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23/08/2016

La grotesque baudruche du présidentialisme

ballon-de-baudruche-bouquet-8.jpgLa gauche s'est, à juste titre, beaucoup moquée du casting de la primaire à droite, qui risque de se résumer à un concours de posture, doublé d'un grand test de "cap/pas cap d'être un vrai libéral" (défonce les 35h, mettre la retraite à 65 ans, couper 150 milliards dans les finances publiques, doubler les heures de travail des profs, saborder l'hôpital public) et "cap/pas d'être un vrai facho/réac (virer un peu, beaucoup, tous les musulmans de France, interdire le mariage pour tous ou démarier les couples gays...).

Problème, l'impopularité record de François Hollande ayant mené au même mode de désignation, la même pantalonnade est devant nous avec la primaire à gauche : "cap/pas cap d'être vraiment de gauche", où la majorité des candidats sérieux sont d'anciens membres de gouvernement sous la présidence Hollande (Montebourg, Hamon, Duflot) auquel il convient d'ajouter un Kennedy de sous préfecture vert de droite (François de Rugy) et deux personnalités plus à gauche (Marie-Noëlle Linnemann), mais ayant les mêmes chances de l'emporter que Robert Ménard ou Patrick Balkany d'être nommé Défenseurs des Droits. Pas foutu, mais pas gagné gagné.

Revenons sur les trois anciens ministres, car ils incarnent trois nuances de postures. La plus sauvable est Duflot. D'abord parce que sa loi, détricotée par Manuel Valls, répondait à une logique progressiste, régulatrice et d'opposition à un libéralisme sans entrave. Ensuite, elle n'a cessé de marteler ses différences avec le même Valls, notamment sur les questions écologiques (et pour cause) mais aussi régaliennes, sécuritaires ou encore le traitement des Roms qui heurtait sa sensibilité catho de gauche. Enfin, elle est partie d'elle même pour cause d'impasse de cette cohabitation. On peut ne pas aimer le personnage (perso, je ne conçois pas qu'on puisse appeler sa fille Térébenthine et être considérée saine d'esprit) mais au moins elle n'a pas les mains sales. 

Hamon, c'est le summum du postural. Longtemps cantonné à la partition "retenez moi ou je fais un malheur", il savait que procrastiner ou finasser encore un peu le consacrerait dans un rôle de Pierre Richard rêvant d'être Ventura ou Gabin. D'où sa candidature de témoignage dont il espère qu'elle lui vaudra, comme pour Montebourg en 2011, onction de changement de catégories de poids moyen en poids lourd de gauche. Mais la limite à tout cela tient à son passif gouvernemental. On parle quand même d'un type qui n'a jamais bossé autrement qu'en politique, a cultivé ses rentes d'élus copains depuis 20 ans... A force de réfléchir autant à son avenir politique, on peut espérer que lorsqu'il fut aux responsabilités, il en a tiré quelque chose : mais non. 27 mois au gouvernement, d'abord à l'ESS avec une loi a minima puis à l'éducation Nationale où il ne prévoyait rien. Dans aucun de ces deux ministères, il n'a débarqué en déclarant qu'il fallait tout changer, qu'un autre cap était nécessaire, ou autre. Non non, il est resté, poli et a continué de faire acte de présence. Et sans une sortie malpolie, il serait encore là. Un peu court pour incarner le changement.

Et cerise sur le gâteau, Montebourg. Montebourg, c'est un film qui te propose Roosevelt pour la BO, Mitterrand au scénario et Tony Blair à la réalisation. Du coup, aucun spectateur ne peut s'y retrouver... Lui aussi est resté 27 mois au gouvernement, et au même poste. Taillé sur mesure pour lui, de surcroît. Pour quel bilan ? Combien de sauvetage d'entreprises, d'emplois créés avec des lignes de budget importantes ? "Malheureusement, la fiscalité, les grandes mesures, tout cela ne relève pas de Bercy. En France, tout dépend du Président de la République" répond Montebourg quand on l'interroge sur son bilan de ministre. Quand à sa détestation de la politique de Hollande et du bilan gouvernemental, on se pince. Il se rêvait insolent en diable, Macron avant l'heure, mais l'insolence et les outrances sont mieux tolérées côté droite, avec les socialistes. Prière de ne pas réveiller la mauvaise conscience, cher Arnaud, d'où l'exclusion. Gageons que s'il n'avait été expulsé manu militari, il continuerait d'être le ministre frondeur promettant chimériquement sa démission tous les quatre matins...  

N'accablons pas Montebourg, ces petits camarades de gauche comme de droite disent cela. Fillon qui fut cinq ans premier ministre pour ne citer que lui, avance la même excuse pour expliquer son bilan navrant, mais que le même cerveau produirait des résultats à 180° différents. Qui peut gober ces fariboles ?

Ce concours de nombrils, pathétiques, ne peut s'arrêter tant que nos institutions seront aussi archaïques. Peut-on enfin convenir sans froisser personne que de Gaulle est mort et qu'il serait temps de changer des institutions crées sur mesure pour lui ? Dégonfler les baudruches des égos, retrouvez un peu de cohérence collective et faire en sorte que nos centaines de députés et nos ministres servent pleinement à quelque chose. 

Le plus navrant dans cette histoire, c'est de penser que la primaire à gauche a été conçu après un voyage d'observation US et que nous n'avons ramené que le show sans la vertu de ce dernier : être une centrifugeuse politique. Exit les candidats battus lors de cet exercice, renouveler les sheptels (à l'exception, notable, d'Hillary Clinton) de responsables, là, une palanquée de ministre que l'on recycle à l'infini... Caramba, encore raté. 

 

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