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22/12/2019

2019, la trumpisation du débat par la macronie

Ceci n'est ni une pipe, ni un titre provoc. Plutôt le constat, amère et dépité, du jeu d'apprentis sorciers auquel jouent les membres et soutiens de la majorité. La semaine dernière, suite au raz de marée en faveur de Boris Johnson, deux politologues, Pauline Schnapper et Emmanuelle Avril, avaient fustigé le baisse du niveau du débat public, à cause d'une rhétorique populiste s'appuyant sur des mensonges éhontés pour faire passer ses carabistouilles : l'immigration ? À cause de l'Europe. La baisse de la dépense publique ? La faute de l'Europe. L'inaction contre le réchauffement climatique ? Ask Bruxelles. Plus c'est gros, plus c'est passé. Comme pour Trump, comme pour Bolsonaro, comme (même s'il n'est pas encore élu, il est de loin le plus populaire) Salvini, le PIS en Pologne, Andrej Babis en République Tchèque... 

Dans tous ces pays, les élections furent le même théâtre d'un débat public dégradé par des "outsiders" des "challengers" qui fustigeaient le pouvoir en place avec quelques dominantes : attaques au "politiquement correct", attaques contre les journalistes qui mentent, attaques contre le train de vie de l'État qui ruinent les honnêtes travailleurs qui essayent de s'en sortir. Tous promettaient une vision revisitée de la méritocratie façon Far West : soit t'es Rockfeller, soit tu creuses ta tombe. Le philosophe Patrick Savidan dans son livre "voulons-nous vraiment l'égalité ?" explique l'explosion d'un vote pour des libéraux xénophobes chez des populations qui ont beaucoup à perdre avec leurs élections (faible niveau de diplôme, vivant éloignés des métropoles...) par "une démocratisation du désir oligarchique". Les perdants en ont marre de perdre et veulent ressembler à celui que l'establishment juge répugnant, mais qui est milliardaire. Bolsonaro n'est pas milliardaire, mais soutenu par ces derniers et par les icônes populaires et ploutocrates comme Neymar pour faire rêver, comme Poutine avec ses stars de JO dopés.

Partout, donc, ceux qui attaquent les médias et l'État sont à l'extrême-droite. Or, en France, la macronie a pivoté en 2019 comme on dit dans la langue des start up. En 2017, ils arrivaient, il y avait lune de miel pendant quelques mois, c'était presque cool. 2018 s'est considérablement durcie avec la privatisation de la SNCF, qui a donné lieu à des batailles de chiffres et d'arguments âpres, mais corrects. Deux visions du monde antagonistes et un affrontement dur comme souvent sous la Vè. Les affaires, en revanche, ont commencé à fendre la coquille. Sur l'Affaire Benalla, la défense fut Trumpiste (du "qu'ils viennent me chercher", aux oukases contre la pourtant légitime commission d'enquête de Philippe Bas...). Bon an mal an, ça tenait. Le parti au pouvoir parlait comme un parti de droite classique. Et puis, vinrent trop de choses, trop de boules de neiges, trop d'affaires pour tout contenir. 

De l'impensable justification des violences policières pendant les manifestations des gilets jaunes (à Hong Kong, une personne éborgnée, fin des violences policières. Chez nous, 26 éborgnés, et ça continue avec l'impunité assurée par la chaîne hiérarchique...) aux rocambolesques soutiens à tous les personnages rattrapés par la patrouille (Rugy, Delevoye, Sylvie Goulard), la macronie a commencé à accuser le "parti de l'extérieur de chercher à lui nuire". Ils ont très largement relayé des thèses farfelues selon lesquelles le pouvoir était victime de tentative de destabilisation de l'étranger... Moche. Trumpisation dans les attaques systématiques aux médias accusés de relayer des fausses nouvelles. 

