04/07/2017
Ivre de l'écume, l'opinion ignore la vague qui vient
Marcheur de tout premier plan, admirateur de Macron de longue date, un ami essayait de me convaincre que la tirade présidentielle sur "ceux qui réussissent et ceux qui ne sont rien" était humaniste et bienveillante. Comme je regimbais, il voulut me parler des saillies de Mélenchon. Je lui répliquais que nous n'étions plus en campagne et que, Président omnipotent, il devait assumer ses mesures et déclarations ; lesquelles étaient infâmes. Ne pouvant défendre le fond, il eut ce dégagement inattendu "l'opinion publique l'adore". Si on regarde le chiffre d'appréciation globale de la personnalité Macron, c'est incontestable. Après un monarque arrivé sur le trône épuisé et sans envie de changement (Chirac), pour satisfaire une clique affairiste (Sarkozy) et par défaut si ça n'est par accident (Hollande) l'image de Macron est flatteuse. Jeune, élancé et avenant, polyglotte et charmeur, il porte bien. Après que la fonction présidentielle a été affaiblie et dans une campagne où nombre de candidats ont tapé sur les médias, la pompe monarchiste de Macron et sa mise à distance d'une presse "pas à même de comprendre la complexité de la pensée présidentielle et pouvant affaiblir l'action gouvernementale par leurs investigations", passe tout à fait dans l'opinion. Enfin un patron qui commande et ne se laisse pas emmerder par des flagorneurs.
Ce qu'aime l'opinion, c'est le chef. Toutes les enquêtes successives montrent ce désir d'autorité en politique. Dans l'entreprise, les associations, l'éducation, partout les prises de décisions sont de plus en plus collectives, mais le politique fait -hélas- exception et la figure de l'homme providentiel triomphe toujours autant. Poutine, Trump, Erdogan, en savent quelque chose. Macron le sait, raison pour laquelle il invite les deux premiers en France, montrer qu'il est de leur niveau...
A court terme, l'autorité est payante dans l'opinion. Valls remplaçant Ayrault en est l'illustration parfaite. Une remontée délirante dans l'opinion (de l'ordre de 25% d'un coup) pour rigoureusement la même politique. Les coups de menton et les discours de martiaux de Valls étaient plébiscités par ceux qui voulaient "un vrai chef". Rien d'étonnant, donc, à ce que Macron triomphe par opposition au fluctuant Hollande, à court terme. Mais à plus ou moins longue échéance ?
Les études qualitatives du Cevipof sont très affirmatives : les deux principales préoccupations des français sont la fin de la corruption et autres conflits d'intérêts d'une part et une meilleure protection dans l'emploi, de l'autre. Or, sur le premier sujet les tours de passe passe avec éviction du Modem et bonneteau de Ferrand passé du gouvernement à l'Assemblée ne suffiront pas. Macron n'est pas là pour tout arranger en nous faisant passer dans un régime scandinave, sinon Muriel Pénicaud serait déjà virée. Au contraire, le président a dit hier "nous ne pouvons pas vivre dans un état de soupçon permanent". Etonnant renversement de perspectives : on élude des investigations en cours pour parler de "soupçons" quand, à contrario, alors que nous ne sommes pas en guerre, le président veut constitutionnaliser l'Etat d'urgence... Or, de Pénicaud à Ferrand, de sa conseillère agricole lobbyste du vin à sa plume issue de chez BNP, l'entourage de Macron est miné par les conflits potentiels. Le candidat Macron était 11ème et dernier candidat selon les classements des ONG en termes de dangers affairistes. Wait and see, mais je doute qu'il faille attendre longtemps pour avoir de vilains scandales.
Ensuite, plus de 50% des français veulent davantage de protection de l'emploi. La vague de dérégulation actuelle, où l'économie des plateformes s'appuie sur des formes contractuelles précaires comme l'autoentreprenariat ne rassure ni les propriétaires ni les banques prêteuses. Pourquoi le renforcement de cette lame par le CDD de chantier et autres outils flexibles contenus dans les ordonnances sur la loi travaille restaureraient la confiance ? Ca ne passera à l'évidence pas...
Hier au congrès, Macron disait que "la France n'est pas un pays que l'on réforme mais qui résiste tant qu'on lui présente mal les choses " l'hubris du jeune homme est de croire qu'il va tout changer. Admirateur de la capacité de Thatcher à réformer le pays, il se dit qu'il va réussir par la force là où les autres ont échoué. Ce, car cela sera dit plus onctueusement, avec de plus belles images. Mais Thatcher avait l'avantage de la primeur à droite, Blair a su en profiter pour faire la même chose, grimé en "3ème voie". Depuis, les ficelles sont connues. Le clone transalpin de Macron, Matteo Renzi, lui aussi arrivé au pouvoir avant 40 ans est reparti la queue entre les jambes quand il s'est cru plus beau que les autres. La gémellité des trajectoires pourrait bien se poursuivre et Macron aller en marche vers la sortie plus tôt que prévu.
