05/09/2010
Des livres et nous, délivrez-nous de cette pensée Houellebecq/Zemmour...
Hier soir, discussions à bâtons rompus, voix enrouées, gorges enrougées...
Des magistrats, des avocats pas fiscalistes et des profs dans des zones où l'éducation ne peut pas s'offrir le luxe d'être secondaire... Un niçois se lamentait sur mon épaule; Estrosi, Mariani, Ciotti, Lionel Luca, tout ça vient de chez lui. On a les arabes qu'on mérite lui répondsi-je en rigolant.
Nous étions dans la ligne de la manif' de l'après-midi, pas vraiment rassérénés comme nous eussions dû l'être. D'ordinaire, les manifs servent à ça; une vaste catharsis sous forme de partouze, des dizaine de milliers à gueuler contre les injustices jusqu'au moment où on ne les sent plus. Mais là non, elles nous grattent toujours ce matin, comme une gueule de bois lancinante qu'aucune aspirine ne parvient à éloigner.
Ce midi, Hortefeux reprenait inlassablement l'adage "diviser pour mieux règner", diviser les uns contre les autres... Mais, la France d'Hortefeux c'est celle de Zemmour et de Houellebecq, une France fantasmée. Je les comprends de dénoncer ce qu'ils dénoncent et de détester ce dont ils parlent, c'est terrifiant... sauf ce n'est que ça n'existe pas.
Le livre de Pierre Bayard sur "parler des livres qu'on a pas lu" est hilarant, mais trop de détracteurs de Zemmour et Houellebecq omettent de perdre un peu de temps à les lire. Un peu, ça suffit. Ca suffit à démonter le même mythe de ces écrivains en carton-pâte à la langue si pauvre que l'on doit se tourner vers les commentateurs de football pour trouver un équivalent. Chez Zemmour, les paysans sont "durs au mal" ont le teint "bistre" et les mains "calleuses", les femmes "taiseuses, aux seins lourds". Chez Houellebecq, les blacks sont "barraqués, avec des jeans qui tombent sur les fesses et des caleçons moulants qui laisse deviner leur grosses bites". Malheureusement, je n'invente rien, c'est à chaque page.Niveau clichés, Epinal peut bien aller se rhabiller...
Il est d'ailleurs fort amusant de noter que le dernier livre de Houellebecq est accusé de plagiat pour avoir recopié des passages de Wikipedia. Le symbole est trop beau: il a recopié la description de la ville de Beauvais. J'ignore la véracité du propos, mais l'anecdote vaut démonstration: un écrivain qui vit cloîtré et nous emmène dans ses peurs et ses fantasmes grandit par le oueb. Idem pour Zemmour qui décrit à longueur d'édito des zones où les tournantes sont monnaies courantes et où l'Islam dominera la France (selon lui, la Seine St Denis parlera arabe dans 10 ans...).
Cette France de blancs apeurés par la perte de leur virilité touche le public qui voit une montée des périls... Rien de neuf sous le soleil: hier les grandes bourgeoises voulait se faire culbuter par le méchant Mesrine, avant c'était les blousons noirs, et Lady Chatterley déjà le palefrenier... Faut bien s'encanailler un peu. Mais là, c'est fini, les canailles nous flanquent trop la trouille. Il y a un changement, c'est culturel disent-ils.
Dans "l'Arabe", le très beau livre d'Antoine Audouard, on a ça: un village du sud de la France où un arabe est haï avant d'arriver. Pourtant on en a vu des pas de chez nous, portugais, espagnols mais là, c'est pas pareil, disent-ils. Le roman pour le coup, n'est pas fantasmagorique, c'est pour cela qu'il prend aux tripes: superbe chronique du racisme ordinaire.
Le verso ce serait "Salaam la France" de Bernard du Boucheron. Un français, médecin, qui se rend en Algérie pour travailler, en 54. Là-bas, c'est lui l'arabe, celui qui sera épargné par un nerveux qui lui dira "casse toi petite merde, pour toi c'est salaam la France"... Il a la trouille, se sent faible et fuit. Il arrive en France où il racontera ses peurs et les Zemmour Houellebecq coloporteront ces légendes urbaines qui nous mettent dedans aujourd'hui...
Demain nous irons chez le cordonnier ressemeler nos chaussures, car plutôt que de courir après le Pen, on va marcher droit devant en espérant que tous les autres suivront et que le camp d'en face reculera...
17:56 | Lien permanent | Commentaires (9)
02/09/2010
Société de la trouille: on monte d'un cran même dans le ciel
Dans la série on vous gouverne par l'émotion, nouvelle étape franchie, avant-hier: sur Air France, les enfants voyageant seuls seront maintenus à distance des adultes par "prévention de dérive pédophile". Voilà voilà voilà...
Il y a depuis quelques années une surenchère incroyable. On avait atteint déjà un très beau sommet en 2007 quand Nabot Léon avait ferraillé avec Onfray pour Philosophie Magazine et déclaré, tranquille "je pense qu'il y a un gêne de l'homosexualité comme il y a un gêne du suicide". Mais oui Nico, au fond, c'est un peu les mêmes des taffioles ceux qui se suppriment...
Quand ça reste un concept gazeux, pourquoi pas, mais quand les fans de Minority Report rivalisent d'innovation pour mettre en place d'improbables ligne Maginot contre la délinquance, tout cela ne sent pas bon.
Toute une batterie de mesures se met en place pour prévenir la délinquance à l'école: dépistage ADN chez les gamins de 3 ans (l'ineffable Frédo Lefevbre) mise en place de portiques à l'entrée des lycées... Dans les entreprises aussi, on se barricade, plus un immeuble qui ne soit construit sans norme sismiques, normes terroristes et autres... Sans voir que c'est comme cela que nombre d'illuminés pètent un câble et se lancent dans de vastes tueries façon Columbine....
Ouais, ça sent pas bon tout ça et ça finira forcément façon polar. Dans le meilleur des cas, ça inspirera un Erwan Larher dont j'ai déjà dit tout le bien que je pensais de "qu'avez-vous fait de moi?http://www.michalon.fr/Qu-avez-vous-fait-de-moi.html ) . Dans le pire, je préfère ne pas y penser...
Demain, nous nous délecterons des reportages sur la rentrée des profs sans filet, Chatel ayant eu l'idée de génie de supprimer les IUFM....
07:52 | Lien permanent | Commentaires (7)