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08/06/2010

A quand entreconnards.com ?

Couple-amoureux2-154551_L.jpgUn papier du Monde, hier, m'a laissé pantois. Il s'agit d'une analyse du marché des sites de rencontres avec une lecture critique (heureusement) du sociologue Pascal Duret. Selon lui, "qui se ressemble s'assemble ne constitue pas une fin en soi. L'être humain a souvent besoin de diversité, d'altérité, de confrontations stimulantes", merci Pascal. En même temps, il suffit d'être allé une fois dans des terres reculées, loin des bourgs, où, avant que les transports modernes n'existent on s'attrapait entre cousins. Nous voilà aguerris sur les limites esthétiques de l'endogamie...

Ce qui me laisse pantois, donc, c'est que la logique du marché du célibat va à l'encontre de cette évidence: après le généraliste meetic.com, un grand nombre de sites spécialisés, sur mesure, se sont lancés. A savoir, d'abord des sites de rencontres entre religieux, dont j'ai oublié le nom: le site musulman revendique 46 000 adhérents. Hortefeux doit jubiler, si ces gens-là restent ensemble... Hortefeux justement, il y a ceux qui apprécient ses idées et les autres, deux trois margoulins on donc crée un portail type droite.com et un gauche.com ... Ajoutez à cela les évidents sites par genre homo.com, lesbos.com, trans.com (j'ai fait le tour ? Je m'y perds avec ces nouvelles identités, moi...). Enfin, puisqu'on ne mélange pas les torchons smicards et les serviettes à hauts revenus, ils ont crée des portails VIP type attractivewolrd.com ... L'équivalent l'Oréal du portail; tu payes une fortune pour la même crème, mais tu as une jolie photo qui te dit que tu le vaux bien, alors.

Le fait est connu "ils osent tout et c'est à cela qu'on les reconnaît". Là, ils sont franchement démasqués: après tout ça,  d'autres vont prochainement se lancer: entresportif.com et entreecolo.com... Voilà voilà voilà, je les trouve encore timorés, j'attends entrechargedemarketing.com, entreancienscout.com, entrefandeDenisot.com ... Je doute que l'on en arrive là, mais je continue de me demander ce qui peut bien se passer dans la tête des types qui lancent ce genre de portails. Quelle envie de créer un monde plus homogène? Z'ont pas vu Bienvenu à Gattaca ? Z'ont pas vu les leçons de l'histoire, quand on veut réunir que les riches, que les blonds ou autres et exclure les types aux nez crochus, doigts fourchus? Ah Barbara, quelle connerie la guerre du oueb.

Pour parodier Hammerstein, rappelons que la peur de l'autre ne constitue pas une vision du monde. Il y a dans cette apologie de l'homogénéité quelque chose de franchement affligeant. Et pour une fois, les citoyens pourraient mettre fin à cela. Car autant je doute de la potentialité effective d'un boycott des matchs de la coupe du monde pour punir la FIFA (il restera toujours au moins 2 milliards de téléspectateurs), autant je crois sincèrement qu'on peut aider ces margoulins à mettre la clé sous la porte en désertant leur site.

Demain, nous irons chercher Jean-Marc Sylvestre et autres thuriféraires libéraux des indicateurs pour parler du coût de la vie: 75% d'augmentation suite à 11 suicides chez Foxconn, 1,5% après 46 suicides chez France Télécom. Je sais, c'est stupide, mais pas plus que les conneries qu'ils nous racontent à longueur de journée sur l'obligation de comprimer les effectifs à cause de la mondialisation....

06/06/2010

Déjà disponible ! Et pourtant on s'en fout...

disponible.jpgCe matin dans le JDD la pub s'étale sans honte sur un bon 1/4 de page : "déjà disponible sur Ipad". Les récits sont donc à disposition chez Hachette. J'emplois volontairement "à disposition" terme neutre, de tête de gondole, qui ne signifie pas qu'il y aura du monde pour ces "produits".

En réalité, toute cette histoire de livre sur Ipad me rappelle un excellent sketch de Fernand Raynaud. Fernard rentre dans un café et demande un café et un croissant. "On a plus de croissant" lui répond t'on. IL réplique "dans ce cas, mettez moi un thé et un croissant"; "mais on a plus de croissant" "oh pardon, mettez moi un chocolat chaud et un croissant"... Etc... Bon, faut imaginer Fernand, l'accent, le truc qui dure mais c'est très drôle quand c'est lui.

On pourrait transposer cette histoire avec des marketeux désireux de se mettre sur "le livre".

-Bonjour, je voudrais vendre des livres en Club.

-Ah, mais mon bon monsieur, les gens ne lisent plus aujourd'hui.

