Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

20/07/2013

Stakhanov vs Dilletantor ?

On nous a sans doute menti, une fois de plus. Stakhanov était américain, ça expliquerait beaucoup de choses.

Les soviets en fait, la surproduction, le boulot à bloc, c'était pas leur truc. Les ricains si. Pas qu'ils soient les plus productifs, ou même les plus bosseurs, mais les plus perfectionnistes. Ils ne croient pas à l'intuition, à la tentative, au "je ne sais quoi". Pour eux, tout se bosse, se prépare, se dose et s'avance. C'est frappant pour qui va dans une librairie, on leur doit les premiers guides pratiques rapidement supplantés par tous les bouquins de développement personnel qui sont en quelque sorte des guides pratiques d'une vie meilleure. Mais ce mal s'est supplanté bien au delà : dans des tonnes de boulot.

Chez nous, qui vous aide pour votre vie ? Quelqu'un pour le ménage côté ancillaire et un psy côté cérébral. Point barre. Pas eux. Eux ils ont tout. Nous avons disucté avec deux couples qui se marrient dans un an. Ils ont le temps de faire ce qu'ils veulent et organiser ça easyly ? Non, ils ont des wedding planner.  Si votre couple ne va pas comme vous le voulez, vous en parlez autour d'un verre de rouge ? Non, vous allez chez le love counseler... Vous cherchez un sens à votre vie ? Ne cherchez pas longtemps et ne demandez surtout pas autour de vous : allez voir un life coach... On peut l'étendre à tout, les écrivains ont des agents pas les français, et tout une ribambelle de gens dévoués à rendre la vie de certains autres meilleurs. Dans un pays où la lutte des classes se sent de façon beaucoup plus ténue qu'en France (ce sera une autre note) une certaine élite trouve normal qu'on lui fasse la courte échelle toute sa vie et que c'est mieux pour elle. D'un point de vue français, ça ne tient pas debout. En revanche, force est de reconnaître que le sens de l'histoire n'est pas tricolore...

Je pense que le fossé culturel sera quasiment impossible à combler, mais crois aussi que si la plupart des habitants aiment leur pays et la mentalité qui va avec un grand nombre d'entre eux éprouvent un spleen lié à des complexes civilisationnels. Je connais nombre de français qui ne se sentent pas suffisament reconnus individuellment, pensant que la France est un vaste collective qui abaissent les choses et meurent d'envie d'aller aux US ou chacun à sa chance à condition de se donner à 100%. Ou leur travail sera mis en lumière, où ils pourront se donner à fond et gagner plein de blé pour rentrer dans cette spirale où l'on vous assiste pour tout.

In fine, comme souvent, ce sont les US qui gagnent et le match n'aura pas lieu. La France commence doucement à être envahie de life coaches, de gourous et autres qui viennent nous importer des méthodes américaines quand la french touch reste réservé à 3 DJ, 2 designers et 3 stylistes, 2 rugbymen refusant la muscu à outrance et les méthodes "modernes"...

Les optimistes diront que ces nouvelles relations sont humanistes car fondées sur des relations avec des êtres vivants. J'y vois deux limites. Primo, socialement, seule une toute petite frange à accès à ce système d'aide et est prête à tuer pour avoir le train de vie qui lui permet de mettre tout un tas d'activité classique sous assistance. Et c'est assez gerbant, et ça donne un pays ou 43 millions de personnes ont besoin de tickets de l'Etat pour se nourrir. Deuxio, les relations sont fondées sur des méthodes dites éprouvées mais de ce que j'ai pu voir on balance entre un scientisme désuet et un côté gourou new age. Si je devais commencer une partie de jeu vidéo où combattent Stakhanov et Dilletantor, je sais que le second a moins de supers pouvoirs, mais je le prendrais quand même. Et au moment de se bastonner, je me barrerai loin...

14/07/2013

Journal califnorien (part one)

Arriver en Californie c'est d'abord se coltiner un très long voyage. Mais aussi longues furent les 8 premières heures jusqu'à New York avec une colonnie d'adolescents français, elles n'avaient rien à voir avec ce qui a suivi une fois que vous entrez sur le sol américain. D'abord la douane... Pour un pays d'immigration et d'ouverture, c'est une litote de dire qu'ils ne vous facilient pas la vie. A quoi servent tous ces investissements électroniques faramineux si c'est pour réserver le même sort à tous : américains, touristes, ceux qui viennent pour la 1ère fois et ceux qui viennent bosser. Maintenant que les frontières européennes ne comptent plus je n'ai pas visité tant de douanes que cela, à peine une dizaine, mais même en Russie ou au Vietnam, l'affaire était pliée en quinze minutes montre en main contre une heure et demie ici pour reprendre les empreintes de tes doigts et l'iris de l'oeil. Plus personne n'est même choqué, ou ne pense à dire mot car ce serait pire. Donc on fait la queue comme des cons pendant une heure et demie pour accepter des trucs absurdes. Peut être, quand on reviendra dans 10 ans et qu'on nous demandera de cracher dans une coupette pour un test de salive plus un prélèvement sanguin, nous ne dirons rien.

Idem pour la sécurité à Newark ou tout le monde enlève en plus de sa ceinture, ses chaussures, et tout le reste, sans rien dire. Comme on trouve norrmal d'être debout les mains en l'air dans un tube en verre. Les dictatures ne commencent pas autrement. Mais celle ci est plus pernicieuse car cool, toute en soft power et sous le sceau de la liberté, pour votre bien. Passons.

