10/08/2012
Ode a l'aveugle de la plage d'An Bang
Le diable se cache dans les détails, les joies simples aussi. Arrivés sur la plage paradisiaque d'An Bang, a Hoi An au Vietnam, nous nous gobergeons du décor. Des petites pailllotes et des cahutes bien aménagées, de la musique pas trop forte et des jus de mangue succulent à souhait. Ne serait cette incroyable touffeur, on y passerai la journée. Ce pour un autre raison: l'horizon bleu et l'immense panorama avec des petites îles au loin à l'est et à l'ouest, une plage par laquelle les américains débarquèrent lorsqu'ils pensaient qu'envahir le Vietnam Nord communiste relèverait du camp de vacances.
Difficile, face à ce spectacle d'une beauté inouïe, de savoir ce que chacun en retient. Nous levons régulièrement les yeux de nos livres (numériques pour l'amoureuse qui a embrassé la modernité pour la légereté de l'objet quand je me trimballe mes pavés) pour admirer en silence. En bas des types bodybuildés et rougeauds comme des homards ont mis de la dance à fond (je leur ai intimé de baisser avec succès) et jouent au frisbee en s'applaudissant chaque fois qu'ils l'attrapent (c'est ainsi qu'on subodore que ce sont des yankees....) sans regarder. D'autres lutinent, butinent, sans doute de nombreuses privillégiés (puisque là) sont comme nous sensibles au charme du lieu. Mais sans doute personne n'est aussi heureux que ce couple que nous avons aperçu tous les matins.
Ils ont leurs rituels, la même place que personne ne voudrait leur contester et le même nombre de baignades quotidiennes. 3, une par heure, ils se déchaussent à l'ombre d'une cahute au milieu de la plage et rentrent dans l'eau de concert. On a pied sur plus de 100 mètres dans cette mer de Chine encore translucide. Ils font quelques brasses, s'étreignent, sourient toujours et ressortent ensemble. Elle le guide, il déplie une canne blanche. Impossible de venir troubler pareille quiétude mais tout de même, on tend l'oreille. Ils parlent un anglais très distingué, ils doivent avoir des prénoms à l'avenant, j'aime à croire qu'ils s'appellent Doris et Walter. Leurs sourires les rend sans âge, mais pour la description disons que ce sont des jeunes retraités au sens espagnol du terme. En espagnol, la retraite se dit "jubilacion" et c'est tout à fait cela, ils jubilent d'être ensemble. Elle lui décrit par le menu ce qui se trame sous ses yeux à elle. Leur complicité émeut, elle émouvrait n'importe qui.
Il est 14h et le soleil tape dur. Walter se lève et se dirige vers la mer. Il fait la planche, les commissures de ses lèvres s'étirent de joie jusqu'à ses oreilles. Il fait quelques brasses et regagne la terre ferme en sifflotant. Doris ne l'a pas quitté des yeux. Ils repartent dessus bras dessus bras dessous vers d'autres aventures. Merci à eux pour cette parfaite leçon de bonheur terrestre.
Demain, nous reprendrons une activité normale en vacances avec des visites, quoi.
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01/08/2012
Générosité bien ordonnée commence-t-elle par soi même ?
C'est une discussion qui m'a frappée, mais comme Rantanplan hurlant dix secondes après qu'on lui a marché sur la queue, je n'ai réalisé mon trouble que quelques heures après les échanges verbaux.
Lors d'un déjeuner délicieux de langueur, le stress enfin débranché, on devisait de tout et de rien, mais un peu de boulot quand même, puisque mes commensales étaient également mes employeurs occasionnelles. Elles travaillent comme salariées dans une très très très grosse association. Cela veut dire que leur quotidien est emprunt de valeurs pas à tout fait compatible avec une logique de fermeture. Je faisais dévier la discussion sur le don, ce dernier étant fort utile à leur association. J'en déduisais donc qu'elles donnaient. "Ha non, je ne saurais pas à qui donner" dit l'une. Etonnant, l'autre réponse était plus évidente "mon don, c'est mon travail". Mon réflexe Rantanplan est sans doute lié à l'action émolliente du vin rosé et au fait que lassé d'échanges trop vifs toute l'année, je ne vous pas me lancer dans une nouvelle querelle. Simplement, quand elles me demandèrent si moi je donnais, je leur fis une réponse assez évidente à mes yeux : "dans mon cas, entre mes cours, un livre à venir, d'autres passés et les amis ou relations dont j'accompagne les combats, si je ne donnais pas, je serai à peu près aussi crédible qu'un curé ne priant pas en privé".
Je ne pense pas que mon cas soit très intéressant en la matière, mais bon, globalement, si les acteurs de ce secteur ne donnent pas, c'est à désespérer. De plus, n'étant pas particulièrement à plaindre, je n'ai aucune excuse pour ne pas donner. Dont acte. On trouve nombre d'études sur la générosité, soulignant que les entreprises s'implique, que le grand public français est très généreux mais que nos hypers riches sont proportionnellement, et de très loin, les plus radins au monde. On ne trouve pas, en revanche, d'étude sur la générosité du secteur associatif (si vous en connaissez écrire au Castor qui se le transmettra et sera ravi). Il y a de bonnes raisons à cela, il ne faut pas aller chercher une quelque angoisse des résultats, mais plutôt une trop grande difficultés. Le secteur associatif est trop hétérogène, plus d'1,2 million d'assoc, tant avec uniquement des bénévoles et une minorité employeuses avec une poignée de grandes employeuses. Or, pour donner, encore faut-il avoir. Ceux qui sont bénévoles, même s'ils ne donnent pas alors qu'ils sont salariés ou ont des revenus par ailleurs, ont l'indéniable avantage de donner de leur temps et par là même de montrer leur générosité. Sauf qu'il faudrait pouvoir descendre plus finement dans les méandres : être bénévole dans une assoc qui amène des gosses handicapés moteurs en vacances l'été fait montre d'un altruisme plus éclatant qu'un bénévolat, même à l'année, au sein d'une assoc de boulistes ou de philatélistes...
Donc, je comprends l'impossibilité de monter un appareil statistique cohérent, néanmoins je ressors un peu frustré, dans la mesure où je ne sais pas si la générosité est bien ordonnée et que ceux qui font le choix d'aider et donner dans leur métier sont généreux y compris en dehors des heures de bureau. Le bon sens voudrait que cela soit le cas, mais de la même façon que les philosophes réfléchissant sur l'éthique ne sont pas tous de sains hommes, il n'est pas dit que mon déjeuner soit anodin.
Quand ce genre d'interrogations commence à vous obséder et que vos neurones se déclenchent avec une heure de retard, c'est définitivement que vous avez besoin de vacances. Ca tombe bien, j'ai la chance de pouvoir en prendre. Peut être une carte postale du bout du monde, ou non, l'inspiration en jet lag n'est jamais à exclure.
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