05/12/2021
Contester l'héritage, foutre la paix au cadavre
Hier, Pierre Rabhi est mort et contrairement à Desproges pour celle de Tino Rossi, je n'ai pas repris deux fois des moules. Car Rabhi était un adversaire, pas un ennemi. Si Zemmour venait à décéder - d'un AVC ou d'une marche ratée, hein, je suis contre la violence, bien sûr- je déboucherai la meilleure bouteille de ma cave pour fêter ça. Rien de tel hier soir.
Eu égard à l'architecture des algorithmes des réseaux sociaux, mes fils pleurent ou ricanent ce matin. Et je ne comprends pas les deux. Se moquer de la mort du mec au motif qu'il fut réac, homophobe et sans doute islamophobe, toutes choses vraies et très bien sourcées par Jean-Baptiste Malet (voir lien en com'), c'est faire ce qu'on lui a reprocher toute sa vie : avoir une toute croyance dans l'individu, pas le collectif. L'homme Rabhi est un mystique chelou, à la conversion au christianisme aussi tardive qu'émerveillée et rance (il ne crache pas sur Maurras) et obscurantiste (c'était un anti vax forcené, qui fit des conférences avec l'immonde Professeur Joyeux). Mais ça n'est pas le problème...
Après tout, Simone Veil a bien fini sa vie en défilant dans les rangs de la Manif pour Tous, mais ça n'est pas son héritage. Son héritage, c'est la loi qui porte son nom, une certaine idée de l'émancipation des femmes en politique, un goût de l'Europe... Et l'héritage de Rabhi, et il est funeste, c'est cette connerie de Colibris. Change toi toi-même, sois le changement que tu veux voir advenir et autres fadaises individualistes et indolores. Jamais de lutte, de rapport de forces, de dénonciations chez Rabhi, une mystique new age. Comme disait le syndicaliste Chico Mendes, "l'écologie sans lutte des classes, c'est du développement personnel". Pardon mais il s'est acoquiné avec Jean-Marc Borello et son nauséabond groupe SOS. C'est un ami intime de Nicolas Hulot et je vois tous mes amis de sa galaxie pleurer à chaudes larmes depuis hier. Sa sobriété heureuse, ça n'était pas de la décroissance, mais une attitude individuelle, une morale de vie, en somme. Une religion. Politiquement, Rabhi décomplexe les libéraux : en étant un consom'acteur conscient, en allant faire un peu de bénévolat dans sa ferme l'été, on rachète les pêchés polleurs de son âme comme les riches achetaient leur séjour au paradis en payant des Indulgences.
Paix à votre âme, Monsieur Rabhi, mais mort à vos Colibris qui n'ont jamais fait que diversion pendant l'incendie sans jamais tenter de l'éteindre.
13:51 | Lien permanent | Commentaires (0)
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