Arriver en Californie, pour de vrai, c'est arriver dans l'infiniment grand. Nous effectuons une promenade matinale, mais ce sera la seule. Nobody walks in L.A. disait la chanson. C'est toujours vrai. Louer une voiture est une nécessité. Je ne peux pas encore m'avancer, n'ayant pas quitté L.A. mais les résevrations que nous avons faites et les photos des lieux qui ryhtmeront notre séjour ont l'air d'une incroyable diversité paysagière. Un truc fou. Tout est vert bio, "organic" comme ils disent. Tous nos copains ont pris le côté consumériste du bio avec ses bons côtés : ils bouffent de meilleurs fruits, du meilleur poisson , des meilleurs céréales que nous aussi. De la meilleure viande aussi, mais ils ne mangent plus de viande. Trop XXème siècle. Ils sont tous bronzés et bio et pourtant rouler pendant des heures dans une voiture de sport reste leur plaisir favori. Contradiction ? Ma tane chez qui nous logeons m'entrouvre une porte d'optimisme "conduire une Prius est devenu socialeemnt acceptable comme toutes les voitures hybrides. Nous viendrons au green par l'attitude". La Californie c'est la tyrannie du cool...

L'autre chose qui vous frappe, même si ça sonne cliché, c'est l'énergie. Les classes de yoga de 6H30 du mat sont pleines, partout les gens courent, sautent, nagent, surfent et sont plein de projet. S'ils sont down, ça ne se voit jamais. Alors, vous vous laissez aspirer et entrez dans la noria du fun. Le rêve pour les vacances, défintivement. Invivable au long terme pour des français...

La prochaine fois, je vous expliquerai comment vivent les cochons domestiques, pourquoi les chats sont rois au point qu'on laisse couler l'eau de la douche pour qu'ils puissent y boire et enfin comment la majijuana est prescrite en cas de maux de tête... Califfornie, tout est possible et bien plus encore !  

 

10/07/2013

Demain, les fonctionnaires à droite ?

pictoroutier_b4.jpgCe serait tout de même un sacré coup porté à nos mythologies nationales. De celles qui nous rassurent. Les petits commerçant et les bigots à droite, les fonctionnaires et les laïcards à gauche.

Ces chromos ont envahi les discussions de comptoir, émaillé les files d'attentes dans les supermarchés ou les bouchons de l'A6 ; un peu partout on entend la France impatiente pester  "putain de fonctionnaires, mais avance/bouge ton cul/ bosse pour une fois ça te fera les pieds"... A contrario, si l'on tend l'oreille, on devine au milieu d'une foule de surhommes, de forçats et de cadres sups, ces mots fins "moi je bosse moi, je me défonce, je suis pas fonctionnaire". Bref, cette masse informe des "fonctionnaires" qui rassemblent en réalité la fonction publique d'Etat, la territoriale, et l'hospitalière, avec des personnels forts différents allant des profs aux policiers en passant par les agents des impôts. Peu importe pour le grand public qui les englobe dans un même amas avec les agents SNCF, RATP et ceux de la Poste (qui ne sont pas fonctionnaires, mais ne nous fâchons pas pour si peu). Il y a encore à peine 20 ans, ce Moloch avait vainement tenté de faire élire Jospin puisque près de 70% d'entre eux votaient à gauche. Et si Hollande a été élu l'an passé, il ne le doit que partiellement à ces bataillons qui ont massivement fui les socialistes...  

69% en 1995, 61% en 2002 et 2007 et seulement 54% en 2007. Quand on pense à la masse concernée (plusieurs millions de personnes) une érosion aussi forte n'a pas d'équivalent dans le reste de l'électorat français. Quand on songe à la stabilité séculaire des grands équilibres électoraux, on se demande comment une telle diminution a pu intervenir en moins de vingt ans. A contrario, il faut imaginer quelles sont les franges de l'électorat où Hollande est allé puiser un spectaculaire redressement pour compenser la baisse chez les profs surtout (entre 1995 et 2007, où Royal a touché le fond, la boucherie de Chatel et les promesses d'Hollande lui a permis de regagner quelques points auprès d'eux). Peut être pas les fiscalistes, mais sans doute un grand nombre d'employés du privé. Des employés, et pas des ouvriers qui majoritairement, désormais, s'abstiennent de voter, ou accordent leurs faveurs à Marine le Pen ou Mélenchon avant d'aller vers les socialistes...

Reste cette chute de 15 points. M'est avis que l'on peut trouver la réponse dans "Le nouvel esprit du capitalisme" de Boltanski et Chiapello. La logique libérale et la montée de l'individualisme partout en Europe a imprégné l'ensemble du tissu social. Aussi, aujourd'hui le clivage n'est plus public/privé, mais dans une lutte des places. Le sentiment individuel est monté très fortement chez les fonctionnaires qui veulent cette reconnaissance individuelle avec les marques matérielles afférentes (primes, promotion, mérite) ; toutes notions qui existaient peu il y a 30 ans où tout était régi par une supérieure (et Tartuffe) "méritocratie". A contrario, la peur de la perte d'avantages acquis (35h, mutuelles, tickets resto) et plus globalement peur de la perte de leur emploi a fortement monté dans le privé, qui se sont électoralement déportés à gauche pour obtenir une protection.

In fine c'est le triomphe absolu de l'idéologie libérale qui a instillé dans tous les cerveaux cette idée nauséabonde : avoir un emploi relève désormais du privilège et il faut souquer pour le conserver...