Et puis 2019, c'est la trumpisation sur le fond des réformes. Avec celle de l'assurance chômage, Macron a de nouveau convoqué ce fameux "désir oligarchique". On a ressorti les fadaises ineptes et immondes sur "les chômeurs font le tour du monde avec leurs allocs", "quand on veut on peut" et on a réduit de façon inédite les droits à l'assurance chômage. La justification sous-tendant cette réforme c'est que les chômeurs acceptent de n'être "rien", quand ils pourraient être "tout" pour reprendre les propos présidentiels... Avec l'actuelle réforme des retraites, on atteint des records dans le déconomètre, quand on nous explique que tout le monde sera gagnant. Chiffres à l'appui, les vrais gagnants sont ceux qui gagnent plus de 10 000 euros par mois. Mais justement, avec leur nouveaux atours, les majoritaires se défient des chiffres. Ils expliquent que les chiffres mentent, que les statistiques officielles mentent. Jeudi dernier, 25% des personnels de l'INSEE étaient en grève, épuisés d'être instrumentalisés : nos meilleurs statisticiens ont apporté un démenti formel pour rappeler que la réforme des retraites fera bien plus de perdants que de gagnants. Matignon a grondé... 

A part les attaques contre le "politiquement correct", la majorité coche désormais un grand nombre de cases des rhétoriques des populistes droitiers. Foucades à répétitions contre la fonction publique, toujours trop "nombreuse", "bien traitée", voire "privillégiée". Exigence accrues pour l'octroi d'aides sociales, exit l'universalité, il faut "mériter" l'obole... Attaques violentes contre les "officines" (Médiapart en premier lieu) qui colportent de faux chiffres... Fait amusant, le journal Le Monde a globalement une ligne très pro Macron, mais sa rubrique les Décodeurs est en surchauffe à force de démonter les lénifiantes énormités de Darmanin, Le Maire et autres... 

Électoralement, cette stratégie catastrophiste du "nous on vous dit la vérité contre les autres qui mentent" n'est pas forcément stupide, les européennes l'ont confirmé. Mal en point politiquement, une tête de liste calamiteuse et une France de plus en plus eurosceptique n'ont pas empêcher LREM de faire plus que limiter la casse aux européennes. Mais démocratiquement, c'est une catastrophe : ceux qui sont censés défendre les corps intermédiaires (médias, justice, syndicats, ONG, lanceurs d'alerte) les agresse systématiquement. Encore une fois, l'histoire montrant que l'on préfère toujours l'original à la copie par souci d'authenticité, je crains qu'après avoir humé l'esprit populiste pendant quelques années, les français voteront pour le goûter pleinement. 

Commentaires

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Salut les copains et copines !

Je ne vous oublie pas mais les misères faites à mon boss Donald me préoccupent et occupent beaucoup.

Le titre de ce texte de Castor m'a fait rire , et son contenu plus encore .

Chez nous , c'est le camp démocrate qui essaye de se macroniser , en tentant une synthèse entre sa droite et sa gauche , comme l'a fait votre jeune Emmanuel ( dont le ministre de l'intérieur est socialiste et celui de l'économie conservateur ) .

Nos gauchistes boboïdes sont moins créatifs et médiatiques que les vôtres ; nos étudiants et leurs profs , moins politisés que chez vous , ne s'intéressent qu'aux questions de genre et d'écologie ; confinés dans des réserves , ils influencent peu la société et la politique nationale ; d'autre part , leurs études sont payantes , ce qui les dissuade de se mettre en grève.

Comme chez vous , le peuple des travailleurs et des chômeurs vote à droite et plus ; les responsables syndicaux , mieux nantis que les cadres de votre CGT (certes pas malheureux) , ne se mobilisent , et peu durablement , que sur des sujets concrets et locaux .

Je constate , à vous lire , que les " petits marquis" de gauche vous irritent ; nous en avons aussi quelques -uns , notamment à la cour des époux Clinton ; mais ils ne sont visibles que dans des milieux très restreints , contrairement aux vôtres qui squattent les médias .

Écrit par : Trumpette | 23/12/2019

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" qui squattent les médias "

Chaque chaîne se doit d'accueillir quelques petits marquis gaucho-boboïdes ; attractions très appréciées du public fin connaisseur .

Un peu comme les familles qui organisent des dîners de cons

Écrit par : Léo | 23/12/2019

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Nos avons , comme vous , une extrême droite et une gauche extrême ,mais elles sont très minoritaires et ne copinent pas comme le font en France Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon qui ne cessent de se complimenter réciproquement .

La gauche extrême n'est guère antisémite , à la différence de la vôtre et l'extrême droite pas du tout car elle soutient Israêl , même et surtout quand elle est chrétienne intégriste .