09:37 | Lien permanent | Commentaires (17)
Commentaires
Exploitation assez réussie des éléments de langage qui circulent depuis hier soir ; même le Figaro s'y met ...
Écrit par : ...Saint-Thèse ... | 04/07/2017
Ce qui est amusant , c'est le désarroi des commentateurs politiques autorisés ( sinon qualifiés) de la presse .
Leur copie était rédigée avant même la fin du discours de Macron
Écrit par : ...Ravachol ... | 04/07/2017
Castor sur la même ligne que Le Figaro , on aura tout vu !
Écrit par : ...Léo ... | 04/07/2017
Le Figaro ne s'est pas encore remis du fiasco de Fillon ; plus amusante que sa réaction grincheuse : celle de Ciotti et des durs de LR .
Écrit par : ...JC Jaurras ... | 04/07/2017
Castor , une fois de plus , n'a rien compris , faute d'avoir lu la Constitution et d'avoir un minimum de recul historique .
Un point positif dans son texte : il ne célèbre pas ce que Laurent Joffrin appelait hier " L'insoumission potache " de Mélenchon .
Écrit par : ...Séraphita ... | 04/07/2017
N'accablons pas Castor :" il fait ce qu'il peut mais peut peu "
( appréciation portée sur la feuille de notation d'un fonctionnaire citée , si j'ai bonne mémoire par Mentor )
Écrit par : ...20 100 ... | 04/07/2017
Si l'opinion était en demande d'un " chef " , comme le dit Castor,
elle aurait porté au pouvoir Mélenchon ou Marine Le Pen .
Écrit par : ...Ravachol ... | 04/07/2017
La " réaction grincheuse ( Jaurras) " du Figaro , de Ciotti , des durs de LR et de Castor fait penser à celle des journalistes et politiciens du début de la Vème république , nostalgiques de laI V ème voire de la III ème ...
Avec une différence : à l'époque , les " grincheux " ont attendu un peu pour dénoncer le pouvoir personnel instauré car ils se rappelaient avoir évité de justesse d'être mis en Seine .
Écrit par : ... J Mentor ... | 04/07/2017
Ici , loin de Paris , on n'est pas à la recherche d'un " chef" ; on apprécie seulement d'avoir en la personne d' E Macron un président qui n'est ni un mollusque ( Hollande) ni un agité tel Sarkozy . Enfin du sérieux !
Écrit par : ... Mémé Octogénie ... | 04/07/2017
Ce qui est indécent et en même temps" irritant dans le comportement de Méluche , c'est l'insistance qu'il met à singer Jaurès ; pas la même pointure , tout de même ...
Écrit par : ... 20 100 ... | 06/07/2017
Il tient plus de Georges Marchais que de Jaurès .
Un peu de Robespierre aussi ...
Écrit par : ... Pépé Castor ... | 06/07/2017
Les pitreries de Méluche et consorts sont utiles à E Macron : elles contribuent à achever de déconsidérer ce qui reste du "soccialisme" .
Dans le genre , le pauvre Hamon fait moins bien
Écrit par : ... J Mentor ... | 06/07/2017
"Il tient plus de Georges Marchais que de Jaurès .
Un peu de Robespierre aussi ...
Écrit par : ... Pépé Castor "
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Georges Marchais avait , selon moi , plus de fond que Méluche , et il était plus sympathique ...
Écrit par : ... Anna- Lisa ... | 06/07/2017
Calme plat à Sciences -Po : les vacances , la chaleur , et les discours de Macron et Philippe qui ont endormi les rares profs et étudiants encore présents .
On a juste aperçu Hamon qui cherchait à faire adhérer certains jeunots à son nouveau parti ; en vain ...
Écrit par : ... Julius ... | 07/07/2017
La " réaction grincheuse ( Jaurras) " du Figaro , de Ciotti , des durs de LR et de Castor fait penser à celle des journalistes et politiciens du début de la Vème république , nostalgiques de laI V ème voire de la III ème ."
---------Pas clair , cher Mentor : vous voulez sans doute dire "nostalgiques de la IV ème " ( 4 ème ) ; il fallait laisser un espace après " la " .
Écrit par : ... Pépé Castor ... | 08/07/2017
Une question d'espace en effet ; vous avez toujours l'oeil vif , cher pépé Castor ; et qui du pied ?
Écrit par : ... J Mentor ... | 08/07/2017
ça s'arrange ; on peut donc dire que j'ai " bon pied , bon oeil "
Je le dois à une consommation régulière d'eau bénite de Lourdes et de Fatima mais aussi de bière et de rosé ( d'Anjou)
Écrit par : ... Pépé Castor ... | 08/07/2017
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