorise pas le vote des femmes ...) recyclée en démocratie moderne , celle qui nous est chère .
Une bonne idée , pure, généreuse , le socialisme , recyclée en PS ...
Écrit par : Jean | 23/01/2016
"l'idée initial du revenu de base, c'est le partage."
Les " partageux " disait-on naguère péjorativement des communistes et socialistes spontanés , purs ; il faudrait reprendre cette appellation dans un sens positif .
Écrit par : Père Synthèse | 23/01/2016
"L'assurance que plus jamais la plèbe ne suive un nouveau Spartacus...."
Spartacus était une vedette de la télé romaine .
On peut inciter la fraction la plus militante de la plèbe à suivre un Spartacus afin de pouvoir l'exterminer aisément ; c'est d'ailleurs ce qui s'est passé .
Écrit par : Bernard Kouchtard | 23/01/2016
"Ne laissons pas le revenu universel aux libéraux !"
"Libéral : un terme positif et chargé d'espérance (1830...) qui évoque désormais le mal suprême ...
Un de ces détournements dont s'indigne Castor .
L'un des personnages les plus sympathiques de la Charteuse de Parme est un " libéral" ; Stendhal doit se retourner dans sa tombe du cimetière Montmartre
Un autre exemple ; " gauchiste " péjoratif sous la plume de Lénine ( " le gauchisme , maladie infantile du communisme " ) est devenu positif en 1968 ...
Écrit par : Mentor | 24/01/2016
----> Père Castor : j'avais compris que vous renonciez à recenser les fautes d'orthographe et de syntaxe de Castor , tel un insti de la IIIè république; il n'en est malheureusement rien .
L'intégrisme en expression est à la fois démodé , discriminant et réactionnaire ; intéressez-vous svp plutôt au fond et au sens qu'à ces détails sans importance .
Écrit par : Johanna | 24/01/2016
Avec quelques camarades de la Douceur Angevine , j'aide les élèves de l'école voisine à rédiger leurs devoirs et à apprendre leurs leçons ; l'un de ces jeunes s'est plaint de l'alphabet qui, selon lui , comporte trop de lettres , dont certaines sont inutiles ex : le W qui fait double emploi avec le V , le Y avec le I , le P avec le V , le S avec le Z le D avec le T ...
Cette remarque nous a , je l'avoue , troublés ; à la réflexion , elle ne manque pas de pertinence .
Écrit par : Octogénie | 24/01/2016
Mille fois d'accord avec Johanna et Octogénie : le purisme en expression est inégalitaire et réactionnaire
Je proposerais volontiers à Nadia Belkacem de réduire le nombre de lettres de l'alphabet : de 10 % pour commencer .
Il serait judicieux aussi de mettre fin aux genres : masculin, féminin , c'est dépassé !
Écrit par : Séraphita | 24/01/2016
Emrprunts abusifs , détournements de concepts : manifestation possible d'une connivence de fait ( consciente ou non ) entre des camps officiellement ennemis .
J'incline à penser que le libéralisme sauvage à la Macron et l'idéalisme de la gauche bisounours en indignation permanente se complètent parfaitement : souvent même sociologie , même goût pour la com , mêmes références anglo-saxonnes .
1968 : les rejetons de bourgeois qui se " révoltent" contre leurs parents sans renoncer aux privilèges qu'il tiennent d'eux .
Ce n'est pas parce que Raymond Aron l'a dit ( " la Révolution introuvable" ) ni que Zemmour le rabâche que c'est faux.
Écrit par : Léo | 24/01/2016
Un autre détournement, et de taille : l' "Internationale" du temps de Jaurès recyclée en " mondialisation" dite ( par Castor et autres) "llbérale" ...
Écrit par : JC Jaurrass | 24/01/2016
L'extrême droite amércaine ( Trump et autres ) reprend certains des thèmes individualistes et anti étatistes des " libertariens" disciples de Thoreau et d'Emerson ...
Écrit par : Père Synthèse | 24/01/2016
S'il existe une connivence entre l'îdéalisme gauchiste des bisounours et le capitalisme "libéral" version Macron , elle n'est pas nécessairement voulue ; il s'agit dans certains cas d'une complicité objective , non volontaire .
Ne reprochons donc pas à Castor de s'y prêter ; pour ma part je ne doute pas de sa sincérité : un instrument ne sait pas nécessairement quelle est la main qui l'utilise ...
Les voies de l'histoire , comme celles ( dit-on) de Dieu sont impénétrables ...
Écrit par : Mentor | 24/01/2016
Ce que Mentor dit de l'idéalisme bisounours indigné vaut aussi pour le socialisme et le communisme classiques : ils ont historiquement travaillé au triomphe du capitalisme et à sa survie : engager le prolétariat dans de fausses révolutions ou évolutions , l'encadrer pour qu'il ne soit que modérément contestataire ( " il faut savoir finir une grève " disait M Thorez)
Mais , d'accord avec Mentor , rien n'autorise à mettre en cause Castor en tant que personne : il n'est , à son niveau , qu'un instrument de l'histoire .
Écrit par : Bernard Kouchtard | 24/01/2016
Le plus intéressant dans tout ça : ce qui se passe dans la tête des gens plutôt que ce qu'ils disent .
Selon le sociologue américain Melvin Maurse , chacun vise en politique le confort mental maximum ; explication simple voire simpliste mais qui fonctionne assez bien ...
Il associe cette explication au concept de mode , plus opérant selon lui que celui de vérité .
