Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

14/04/2021

Auto-légendes dorées

Idriss Aberkane, Juan Branco, Raphaël Llorca : même combat. Mêmes mythos sur le CV, même fascination de gogos tombant dans le piège. Les deux premières baudruches furent dégonflées, attendons de voir pour la troisième, mais on aurait pu s'épargner cela.

Commençons par le commencement : le CV a peu d'importance, au fond. On doit évidemment être jugé sur le fond, sur pièces, sur les écrits. Mais justement, bidonner son CV, tisser son auto-légende dorée est un signe de cuistrerie folle, un truc égotique mal dégrossi. Aberkane avait trois doctorats un peu partout dans le monde avant qu'on voit que son post doc à Stanford était un stage de deux mois ; Branco n'est ni normalien, ni conseiller officiel d'Assange. Ce sont des pêchés véniels, mais plus que de laisser fuiter ces mensonges, ils les alimentent. Et ça c'est grave.

Ce matin, première matinale de France, Llorca est présenté comme "philosophe du langage et chargé d'études à la Fondation Jean Jaurès". Point. Deux titres intellectuellement respectable. A 26 ans, seulement. La journaliste l'intronise, le crée, façonne sa légende dorée, nous écoutons un philosophe. Llorca est diplômée d'une business school, l'ESCP. A son âge, ça compte, il en est sorti il y a 3 ans... Il fait une thèse, certes, mais avec le spécialiste de la marque. De la pub. Ça ne disqualifie pas, mais il faut le dire, il n'est pas politologue, il regarde Nike et Apple et cherche des parallèles avec Macron. Pas dans la haine pour la fiscalité où les normes sociales et environnementales, mais pour la manière de se vendre. Bon. Ensuite, il est planneur stratégique chez Havas. Là aussi, ça n'est pas infamant, mais il faut le dire. Son bulletin de paye, plus élevé à 26 ans que des universitaires de 40, est réglé par Havas pour vendre de la 5G Verte d'Orange ou de l'entreprise citoyenne de LVMH. En un clic, on trouve d'ailleurs une note rédigée par le jeune homme où il explique que l'avenir est aux "entreprises providence". Au moment où la France compte 6 millions de chômeurs et une croissance exponentielle des soutiers, forçats, intérimaires, tâcherons qui travaillent pour mais pas dans les entreprises, vouloir que l'entreprise assure des missions protectrices n'est pas une demie connerie, c'en est une pleine. Cette note est téléguidée pour vanter les groupes du CAC, façon loi Pacte. C'est grotesque. 

Même sur son "objet", "la marque Macron" son propos est inepte. Il confond la neutralité par ennui (la gauche la droite ne l'intéresse pas, il ne croit qu'aux marchés) et la neutralité par goût des deux. Un ami linguiste me disait "c'est ennuyeux de prendre comme conseiller amoureux quelqu'un confondant l'asexualité et la bisexualité". Pas mieux. 

On a tellement ôté de choses aux vrai.es chercheuses et chercheurs : conditions de travail dégradées, salaires gelées jusqu'à être sous le niveau de la mer, précarité croissante à l'entrée dans la carrière, mépris des dirigeants élites et économiques. Tout ce qui leur reste, c'est leur sérieux académique. Qualifier Llorca de philosophe est une insulte. Qu'il tisse sa légende dorée comme le faisait Séguéla grand bien lui fasse, mais de grâce, épargnez nous la reprise de cette propagande inepte. Merci. 

 

Les commentaires sont fermés.