Écrit par : Trumpette | 23/12/2019

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Le flirt Marine -Jean-Luc est une affaire privée , non politique ; ils se sont tapés dans l'oeil

Un tel couple improbable n 'est pas le premier dans l'histoire ( ex : Heidegger -Hannah Arendt )

Écrit par : Roa du Luxembourg | 23/12/2019

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Nous souffrons en France, hélas , d'un grand déficit d'
intellectuels dignes de ce nom , j'en suis réduit à éditer, car il faut bien vivre , de pâles caricatures de Sartre , Malraux , Camus , Aron et autres grands de naguère .

Vos intellectuels , ici méconnus et même méprisés , et peu prisés chez vous , les dépassent de cent coudées et sauvent l'honneur de la pensée .

Écrit par : Gaudimard | 24/12/2019

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Nous souffrons en France, hélas , d'un grand déficit d'
intellectuels dignes de ce nom , j'en suis réduit à éditer, car il faut bien vivre , de pâles caricatures de Sartre , Malraux , Camus , Aron et autres grands de naguère .

Vos intellectuels , ici méconnus et même méprisés , et peu prisés chez vous , les dépassent de cent coudées et sauvent l'honneur de la pensée .

Écrit par : Gaudimard | 24/12/2019

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Si j'en crois votre télé , vous avez BHL , Luc Ferry , Attali, Minc et Macron ...

Ce n'est pas rien , tout de même ...

Écrit par : Trumpette | 24/12/2019

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Hélas , hélas , hélas !

Écrit par : Gaudimard | 24/12/2019

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Jacques Julliard , Mona Ozouf , Michelle Perrot , Madame Jospin , tout de même ... il est vrai que ces gens ne disent pas être des " intellectuels "

Macron ? oui selon sa bio ; mais c'est de la com' ...

Écrit par : J Mentor | 24/12/2019

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Le déficit d' intellectuels dignes de ce mot et d'intelligence : une affaire surtout de " mental" , je le répète inlassablement et , pour une certaine part aussi de milieu et de mode ( la posture , le jeu de rôle tenant lieu de pensée ...) .

Écrit par : Anna Lisa | 26/12/2019

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L'affaissement du " mental" : peut-être une question d'alimentation ( solides et liquides ) et de mode de vie
( intoxication par les réseaux sociaux et la pub )

C'est contagieux ; ici nous nous efforçons de préserver notre intégrité , tant physique que mentale , ce qui n'est pas toujours facile .

Tous les conseils seront les bienvenus ...

Écrit par : Mémé Octogénie | 26/12/2019

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Vous n'avez pas , chère Mémé, besoin de conseils car vous n'êtes en rien affectée par l'affaissement du mental .

J'incline à penser que les anciens résistent mieux, dans l'ensemble , que leurs cadets , jeunes retraités et surtout " actifs" quadras et quinquas .

Les plus jeunes et même les très jeunes sont assez peu affectés , habitués qu'ils sont à en prendre et en laisser

J'en connais qui lisent des livres ; oui , des livres , et qui détournent avec un humour parfois cruel la pub, la com' et la propagande politique ...

Écrit par : J Mentor | 27/12/2019

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Les quadras , une " génération sacrifiée " , victime de l'éducation dispensée par des profs post-soixante-huitards et aussi de la mauvaise bouffe évoquée par Mémé .
Irrécupérables, je le crains ...

Écrit par : Léo | 27/12/2019

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" irrécupérables" ? nul ne l'est si l'on y met le prix ainsi que Mentor l'a dit il y a peu : stages de désintoxication alimentaire , mentale et intellectuelle , hélas non pris en compte par la Sécu .

Mais cela implique qu'existe une forte volonté politique de le faire ; difficile car tout le monde tire profit de la situation : les quadras mentalement endommagés sont une clientèle idéale et quasi captive pour les marchands de gadgets aussi coûteux que dangereux et pour les responsables politiques en quête de militants dociles .

Écrit par : Anna Lisa | 30/12/2019

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Suggestion pour les stages de désintoxication animés par Mentor : des séquences de travaux manuels , aux champs ou en usine , comme on le faisait et le fait toujours en Chine ; que l'homo loquax qui se prend pour un sapiens , redevienne faber

Écrit par : Paul Prolo | 01/01/2020

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