Écrit par : Léo | 26/01/2016
" Melvin Maurse " ou " Morse " ?
Écrit par : Jean | 26/01/2016
Maurse ! ne pas confondre, surtout pas , avec Melvin Morse ,
lui aussi américain "spécialiste ", de... la communication avec les défunts ; voir la fiche Wikipedia de ce personnage ; délirant !
Écrit par : Léo | 26/01/2016
Je ne connais ni Maurse ni Morse , mais certains des patients qui fréquentent mon divan pourraient être des disciples du "spécialiste de la communication avec les défunts " et autres charlatans fortement médiatisés .
Quant à la recherche du confort mental maximum dont traite Melvin Morse , j'ai tendance à la prendre au sérieux , bien que la notion soit , en effet , " simple voire simpliste"; pour être pertinente , une explication n'a pas nécessairement besoin d'être compliquée .
Écrit par : Anne-Lise | 26/01/2016
--->>>> Anne-Lise : erreur dans votre 2è paragraphe ( ligne 2 ) : il s'agit non de Morse mais de Maurse ! le Père Castor va vous taper sur les doits ...
Pour compléter la fiche Wikipedia de Morse , voyez celle consacrée à François Brune ; c'est un prêtre français en free lance qui a imprudemment préfacé un ouvrage de l' "expert" en communication avec les morts ; il est lui aussi très versé dans ces " recherches " sulfureuses , mais un peu moins délirant .
Le Vatican le surveille sans l'avoir pour l'instant explicitement condamné .
Écrit par : Léo | 26/01/2016
Morse , Brune ...A l'occasion d'un travail administratif sur les sectes , j'ai naguère fait la connaissance d'un vieux chanoine
" missionné" par l'Eglise pour enquêter sur les organisations de type sectaire se réclamant ( abusivement) du catholicisme.
Il est entré un jour dans mon bureau portant deux valises bourrées de documents qu'il m'a aimablement commentés ...
Edifiant et inquiétant ...
Mon chanoine avait fait ses débuts en qualité d'exorciste officiel d'un diocèse de l'ouest ; puis il s'était , à la demande de sa hiérarchie , spécialisé dans ces questions , sans se limiter à son diocèse .
Përsonnage à la fois jovial et plein de bon sens , et surtout extrêmement bien informé ; pas du tout sectaire , très apprécié des associations engagées dans la lutte contre les sectes , tant laïques que confessionnelles .
S'il était encore de ce monde je lui demanderais ce qu'il sait et pense de Melvin Morse et de François Brune.
Écrit par : Mentor | 26/01/2016
Votre sympathique chanoine était " exorciste" , dites-vous ; cela existe -il encore ? J'en ai froid dans le dos ...
Écrit par : Johanna | 26/01/2016
" exorciste " : un des " grades" traditionnels du parcours conduisant à la prêtrise ' avec " sous-diacre" ," diacre ...)
Et aussi une fonction dont pouvait être chargé un prêtre au niveau du diocèse ; au temps de mon chanoine , déjà , cette fonction était de nature psy plus que spirituelle .
A la campagne , quand j'étais enfant , certains paysans recouraient à un prêtre pour désenvoûter leurs vaches qui dépérissaient et ne produisaient plus de lait et étaient supposées être victimes d'un sort ...
La plupart du temps , le vétérinaire trouvait une explication rationnelle : une mauvaise herbe mêlée au fourrage , l'étable mal nettoyée) ; dans de très rares cas , une enquête des gendarmes détectait un empoisonnement volontaire ( un voisin malveillant) .
Mais l'intervention du prêtre ( prières et eau bénite dans l'étable) ne pouvait pas faire de mal , disait-on : le "spirituel" complétant le rationnel ...
J'ai entendu parler de quelques cas de " guèrisons" imputées à la seule intervention d'un prêtre ; si cela a pu exister , ça me paraît relever de la psychologie plutôt que du " spirituel" ; Anne- Lise pourrait peut-être nous donner son avis là-dessus ...
Mais nous voilà loin du sujet : ce qu'il y a dans la tête des gens , bisounours et autres ...
Écrit par : Mentor | 26/01/2016
" Loin du sujet " ? pas tellement :
-"dans la tête des gens " il y a un mélange de rationnel et d'irrationnel ( voire de superstition : les plus atteints sont les idéologues ) .
-on peut être " sectaire" sans appartenir à une secte
- certains groupuscules politiques sont assimilables à des sectes ( au sein et à la droite du FN ; la nébuleuse trotskiste)
- on ne comprend bien Daesh que si on se réfère aux sectes les plus dangereuses du type de celles que pourchassait le brave chanoine évoqué par Mentor ;nos "experts" en sont bien loin ...
Écrit par : Bernard Kouchtard | 26/01/2016
Le rapprochement Daesh-sectes n'est pas absurde : emprise sur des psychisme fragiles , tendances suicidaires , rôle de gourous .
Pour essayer de bien comprendre Daesh , on peut aussi se référer au nazisme qui était autant une secte qu'une idéologie; il faudrait étudier les rapports établis dans les années 1945-1950 par les militaires et les administratifs qui ont conduit des opérations de dénazification .
Dans les années 20 fleurissaient en Allemagne des groupuscules à caractère " sectaire" et des sociétés secrètes que fréquentaient les premiers nazis ; Hitler lui-même semble en avoir subi l'influence ; certains " rites" SS s'inspiraient, semble-t-il , de ceux de ces organisations ésotériques .
Écrit par : Père Synthèse | 26/01/2016
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