-D'accord, je voudrais vendre des livres en cadeau avec un journal alors.

-Mais, les gens ne lisent plus, regardez les études, 31% des français n'ont même pas lus un livre dans l'année. Vous comprenez ? Ils s'en foutent, trouver autre choses, le cinéma, c'est bien, ça le cinéma ou des séries encore mieux des séries !

-Ah d'accord, j'avais pas compris et bah mettez les livres en ligne sur un Ipad, alors c'est l'objet le plus tendance de tous les temps, la tablette la plus importante de l'histoire depuis celle de Moïse...

Du coup, puisque les gens ne lisent plus, on en profitera tranquille pour regarder Nadal/Soderling sans cas de conscience. Sauf si la pluie s'en mêle, alors, il faudra trouver un loisir.

05/06/2010

Ne pas se carrer du care

Dans le Monde magazine, Martine Aubry explique sa vision du care. Modeste, elle reconnaît qu'il y a au moins 6 courants de pensée, l'un empruntant à Levinas et d'autres. Elle ne voit donc pas en quoi elle trahit les féministes américaines qui l'accuse de détournement intellectuel.

Le care, donc, signifie le soin mutuel; vaste programme... Manuel Valls argue que les gens ne sont pas malades, Ségolène et autres saluent un modèle empreint de "valeurs" qui soutient l'intérêt général et redonne la parole à la base. Plus intéressant, le reportage qui suit, à Lille, où l'on voit le care en actions. Que se passe t'il ? Quelques exemples de tutorat pour des jeunes en difficulté, des rencontres autour de l'art, des initiatives patronales en partenariat avec de jeunes boxeurs... Toutes choses connues de ceux qui s'intéressent aux partenariats noués dans le cadre du mécénat d'entreprise. Et pour cause, l'entreprise mécène (en matière de solidarité, plus que de culture) se place dans le paradigme de la réparation, elle agit pour réparer une faute originelle: celle du capitalisme.

Aussi, je trouve particulièrement intéressant l'émergence du care actuellement. Cela traduit le renoncement à l'idéologie, la fin de la croyance dans le grand soir et la capacité du politique à changer le monde et l'acceptation, voir la résignation, au besoin de petits matins. La crise, contrairement à ce que prétendent les chroniqueurs mondains qui vantent l'énergie de Sarkozy et de Merkel, a prouvé l'infinie faiblesse du politique qui s'est couché devant les marchés: les bonus repartent comme jamais et personne ne s'intéresse aux millions de personnes laissées sur le carreau. Peut être une crise plus grave changera t'elle la donne, mais pour l'heure, nous n'avons pas bougé d'un pouce dans notre idolâtrie sénile du libéralisme. Je devrais dire sénile et honteuse ce qui explique en quoi le care peut prendre dans l'opinion. Honteuse car nous nous accommodons mal de ce libéralisme, mais pas au point de vouloir de l'abondance frugale pour parler comme de Foucauld, voir une décroissance heureuse pour parler comme Gorz. Nous préférons des petits renoncements.

Dans "dégagements" Régis Debray s'interroge avec virtuosité sur les différences générationnelles. Il se souvient notamment des années où un communiste ne parlait pas à un patron par principe. Aujourd'hui, cela nous paraît éculé et nous tapons dans le dos de gens qui ne pensent pas comme nous. Heureusement ? Oui, sans doute. Mais cela revient aussi à reconnaître l'impuissance du politique. J'ai vu des élus très à gauche aller chercher des subsides privés sans états d'âmes et je les comprends car les fonds sont là et produisent des effets concrets quand eux ont, sur leurs territoires, des besoins urgents. Donc tout le monde est content et le care c'est cela. Un moindre mal. Personnellement, entre le care et la hache qu'on nous propose aujourd'hui, je n'hésite pas une seconde.

Toutefois, je me demande simplement plutôt que ce nouveau sacro-saint "intérêt général", quel politique courageux relancera cette belle idée; le service public. Hier soir, un énarque brillant et très à gauche puisqu'il avait quand même posé dix jours de congés et d'économies pour aller au championnat du monde de poker (in DSK we trust...), m'expliquait doctement pourquoi il fallait fermer les maternités rurales car c'était la vraie gauche responsable. Sans doute, si j'avais fait l'ENA, j'aurais compris, je dois être d'une gauche hermétique à ces subtilités, mais quand j'entends ça je me dis que le care est vraiment une bonne pioche comparé aux autres visions en lice dans la primaire...

Demain, anniversaire du débarquement, nous chercherons une plage pour aller chanter les vacances au bord de la mer de Jonasz....